samedi 6 décembre 2014

Rapport de HRW sur l’opération "Likofi": Mende renoue avec l’"agitation-propagande"


Lambert Mende Omalanga. Photo d’archives

Politicien sans foi ni loi, Lambert Mende Omalanga, ministre des Médias et porte-parole du gouvernement, n’est jamais à court d’idées. Sentant l’étau se resserrer autour de "Joseph Kabila" suite à la publication du rapport accablant de l’Ong Human Right Watch sur le massacre des Kulunas par des policiers, Mende, en agitateur-propagandiste, est prêt à tout. Y compris à "adorer" aujourd’hui ce qu’il avait immolé hier. 

Vingt-quatre ans après, "Lambert" avoue que le "massacre des étudiants de l’université de Lubumbashi" n’était qu’une manipulation à l’image du rapport de HRW. 

L’homme a fait organiser, mardi 2 décembre, une "marche de protestation" contre cette Ong américaine. Une démarche aux allures de chant de cygne.

Sous la pompeuse dénomination "La Dynamique pour la lutte contre la pensée néocoloniale", une association inconnue jusque là, a organisé, mardi 2 décembre, dans quelques rues de la commune kinoise de la Gombe, une marche dite de "protestation". 

Objectif : dénoncer le rapport publié le 18 novembre dernier par l’organisation non gouvernementale américaine Human Right Watch sur l’opération "Likofi".

Dans ce document, appuyé par des témoignages tant des familles des victimes que des policiers et des témoins des rafles, Human Right Watch accuse des policiers kinois d’avoir commis des crimes dans le cadre de la lutte contre la criminalité à Kinshasa. 

Réputée pour la rigueur de ses investigations, cette organisation fait état de 51 personnes exécutées sommairement et 33 disparitions.

Dans ce Congo démocratique où seuls les partisans de "Joseph Kabila" ont le droit d’exprimer leurs opinions sur la voie publique sans subir la brutalité policière, les observateurs ont vite compris que les organisateurs devaient appartenir à la "noblesse d’Etat". Autrement dit, la "majorité présidentielle". 

A preuve, des marcheurs portaient des T-shirts assortis du logo de certains "partis" de la mouvance kabiliste. C’est le cas notamment de la "Convention Congolais Unis" (CCU) de l’inénarrable Lambert Mende Omalanga. 

Le CCU est un de ces parti-directoires kinois dont les membres peuvent tenir dans une cabine téléphonique.

Le "fusible du raïs"

Que veulent les protestataires? On apprenait qu’ils "luttent" contre "la pensée néocoloniale". Dans un mémorandum, les "marcheurs" disent déplorer "la tendance de Human Right Watch à discréditer les forces congolaises de défense et de sécurité".

Depuis la publication de ce brulôt, les "super faucons" de la "Kabilie" peinent manifestement à retrouver le "sommeil du juste". Et pour cause, l’ordre de traquer les Kuluna avait été donné par le "raïs". En personne. 

Un ordre exécuté sans doute avec zèle par le général célestin Kanyama. Lambert Mende et son collègue en charge de l’Intérieur Richard Muyej paraissent décidés à multiplier des "tirs de barrage" sur les lignes de HRW. 

Cette Ong exige la suspension de cet officier. Un officier réputé pour son mépris de la vie et de la dignité de la personne humaine. Human Right Watch demande également l’ouverture d’une enquête indépendante. En fait, Kanyama est censé servir de "fusible" au "raïs".

Le rapport de HRW a fait perdre la tête à Mende. Celui-ci fait désormais feu de tout bois. L’homme ne réfléchit plus. Il dit ce qui lui passe par la tête. 

L’objectif tient en quelques mots : il faut sauver "Joseph Kabila". Peu importe qu’il faille "adorer" ce qu’on avait immolé hier.

Le "massacre" des étudiants de Lubumbashi

Au cours d’un point de presse qu’il a animé le lundi 24 novembre dernier, le ministre Mende n’a pas manqué de faire "sensation" avec son cynisme inimitable quand il lance : "(...). Deuxième exemple. Ici dans notre pays, qui ne connaît pas Louis-Alphonse Koyagialo, un de nos gouverneurs les plus méritants qui allait se faire condamner à mort (dans l’affaire) du massacre des étudiants de Lubumbashi?". 

Mende de clamer sans rire que "c’est encore des organisations non gouvernementales comme Human Right Watch" qui avaient monté de toutes pièces cette affaire. Une affaire qui marque sans conteste le point de départ de la descente aux enfers du Congo-Zaïre.

Dans son monologue, "Lambert" finit par passer aux aveux en rappelant que le premier "bilan" faisait état de "280 étudiants tués". 

"Moi-même, dira-t-il, j’ai relayé cela à Bruxelles. J’étais leader de l’opposition. Deux semaines après, on nous apprend qu’il n’y a eu que soixante morts. C’était ridicule! Après, non, non, il n’y avait qu’un seul étudiant tué". C’était d’ailleurs la thèse officielle. 

Mende d’adopter la posture d’un plaideur : "Ce Monsieur (Ndlr : Koyagialo) a fait la prison. On allait l’exécuter. Et vous voulez que nous continuons (sur cette voie) parce que Human Right Watch a dit et nous chassons le général Kanyama...".

Vingt-quatre ans après le "massacre" des étudiants de Lubumbashi "survenu" dans la nuit du 11 au 12 mai 1990, l’ex-opposant Lambert Mende Omalanga - qui fournissait à la presse des informations imaginaires - avoue (enfin) qu’il a participé à une opération de déstabilisation de son pays. 

On a affaire avec un politicien sans foi ni loi, prêt à enjamber des cadavres pour accéder au pouvoir. Et pour le conserver.

Dans cette "affaire Lubumbashi", des familles ont perdu des êtres chers, accusés faussement. Des êtres chers rongés par le sentiment d’injustice. 

Pire, cette affaire a fragilisé le socle de l’Etat zaïro-congolais. Un Etat devenu, depuis, une sorte d’"idiot du village Afrique centrale". Les conséquences désastreuses se font encore ressentir à ce jour.

Dans son ouvrage "Le dinosaure", publié chez Fayard, la journaliste Colette Braeckman parle de "347 tués". Quid des cadavres? "Les corps ont été dissous dans l’acide sulfurique à la Gécamines; d’autres ont été jetés dans la forêt à partir d’un avion". 

Pourquoi les parents ne se manifestent-ils pas? "Ils ont été corrompus pour ne pas organiser des veillées mortuaires". Ouf!

La "marche de protestation" organisée par Mende - avec le concours des "services d’études stratégiques" de la Présidence de la République contre le rapport de HRW - n’est que de l’"agit-prop" aux allures de chant de cygne...
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Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

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