vendredi 24 mai 2013

L’impossible Etat de droit au Congo



Quand nous appelons les constitutions africaines et les institutions étatiques qu’elles définissent à la barre pour mieux éclairer leur responsabilité dans l’effondrement généralisé du continent et quand nous plaidons pour la mise en place des institutions adaptées aux réalités locales du pouvoir afin d’asseoir enfin les bases de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance, nous n’écartons nullement la responsabilité de l’homme.

Celle-ci reste entière, car c’est bien à l’homme qu’il appartient de mettre son cerveau au service de sa nation pour que les institutions fortes fassent en sorte que les hommes forts deviennent une espèce en voie de disparition.

Les dictateurs ont aussi de l’amour patriotique

La responsabilité de l’homme ne renvoie pas à ce que l’on entend si souvent dans les milieux congolais, à savoir la présence ou l’absence de volonté politique ou encore d’amour patriotique. On peut bien avoir la volonté de bien faire de même qu’aimer son pays, mais mal gouverner tout simplement parce qu’on ne sait pas comment s’y prendre.

Si déjà au niveau des intellectuels les plus diplômés les causes de l’Etat de non-droit et de la mauvaise gouvernance divergent et partant leurs remèdes, à fortiori pour ceux qui arrivent au pouvoir par un coup de hasard (chance eloko pamba), gérer la res publica peut se résumer en un manque de stratégie appropriée.

Mobutu avait l’humilité de confesser que quand il était devenu chef de l’Etat, il ne savait par où commencer. Dans ses meetings populaires, il lui arrivait de se demander tout haut ce qu’il pouvait bien faire pour rendre son peuple heureux. Il était sincère. Il aimait bien son peuple. Mais il n’avait aucune recette pour lui donner la prospérité auquel il avait pourtant droit.

Alors que les problèmes de l’armée nationale sont bien connus, notamment le favoritisme de tout genre qui démotive et entraîne un manque de perspective de carrière, les salaires de misère et leurs détournements, etc., du haut de son marxisme cocotier, Laurent-Désiré Kabila avait estimé que le problème résidait dans la mentalité du soldat qu’il fallait changer. Il a gavé ce dernier de séances de rééducation à la base militaire de Kitona sans que celles-ci n’aient le moindre impact.

Quand aujourd’hui on jette l’anathème sur Joseph Kabila, on oublie, hélas, que celui-ci est arrivé au pouvoir sans avoir le moindre bagage intellectuel pouvant lui permettre d’insuffler une dynamique nouvelle en rupture avec le passé dictatorial. A cet égard, il n’est pas différent du commun des Congolais.

Lui aussi s’est retrouvé sans le savoir et sans le vouloir dans un mauvais système institutionnel dont il ne connait les causes profondes, même s’il est le premier à en tirer les plus grands bénéfices personnels. On comprend ses errements quand il cherche à en sortir.

Parfois, il pense que le Congo est la Chine de demain. Parfois, il regrette de n’avoir pas encore trouvé la dizaine d’hommes qu’il lui faudrait pour pousser le pays de l’avant.

L’importance d’un visionnaire

Qu’il s’impose par les urnes ou par les armes, un président de la république peut mettre en place une dynamique qui instaure l’Etat de droit et la bonne gouvernance dans son pays. Encore faut-il qu’il pose le bon diagnostic sur l’Etat de non-droit et la mauvaise gouvernance et qu’il y apporte le remède qui convient.

Dans notre vie de bourlingueur, nous avons eu la chance de rencontrer un chef d’Etat qui avait volontairement renoncé au pouvoir que lui donnait une clause constitutionnelle parce que celle-ci favorisait la mauvaise gouvernance. Il s’agit de la présidente du Liberia Ellen Johnson Sirleaf.

Après avoir contribué à l’organisation des élections qui l’avaient hissée à ce poste, en notre qualité de conseiller électoral provincial chargé de la formation électorale et de l’éducation électorale et civique de la population dans la province de Lofa en 2004-2005, nous étions rentrés dans ce pays en 2006 pour aider à la restauration de l’autorité de l’Etat à travers l’ensemble du territoire national.

