mardi 27 mai 2014

RDC/Congo-Brazzaville : La frontière de la honte

mardi 27 mai 2014




Le Congo Brazzaville et la République démocratique du Congo (RDC) ; voilà deux pays de l’Afrique centrale liés par l’histoire et la géographie qui, malheureusement, continuent de souffrir des affres de la colonisation, plus de 50 ans après leur indépendance. 

D’abord par l’histoire, parce qu’à Brazza comme à Kinshasa, on y trouve le même peuple : les Pygmées et les Bantous, avec pour langue véhiculaire le Lingala. Inutile donc de dire que la langue étant un instrument de cohésion et d’unité, ceux qui la partagent ont généralement la même culture.

Pour rallier aujourd’hui les deux rives du Zaïre, il faut avoir un visa

Ensuite, par la géographie parce chevauchant l’Equateur, le Congo Brazza et la RDC sont en grande partie recouverts de forêt dense. Le secteur agricole y est surtout vivrier avec le manioc comme base de l’alimentation. 

Et, cerise sur le gâteau, c’est que les deux pays ne sont séparés que par le fleuve Zaïre, d’où l’appellation Congo Zaïre pour désigner la RDC d’aujourd’hui. 

En un mot comme en mille, la RDC et le Congo Brazza, n’eussent été les effets de la colonisation, étaient considérés comme un même pays pour ne pas dire un même empire. 

Hélas ! On est encore loin de ce sentiment d’appartenance nationale que devaient cultiver les Congolais, qu’ils viennent de Brazza ou de Kinshasa. 

Car, pour rallier aujourd’hui les deux rives du Zaïre, c’est-à-dire pour aller de Kinshasa à Brazzaville, il faut avoir une autorisation de séjour que l’on appelle couramment un visa. 

Sans ce précieux sésame, impossible pour un Kinois (habitant de Kinshasa) de s’établir à Brazza ou à Pointe-Noire. La preuve est là, encore palpable. 

Près de 3 000 ressortissants du Congo Kinshasa ont été expulsés de Brazzaville et sont encore bloqués dans le camp de Maluku en attendant d’être rapatriés chez eux, dans le Bas-Congo. 

Et comme pour ne rien arranger, le gouvernement du président Sassou N’Guessou annonce que suivront d’autres expulsions dans les jours à venir. 

Que se passe-t-il donc pour que des peuples de pays frères en viennent à se rejeter ainsi ?

L’intégration sous- régionale, tant prônée par l’Union africaine, devrait d’abord commencer en famille avant de s’étendre aux voisins.

Que n’a-t-on pas dit sur l’Europe qui n’a de cesse de ramener manu militari des Africains dans leurs pays respectifs ?

N’était-ce pas déjà assez pour ne pas dire aberrant d’avoir institué un laisser-passer pour quiconque des deux pays voudrait aller d’une rive à l’autre ? 

En fait, ce qui se passe aujourd’hui entre les deux Congo rappelle la haine xénophobique dont ont été victimes les Burkinabè en Côte d’Ivoire au temps où le boulanger Laurent Gbagbo soufflait le chaud et le froid. 

On se rappelle qu’excédé outre mesure, le président sénégalais d’alors, Abdoulaye Wade, connu pour n’avoir pas sa langue dans sa poche, avait provoqué un tollé en dénonçant publiquement le traitement inhumain que des Africains vivent sur des sols africains. 

Que n’a-t-on pas dit sur l’Europe qui, dans sa politique de lutte contre l’immigration clandestine, n’a de cesse de ramener manu militari des Africains, par vols entiers, dans leurs pays respectifs ? 

A vrai dire, on a l’impression que le président Sassou, conscient de l’image que son peuple a du « Zaïrois », a décidé d’agir ainsi dans le but de s’attirer la sympathie de l’opinion nationale. 

Et comme s’il n’attendait que ça, le président Joseph Kabila a ameuté toute la nation autour de ces expulsions. Des points d’eau, des dispensaires, des distributions de riz, de sardines et de pain, tout a été mis en place pour accueillir les rapatriés. 

Et comme, généralement, les peuples se montrent solidaires de leurs dirigeants dans de pareilles situations, il y a fort à parier que Kabila en tirera des dividendes politiques. Tout comme Sassou NGuesso. 

Du reste, l’un et l’autre ont l’intention de tripatouiller leur charte fondamentale pour se maintenir au pouvoir.
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Boundi OUOBA
Le pays

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