samedi 16 août 2014

Qui sont-ils, ces vieux démons qui entretiennent l’enfer en RDC ?

le 15 août 2014



La misère dans laquelle pataugent les populations congolaises depuis l’accession de la République démocratique du Congo (RDC) à l’indépendance le 30 juin 1960 reste un paradoxe pour de nombreux spécialistes, au vu des potentialités que regorge ce pays.

Tout y est grand : des forêts immenses, de vastes étendues de terres cultivables, un incroyable entrelacement de rivières. Quant au sous-sol, il regorge de minerais à nourrir d’envie de nombreuses nations.

Pourtant, en dépit de toutes ces richesses, la RDC reste l’un des pays les plus pauvres du monde. C’est un pays qui n’a jamais décollé économiquement depuis 54 ans. Qui sont-ils donc, ces vieux démons qui entretiennent l’enfer en République démocratique du Congo?

Descente aux enfers

La descente aux enfers de la RDC commença dès les premiers jours de son indépendance avec deux événements majeurs : la mutinerie de la Force publique dont les soldats manifestèrent leur mécontentement, dès le 5 juillet, face à leur hiérarchie belge qui tenait à se maintenir à la tête de l’armée.

Ensuite, ce fut la sécession de la province minière du Katanga dont la déclaration de l’indépendance par Moïse Tshombé, le 11 juillet, surprit plus d’un Congolais.

Ces deux événements suffirent à eux seuls à compromettre l’avenir du Congo qui dut très tôt faire face à une grave crise de plusieurs ordres (politique, sécuritaire et économique) dont les conséquences se firent sentir pendant plusieurs années.

Ainsi, débuta le désamour entre les populations congolaises et leurs politiques qui furent qualifiés de menteurs, parce qu’ils n’avaient point respecté leurs multiples promesses d’une vie meilleure après l’indépendance.

Du côté des Belges restés au Congo après la panique provoquée par la mutinerie de la Force publique, ils savaient à présent qu’ils devaient se mettre sur leur garde pour préserver leurs intérêts, d’autant plus qu’ils contrôlaient l’ensemble des secteurs de l’économie congolaise.

Quant aux nouveaux politiciens congolais, ils durent apprendre à leurs dépens qu’il leur fallait négocier pour sauver leur pays de la désintégration, car d’autres menaces grondaient à côté de la sécession katangaise qui dura jusqu’en 1963.

Ce furent la sécession du Sud-Kasaï qui prit fin en 1962 et la rébellion lumumbiste qui eut, en deux ans (1963-1964), de graves conséquences sur l’économie congolaise et sur la vie des populations : plus de 500.000 tués en deux ans.

Pour remettre leur pays sur les rails, les politiciens congolais eurent recours à l’ONU dont les troupes mirent fin à la sécession katangaise et, plus tard, aux troupes américaines et belges, sans oublier les gendarmes katangais de Moïse Tshombé secondés par des mercenaires. 

Ces derniers eurent pour mission d’anéantir la rébellion de Mulele, de Gbenye et de Soumialot qui avaient pris pied dans plusieurs provinces du Congo.

Le Congo face aux ambitions des hommes politiques

La nomination de Moïse Tshombé comme Premier ministre en 1964 scella la réconciliation entre des politiciens qui s’étaient opposés depuis 1960, et qui avaient enfin compris qu’ils étaient obligés de s’entendre pour sauver leur pays menacé de partition.

Et les résultats de cette entente ne manquèrent pas de se manifester, puisque Moïse Tshombé réussit, en un an seulement à la tête du gouvernement d’union nationale, à vaincre les insurgés lumumbistes et à mettre l’économie congolaise sur les rails.

Sur le plan politique, le nouveau Premier ministre réussit à organiser des élections législatives incontestables qui consacrèrent la victoire de la Convention nationale congolaise (CONACO), son parti face au Rassemblement démocratique congolais (RADECO) de Cyrille Adoula, proche du président Kasa-Vubu.

Le bilan de l’ancien sécessionniste à la tête du gouvernement central fut tellement positif que celui-ci n’aurait dû que gagner l’élection présidentielle de janvier 1966.

Mais, ce fut sans compter sur le jeu sournois des politiques, notamment sur les ambitions de Kasa-Vubu, le président en exercice, qui tenait à se succéder à lui-même à la tête du pays.

Au lieu de nommer Tshombé formateur du gouvernement (puisqu’il avait gagné les élections), Kasa-Vubu choisit Evariste Kimba, un autre Katangais, mais qui, hélas ! n’eut jamais l’investiture du parlement pour devenir Premier ministre.

Et c’est sur cet imbroglio politique que surfa Joseph-Désiré Mobutu pour faire son coup d’Etat en novembre 1965, sous prétexte qu’il voulait sauver le Congo d’un nouveau désastre dû à des luttes fratricides entre politiciens.