Comme tous ses prédécesseurs, la présidente Ellen Johnson Sirleaf avait le droit de choisir et de nommer comme bon lui semblait les gouverneurs des quinze provinces et les commissaires de tous les districts du pays. Cela était d’autant plus aisé qu’elle venait de gagner les élections dans le cadre de la démocratie partisane et conflictuelle, car nombreux de ses partisans attendaient d’être rétribués.

Contre toute attente, la présidente, consciente du fait que ce pouvoir constitutionnel ouvrait grandement la porte au clientélisme, ingrédient par excellence de l’Etat de non-droit et de la mauvaise gouvernance, renonça à son pouvoir.

Faute de modifier la constitution, elle demanda à la communauté internationale de l’aider à organiser son peuple de manière à ce que chaque province se choisisse un gouverneur et un vice-gouverneur et chaque district, un commissaire à travers un processus qui combinait à la fois des consultations populaires et le processus électoral classique.

Pour piloter ce processus, deux experts internationaux étaient déployés dans chaque province. Notre équipe, composée de notre superviseuse, une diplomate chevronnée de la République des Maldives, et de nous-mêmes, était basée dans la province de Margibi, qui abrite la plantation d’hévéa la plus grande au monde, celle de la multinationale américaine Firestone.

Nous avions vite compris que notre superviseuse, qui découvrait pour la première fois le continent noir, ne connaissait pas grand-chose de la politique africaine en dépit de son grand profil en diplomatie. Aussi lui avions-nous demandé de nous laisser les mains libres pour mettre en place un plan de travail afin de mieux organiser la population.

Puisque la présidente elle-même avait fait fi de son propre parti, nous avions décidé de faire de même d’autant plus que pour nous, les partis en Afrique sont plus une source de nuisance plutôt que de bonne gouvernance. Nous avions alors appliqué les idées que nous avons toujours défendues au chapitre de la démocratie, en organisant la population suivant les différentes identités communautaires qui la composaient à l’intérieur de la province et de chaque district.

Chaque communauté avait choisi librement ses représentants, devenus de grands électeurs. Nous avions convoqué ces derniers au chef-lieu de la province et nous les avions encadrés afin de définir les profils des candidats aux postes de gouverneur, vice-gouverneur et commissaire de district, avant de passer au processus électoral classique avec le dépôt des candidatures jusqu’à l’élection et la publication des résultats.

Pendant que d’autres provinces se débattaient encore à élaborer des plans de travail acceptés par la population, nos idées simples, que des Congolais prennent pour des élucubrations puisque ne venant pas de tel ou tel autre penseur politique occidental, avaient permis à la province de Margibi d’être la toute première à déposer les noms des candidats sélectionnés à la présidente de la république.

Comme on devait s’y attendre, au sommet de la province, le gouverneur était d’Upper-Margibi (Haut-Margibi) et le vice-gouverneur de Lower-Margibi (Bas-Margibi), les deux plus grandes identités communautaires de la province. A la satisfaction générale de la population.

Ainsi, l’unité de la province était une réalité et non l’illusion que créent les partis politiques dans pareille circonstance. Non seulement nous étions les premiers, mais en plus, contrairement à plusieurs provinces, notre liste n’avait souffert d’aucune contestation une fois arrivée à destination.

Dans certaines provinces, les contestations avaient atteint des dimensions si inquiétantes que la présidente, qui voulait éviter le clientéliste, était obligée de trancher et de nommer des clients à elle.

Conclusion

Le clientélisme est le premier mal dont souffrent les Etats africains. Les germes de ce mal se trouvent confortablement installés dans les constitutions et les institutions étatiques qu’elles définissent. Pour qu’il y ait Etat de droit et bonne gouvernance, il faut d’abord poser ce bon diagnostic.

Combien d’intellectuels et hommes politiques congolais ou africains ont déjà pris le temps de réfléchir à ces questions pourtant primordiales ?

Parmi ceux qui l’ont déjà fait, combien ont réussi à poser le bon diagnostic ?

Qui n’a pas encore entendu des diagnostics farfelus même de la part de plus grands diplômés : malédiction, maladie congénitale, manque de maturité, manque de volonté politique, manque de patriotisme, manque de culture démocratique, absence de langue commune, rivalités ethniques ou encore le mal, c’est Mobutu, etc. ?

