jeudi 17 avril 2014

Interrogations après la mort d’un chef rebelle dans l’est de la RDC

le mercredi 16 avril 2014


© AFP/Pius Utomi Ekpei

« Après sa reddition, le chef milicien des Maï-Maï Simba, Morgan, tué », s’exclame en Une Le Potentiel à Kinshasa. 

Le Potentiel qui relate la version officielle : « Paul Salada dit Morgan s’était rendu samedi dernier aux FARDC, (aux forces armées de la RDC) avec quarante-deux de ses combattants et leurs armes. 

Son transfert à Bunia, avec tous ses hommes, devait être effectué lundi dans la matinée. » Or, « selon le commandant des FARDC en Ituri, le général Fal Sikabwe, les militaires ont rencontré une résistance de la part de Morgan qui aurait refusé de rejoindre son lieu de transfert. Il ne voulait plus poursuivre le voyage et exigeait d’être décoré général avant de poursuivre le processus de sa reddition. 

Le Général Fal Sikabwe affirme que ce sont des hommes de Morgan qui ont alors ouvert le feu contre les forces loyalistes. » Grièvement blessé au cours de la fusillade et inconscient, le chef milicien serait ensuite décédé dans un hélicoptère du corps médical du contingent marocain de la Monusco.

Elimination d’un témoin gênant ?

Tout cela « ne tient pas debout ! », affirme pour sa part le site d’information Kongo Times : « Même un gamin de 5 ans ne croirait jamais à cette version. Comment expliquer qu’un homme, qui s’est rendu de son propre gré, qui a été ensuite désarmé selon les usages militaires, va prendre la décision suicidaire de s’attaquer à ces militaires pour s’enfuir ? Trop de zones d’ombres ! »

Pour Kongo Times, Morgan aurait donc été abattu délibérément… 

Le site d’information défend deux hypothèses : « la première est que le gouvernement congolais aurait éliminé un ami-témoin qui devenait encombrant et gênant. Morgan, le seigneur de l’Ituri avait été l’homme des missions des plusieurs salons VIP à Kinshasa, Kampala et en Occident. Il était spécialisé dans des attaques de mines d’or. En se rendant, ses amis mafieux craignaient que Morgan dise des choses embarrassantes. »

Autre hypothèse, toujours selon Kongo Times : « la mort de Paul Salada et ses hommes pourrait être un dernier message envoyé par des militaires au pouvoir, à tous ces politiciens qui veulent amnistier, réintégrer des criminels dans l’armée. » 

En effet, précise le site, les FARDC sont aujourd’hui constituées des « enfants des 8 millions de congolais massacrés injustement sous le regard silencieux de la communauté internationale. Et les barbaries des chefs de guerre sont restées gravées dans les mémoires des militaires congolais. »

Pour le site d’information de Jeune Afrique, les circonstances de la mort de Morgan restent en tout cas « très floues ». En effet, on ne sait pas sous quelles conditions le chef rebelle s’est rendu et pourquoi ses hommes ont été autorisés à garder leurs armes. 

D’ailleurs, on ignore le sort de ces derniers qui étaient au nombre de 42. Les FARDC annoncent la mort de 7 d’entre eux et la capture d’une trentaine. Autant d’informations invérifiables…

Un trouble dans les eaux déjà assez boueuses du Congo…

L’Observateur Paalga au Burkina fait part également de ses interrogations… « Etonnant que le chef de la milice Maï-Maï, qui a décidé de se rendre, armes, bagages et hommes compris, se soit mis subitement, en cours de route, à prendre la fuite, sachant qu’en pareille situation, l’occasion est toute trouvée pour lui faire la peau. 

Du reste, relève encore le quotidien burkinabé, les tentatives de fuite et d’évasion ont toujours été les assaisonnements proposés par les exécutants pour faire avaler des couleuvres à l’opinion. 

La mort de Paul Salada survient quelques mois après l’étincelante victoire des forces armées de la RDC à l’est du pays sur les rebelles du M23 et quelques jours après le début d’un processus enclenché par les thuriféraires du régime congolais qui sont déjà en croisade pour un 3e mandat à Joseph Kabila. 

Certes, conclut L’Observateur Paalga, les circonstances de cette mort ne sont pas établies, mais il n’en demeure pas moins que cette disparition jette un trouble dans les eaux déjà assez boueuses du Congo. »

« Que cache donc cette mort du chef rebelle et de certains de ses partisans ? Assassinat d’un témoin gênant ? », s’interroge également Le Pays au Burkina. 

« La reddition du rebelle Morgan n’aura donc pas suffi. Il fallait qu’il meure. (…) Kabila, qui semble avoir le vent en poupe, ne va pas jouer à l’enfant de chœur. » 

Et Le Pays de conclure : « tripatouillage constitutionnel et crimes de sang sur fond de rivalités personnelles et de convoitises étrangères minent la vie en RDC. 

A l’heure où d’autres luttent pour affirmer leur leadership sur le continent, ce grand pays francophone d’Afrique centrale continue de traîner les pieds. Seul maître à bord depuis de nombreuses années, Joseph Kabila se veut serein. Imperturbable, il navigue, bravant toutes les intempéries. Roi du Congo, il semble bien rêver de le devenir un jour. »
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Frédéric Couteau

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