Pourtant, à y voir de près, le jeu politique de l’époque allait en s’apaisant, du fait de la présence de deux forces politiques réelles constituées en cartels (CONACO et RADECO), loin des 44 partis avancés par Mobutu pour justifier son coup d’Etat.

On eut même l’impression que les politiques congolais, qui se connaissaient à peine, se fréquentaient de plus en plus, au point de s’enrôler dans des partis politiques qui correspondaient plus à leurs convictions qu’en fonction de leur appartenance tribale.

Aussi, ce coup de force du futur dictateur avait-il semblé mettre fin à une expérience démocratique unique qui aurait sans doute beaucoup apporté à la RDC.

Et Mobutu, lui-même, n’avait-il pas organisé son coup d’Etat de 1965 dans le seul but d’échapper lui-même à sa propre éviction au cas où Moïse Tshombé serait devenu président du Congo en janvier 1966 ?

Quand l’ambition personnelle se transforme en jeu de sape

Devenu deuxième président de la République du Congo-Kinshasa, Mobutu avait orienté son programme politique en poursuivant l’action entamée par Moïse Tshombe qui avait combattu les forces négatives des années 1963-1964 et mis l’économie congolaise sur les rails.

Par son dynamisme et son volontarisme, le nouveau pouvoir de Kinshasa fut fortement soutenu, à ses débuts, par une population enthousiaste. 

Mais, cette complicité ne fut point de longue durée, car les Congolais se sentirent vite trahis par une classe politique égoïste, qui ne se souciait que de ses propres intérêts, contrairement aux slogans égrenés à l’époque.

Avec la création du Mouvement populaire de la révolution (MPR), le parti unique, et la zaïrianisation imposée comme modèle de gestion des affaires, Mobutu finit par être considéré comme l’homme qui ne travaillait que pour un groupe de Congolais, n’hésitant pas à saper tout le socle de l’économie congolaise dans seul but de satisfaire son clan.

Devenu Maréchal, il ne dut quitter le pouvoir que par la force en 1996, comme lui-même l’avait fait en 1965. Ses programmes politiques et économiques, à l’exemple du slogan « Objectif 80 », ne furent que de vains mots qui n’apportèrent rien à la RDC.

Son obstination à rester au pouvoir à tout prix par ambition s’était transformée en drame pour la RDC. Mobutu avait tout perdu tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays pour ne devenir qu’un paria. Il avait, entre-temps, passé 31 ans à la tête de la RDC.

Servir son pays : une noble ambition

L’ambition personnelle ne serait-elle pas l’un de ces vieux démons qui entretiennent l’enfer en RDC ?

Aujourd’hui, deux ans avant l’élection présidentielle qui doit intervenir en 2016, nous trouvons normal que des ambitions se manifestent. Car, comme on dit : « le pouvoir ne se donne pas, on le prend par le jeu démocratique ou par la force ».

Et nous aimerions qu’elle le soit par le jeu démocratique, et donc par les urnes après une lutte loyale entre personnalités à travers leurs partis politiques.

Nous aimerions surtout que ces ambitions servent à reconstruire le pays et non à le détruire. 
 
Puisse donc la succincte historique des deux premières Républiques du Congo-Kinshasa (de 1960 à 1996), résumée ci-dessus, servir de leçon afin que certaines erreurs du passé ne se répètent plus demain. Les refaire serait fatal à la RDC qui doit se relever après quatre décennies de léthargie.

Certes, des signes de redressement de l’économie congolaise se manifestent depuis deux ans dans de nombreux domaines. 

Mais, les responsables politiques de la RDC ne doivent surtout pas se tromper de diagnostic : « Ils doivent savoir que la RDC n’est pas encore stabilisée pour pouvoir se débrouiller seule ».

Elle ne l’est ni politiquement, ni militairement, ni économiquement, et encore moins socialement. Elle a encore besoin de tous ses amis dans la quête de la paix, de son équilibre, de sa croissance et de son développement.

Vouloir se passer des conseils extérieurs, comme l’ont clamé certains, est une grave erreur, voire un suicide pour la RDC.

Il faut savoir écouter tout le monde, même les plus humbles des Congolais qui souffrent depuis des décennies et qui aimeraient s’en sortir pour enfin pouvoir vivre tranquilles dans la satisfaction de leurs besoins élémentaires, tels que se nourrir, se soigner, se loger.

Parce que les mois à venir sont essentiels pour le devenir de la RDC, il est impératif de réussir toutes les échéances électorales annoncées en songeant aux seuls intérêts de la RDC et de son peuple.
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Duma di Bula
Le Potentiel

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