Il ne suffit pas de poser le diagnostic. Encore faut-il trouver le bon remède pour éradiquer le mal. Pour effectuer cette double démarche rationnelle, l’intelligence humaine peut intervenir à deux niveaux. Au niveau collectif, lors d’une consultation nationale telle que la conférence nationale.

Malheureusement, le fanatisme de la liberté, combiné au complexe du colonisé, avait pris la conférence nationale en otage. Elle était devenue une véritable confusion nationale qui avait accouché de mécanismes institutionnels boiteux.

D’où la pérennité de la dictature sous un vernis démocratique. Et quand une nation n’est pas capable de se prendre en charge, il arrive, cas rarissime, qu’elle puisse compter sur un homme providentiel qui aurait la capacité intellectuelle de poser un bon diagnostic, de découvrir le remède qu’il faut et d’avoir la volonté politique de l’administrer à son pays.

Cet oiseau rare, c’est ce qui s’appelle homme providentiel. Ce serait pire folie pour une nation que de croiser les bras et d’attendre sa venue d’autant plus que personne ne peut prévoir son ascension. Il convient donc que l’intelligence collective soit mise à contribution au moment opportun.

Et des moments opportuns, le Congo en a eu à revendre au cours de son histoire, les derniers en date étant la conférence nationale dite souveraine et Sun City.

Economiste formée aux États-Unis et première femme élue au suffrage universel à la tête d’un État africain, Ellen Johnson Sirleaf était consciente du fait que le clientélisme est le premier ennemi de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance. Mais a-t-elle pour autant trouvé le bon remède contre cet ennemi coriace ? Non.

La présidente libérienne s’était contentée d’une demi-mesure qui ne pouvait donner que de maigres résultats. Le remède approprié voudrait que les constitutions définissent les institutions de telle manière qu’elles traquent le clientélisme partout, à commencer par le sommet de l’Etat.

Quand celui-ci devient une zone de droit, l’Etat de droit et la bonne gouvernance ne peuvent que répondre présents au rendez-vous de l’histoire.

Pascal Mwamba Kabeya
Direct!cd

La problématique de la paix dans les Grands Lacs....


La problématique de la paix dans les Grands Lacs est tributaire du conflit rwandais et surtout de la volonté de la minorité tutsie d'écraser la majorité hutue et d'infiltrer le Congo-Kinshasa pour étendre son influence.


Ainsi, le régime mono-ethnique de Kagamé, une dictature placide, empêche toute une région de vivre sainement tant les frustrations qu'il génère en refusant les libertés et les droits au peuple rwandais au plan interne et sa propension à la destabilisation du grand voisin congolais sont des facteurs d'une explosion qui risque de faire perdurer les questions sécuritaires dont le belliqueux Kagamé met en avant pour masquer son rôle de seigneur de guerre et de fauteur de trouble.

La communauté internationale doit savoir que la paix dans les Grands Lacs demeurera une illusion tant que le mal ne sera pas traité à partir de la racine. C'est-à-dire que, en commençant par le réglement du conflit inter rwandais et qui passe forcément par un dialogue entre Kagamé et la majorité hutue rwandaise et aussi les FDLR et autres mouvements qui ont pris les armes contre son régime.

Et, tant que ce dialogue ne sera pas d'actualité, on aura beau évoquer la paix mais y parvenir s'apparentera à chercher la quadrature du cercle.

Jean Roger Mboyo Ey'ekula

Le nouveau printemps arabe viendra des stades de foot

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Une émeute entre la police et les supporters du JSM Bejaia au Blida Stadium en 2008 / REUTERS
Une émeute entre la police et les supporters du JSM Bejaia au Blida Stadium en 2008 / REUTERS

Prédictions d'un blogueur, qui analyse le phénomène des hooligans en Algérie.

«Les stades deviennent les incubateurs de la protestation et de l'insurrection», déclare James Dorsey sur son blog «The turbulent world of Middle East soccer», hébergé sur le site du Huffington Post («Le monde turbulent du football au Moyen-Orient»).

Selon cet ancien journaliste, les troubles qui sévissent actuellement lors des matches de foot en Algérie ne sont que les prémices d’un bouleversement politique plus profond, tout comme l’agitation des supporters cairotes précédait la révolte égyptienne.

L’analyste affirme qu’après les printemps arabes en Tunisie, en Egypte ou encore en Lybie, c’est maintenant l’Algérie qui prend le chemin des soulèvements de masse… par le football. Pour Dorsey, le football est le «noyau historique de la contestation politique en Algérie» parce que ses habitants sont des inconditionnels de ce sport.

Les montées de violence dans les stades sont révélatrices d’un climat de tension dans le pays. Selon l’article, elles soulignent la frustration des jeunes générations confrontées à des difficultés pour trouver un emploi ou un logement.

Quelques manifestations de mécontentement ont lieu chaque jour dans le pays, mais c’est dans les stades que s’exprime la colère des Algériens, déclare Dorsey. L’article évoque un «accord tacite» entre les forces de l’ordre et les protestataires, qui peuvent notamment y clamer leur mépris pour le président Bouteflika.

Mais cela ne va pas sans heurts : depuis cinq ans, ce sont 2.700 blessés et sept personnes qui ont trouvé la mort en marge des matchs de football, rappelle l’auteur.

 The turbulent world of Middle East soccer
SlateAfrique 

Attentats-suicides au Niger: le plan diabolique des djihadistes au Sahel

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Une installation d'Areva à Arlit / AFP
Une installation d'Areva à Arlit / AFP
 

Les attaques d’Arlit et d’Agadez laissent penser que les djihadistes ont déjà un calendrier bien précis.

Douloureux a été le réveil des Nigériens, le jeudi 23 mai. Un double attentat a été perpétré à Agadez, la grande ville du Nord du Niger et à Arlit sur un site d’uranium d’Areva.

Deux véhicules piégés ont visé un camp militaire et une usine de l’entreprise minière. L’attentat a été revendiqué par le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Il a fait une vingtaine de morts ainsi qu’une douzaine de blessés.

Il y a péril en la demeure, est-on tenté de dire. Puisque les djihadistes ont mis à exécution leurs menaces; eux qui, naguère seulement, promettaient de s’attaquer aux intérêts de tous les Etats qui ont soutenu l’intervention militaire au Nord-Mali. Ce qui laisse croire qu’ils ont déjà leur calendrier et qu’après le Niger, bien d’autres Etats pourront faire l’objet d’attaques terroristes.

A qui le tour donc? Car avec des ennemis sans visage, qui sont partout et nulle part, il y a fort à parier que si rien n’est fait, ils feront de la sous-région ouest-africaine, une géhenne bien plus insupportable que celle dont parlent les Saintes Ecritures. Car, faut-il le rappeler, la lutte contre le djihadisme ne peut être gagnée que si les efforts sont mutualisés et si les Etats acceptent de se donner la main.

Synergie d'actions

 

C’est ce que semble avoir compris le Nigeria, ce géant au pied d’argile, qui appelait le Niger voisin au secours dans la récente guerre qu’il a lancée contre la secte islamiste Boko Haram.

Seule une synergie d’actions peut permettre de vaincre ou, du moins, d’affaiblir ces «illuminés» qui ne croient ni en Dieu, ni au diable et qui ont pour seul objectif de semer la terreur et la désolation sur leur passage. De toute évidence, ce qui vient de se passer au Niger est la preuve, si besoin est, qu’aucun Etat n’est à l’abri de la menace terroriste.

Pour avoir été victime de prises d’otages, le Niger s’était depuis lors préparé à toute éventualité si fait qu’on imaginait difficilement pareilles attaques terroristes sur son sol. Malgré tout, il vient de subir la foudre des djihadistes, même s’il faut, au passage, saluer la prompte réaction des forces de défense et de sécurité nigériennes qui, si l’on en croit le ministre de la Défense, ont neutralisé les assaillants.

Détermination et concentration

 

Au fait, le Niger, il faut le reconnaître, est quelque peu victime de sa situation géographique. La plupart de tous ses voisins vivent le péril islamiste si fait qu’il est difficile pour lui de ne pas en subir les contrecoups. Il s’agit d’un côté du Nigeria qui est constamment en proie aux actes terroristes de Boko Haram, de l’autre du Mali qui, quoi que l’on dise, ne s’est pas encore remis de la colonisation djihadiste et enfin de la Libye qui, jusque-là, cherche encore ses marques.

C’est dire que le Niger apparaît comme une île dans un océan de tempête qui, malgré tout, s’efforce autant qu’il peut, de rester lui-même.

Le président Mahamadou Issoufou n’a jamais baissé la garde dans la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne. Il faisait d’ailleurs partie de ceux-là qui préconisaient la méthode forte contre les djihadistes du Nord-Mali dès le début de la crise.

Il ne faudra donc pas que, pour une raison ou pour une autre, les hommes en treillis exploitent la situation actuelle pour tenter de revenir aux affaires, soi-disant pour mieux combattre le terrorisme. On n’a pas forcément besoin d’un régime d’exception pour lutter contre ce fléau.

Le Pays

RDC : selon Ban Ki-moon, la brigade d'intervention de l'ONU sera sur pied dans "un à deux mois"

23/05/2013


Ban Ki-moon a entamé le 22 mai à Kinshasa une tournée dans les Grands lacs. © AFP

La brigade d'intervention de l'ONU chargée de combattre les groupes armés dans l'est de la RDC sera prête d'ici "un à deux mois", a annoncé, le 23 mai, à Goma, le secrétaire général, Ban Ki-moon, avant de se rendre au Rwanda voisin.

De son côté, Jim Yong Kim, le président de la Banque mondiale, a promis une enveloppe de 1 milliard de dollars pour les pays de la région des Grands lacs.

Le déploiement de la brigade d’intervention sera effectif « d’ici un à deux mois » dans l’est de la RDC. L’annonce a été faite, le 23 mai, par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, lors de son escale à Goma, capitale de la province congolaise instable du Nord-Kivu.

Les premiers éléments de cette force, qui proviendront essentiellement de la Tanzanie, du Malawi et de l’Afrique du Sud, ont commencé à arriver sur le terrain depuis le 13 mai.

Avec la reprise des combats, le 20 mai, entre les rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23) et l’armée congolaise, Ban Ki-moon a souhaité que le processus du déploiement de la brigade d’intervention s’accélère pour que ses 3 000 hommes soient « pleinement à pied d’œuvre le plus tôt possible ».

"Non à Kampala"

À Goma, le secrétaire général de l’ONU a également visité l'hôpital Heal Africa, qui prend notamment en charge les victimes de violences sexuelles. Sur place, Ban Ki-moon s’est retrouvée face à une petite manifestation de femmes qui voulaient lui faire passer quelques messages.

Sur leurs pancartes, on pouvait lire : « Non à Kampala », « Refusons toutes négociations » et « Négociations jusqu'à quand ? » - des références aux pourparlers difficiles dans la capitale ougandaise entre gouvernement congolais et le M23.

Pour Joanna Trevor, « la brigade d'intervention pourra apporter une certaine sécurité, mais elle seule ne va pas résoudre les causes réelles de la violence en RDC ».

Dans un communiqué publié le 23 mai, la directrice associée en RDC de la confédération d'organisations Oxfam explique qu’il faut aussi investir dans des forces de sécurité « fortes et fiables », un pouvoir « au service du peuple » et un système judiciaire obligeant ceux qui violent les droits de l'Homme à en rendre compte.

Accord-cadre

Après l’étape de Goma, Ban Ki-moon s’est rendu à Kigali pour discuter avec les autorités rwandaises de la mise en œuvre de l’accord-cadre d’Addis-Abeba. Il est accompagné de Mary Robinson, envoyée spéciale de l'ONU dans les Grands-Lacs, d'Hervé Ladsous, chargé des opérations de maintien de la paix à l'ONU, et du président de la Banque Mondiale, Jim Yong Kim qui a annoncé, le 22 mai à Kinshasa, une aide d'un milliard de dollars pour les pays des Grands-Lacs, dont la RDC, destinée à des projets liés à l'énergie, l'agriculture, le commerce transfrontalier, la santé et l'emploi.

À Kigali, le secrétaire général de l’ONU a notamment visité un village accueillant une trentaine d'anciens combattants, blessés de guerre, et leurs familles, issus de divers camps s'étant affrontés au Rwanda : ex-Forces armées rwandaise (FAR) du régime hutu d'avant 1994, Front patriotique rwandais (FPR), l'ex-rébellion de Paul Kagamé l'ayant renversé, et Front démocratique de libération du Rwanda (FDLR), groupe armé hostile au régime Kagamé toujours actif dans l'est de la RDC.

(Avec AFP)

A Goma, en RDC, "on se prépare au pire"

Après plusieurs mois de trêve, les combats ont repris entre l'armée congolaise et les rebelles du M23, provoquant la fuite de milliers de personnes.

Depuis lundi 20 mai, et après plusieurs mois de trêve, les combats ont repris entre l'armée congolaise et les rebelles du M23 dans la zone de Mutaho, à une dizaine de kilomètres au nord de Goma, une ville proche de la frontière rwandaise. 

Les deux camps s'accusent mutuellement d'avoir relancé les hostilités. En novembre 2012, les hommes du M23 avaient mis en déroute la garnison gouvernementale et s'étaient brièvement emparés de Goma, malgré la présence de milliers de casques bleus de la Mission de l'ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco). 

Depuis, les pourparlers de paix engagés en Ouganda entre le gouvernement de Kinshasa et les insurgés marquent le pas.

Plus de 30 000 personnes ont fui depuis lundi le camp de déplacés de Mugunga, a indiqué le Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR). Thierry Goffeau, chef de mission de Médecins sans frontières (MSF) au Nord-Kivu, qui est présent sur le camp de Mugunga, revient sur la situation à Goma.

Que se passe-t-il actuellement à Goma ?

L'annonce du déploiement de la nouvelle brigade d'intervention de la Monusco, composée de 3 000 soldats sud-africains, tanzaniens et malawites, ainsi que de la venue à Goma du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, ont déclenché ou accéléré la reprise des combats. Ils ont repris lundi avec des tirs d'artillerie.

Certains tirs sont passés au-dessus des camps. Des obus sont tombés à côté du camp de Mugunga III et l'un d'entre eux à l'intérieur, faisant des blessés graves. La population a commencé à fuir les camps, notamment celui de Mugunga III où nous avons nos activités, dans la nuit de mardi à mercredi.

Des salves d'obus ont touché la ville de Goma, à Ndosho, à nouveau mercredi matin, faisant au moins quatre morts et dix-sept blessés. Mercredi, des gens quittaient encore le camp. Le calme est revenu depuis, des déplacés rentrent au camp et nos activités ont repris. Toutefois, les combats pourraient reprendre après le départ de Ban Ki-moon de Goma.

Quelle est la situation humanitaire dans les camps de réfugiés de Goma ?

La situation humanitaire était stable dans cette zone depuis décembre. Les camps n'avaient été ni ciblés ni attaqués depuis janvier. Il reste dans le camp de Mugunga III, seul camp officiel, 17 000 personnes.

Environ 70 000 déplacés vivent sur d'autres sites à Goma. Ces populations, déplacées à la suite de la rébellion lancée en juillet par le M23, mais également du fait des combats importants qui se livrent entre milices dans certaines régions, ne peuvent pas rentrer chez elles.

Certaines vivent dans des conditions difficiles depuis un an déjà, même si il l'ensemble des organisations non gouvernementales du monde sont présentes à Goma. MSF, pour sa part, offre depuis fin novembre à ces populations tout le panel habituel de soins, avec une attention particulière aux problèmes de malnutrition et de violences sexuelles.

Certains camps ont été à moitié vidés lors de la reprise des combats. Les déplacés n'ayant pas d'endroit où aller, ils se sont réfugiés à Goma, à Saké et dans les environs. Il y a un véritable problème de précarité et de fragilité pour ces déplacés car, à la moindre reprise des combats, les personnes recommencent à bouger et se retrouvent sans aide.

On cherche donc à identifier d'autres endroits où les déplacés pourront aller.

Espérez-vous une amélioration de la situation avec le déploiement de la brigade d'intervention de la Monusco, chargée de neutraliser les groupes armés qui sévissent dans l'est de la RDC ?

C'est difficile à dire. On se prépare au pire car la brigade a un mandat offensif, ce qui peut donner lieu à de nouveaux combats et donc à encore plus de déplacés, de morts. On espère quand même que son déploiement aura un effet dissuasif.

Mais la guerre au Nord-Kivu dure depuis une vingtaine d'années, alors on ne peut pas espérer que cela se règle en deux coups de baguette avec une brigade de 3 000 hommes.