vendredi 8 mai 2015

Burundi : un complot révélé à l’Onu

le jeudi 07 mai 2015 

 

Exclusif

"La Libre Belgique” a été contactée par Me Bernard Maingain, avocat belge travaillant depuis de nombreuses années sur des dossiers politiques et économiques dans les Grands Lacs. Il nous a indiqué avoir aidé la société civile burundaise à exfiltrer deux collaborateurs du général Adolphe Nshimirimana, bras droit du président burundais Pierre Nkurunziza et ancien chef des services de renseignements, aujourd’hui “chargé de mission” à la Présidence.

Ces deux témoins ont fait des déclarations sur les préparatifs criminels du régime burundais, qui sont aujourd’hui entre les mains du Conseil de sécurité de l’Onu. Distribution d’armes

“J’ai été contacté par la société civile burundaise il y a un mois, pour rencontrer un collaborateur du général Adolphe Nshimirimana. Il m’a raconté comment ce dernier avait acheté des armes pour les distribuer sur les collines. Il m’a aussi parlé de l’opération Kiribat, qui consistait à envoyer des Imbonerakure (milice pro-Nkurunziza) s’entraîner en RDC, en vue de préparer une déstabilisation régionale”, nous explique Me Maingain. “J’ai transmis ce témoignage au Conseil de sécurité de l’Onu, tandis que le témoin regagnait le Burundi.”

“Il est revenu me voir plus tard avec un de ses supérieurs hiérarchiques, en me demandant si je pouvais les mettre en sécurité. J’ai pu trouver un financement, de faux papiers et un endroit où les cacher et je les ai retrouvés quelque part en Afrique.”

Le second témoin est au cœur de l’appareil de sécurité du général Adolphe Nshimirimana, indique l’avocat belge. 


“Il m’a expliqué comment l’opération Kiribat comptait ethniciser les relations conflictuelles existant au Burundi”, conflit notamment lié à la volonté du président Nkurunziza de se maintenir au pouvoir alors que l’Accord de paix d’Arusha, qui avait mis fin à la guerre civile Hutus-Tutsis (1993-2005), l’interdit. 

“Il s’agissait notamment de créer de fausses rébellions. Il m’a donné les noms des personnes impliquées.” Faux rebelles

En décembre 2014, un mystérieux groupe de rebelles burundais, venu du Congo, avait été attaqué par l’armée burundaise alors qu’il venait d’entrer sur son territoire. On avait déploré une centaine de morts, dont une partie avait été exécutée sommairement par des Imbonerakure, selon des associations de défense des droits de l’homme. 


Selon les informations recueillies à Bujumbura par “La Libre Belgique”, l’opération militaire contre ce groupe rebelle – constitué de chômeurs à peine formés militairement au Congo – avait, de manière anormale, été commandée seulement par des officiers hutus.

Les deux témoins cités par Me Maingain ont également détaillé les responsabilités du régime dans l’assassinat de trois religieuses italiennes à Bujumbura, en septembre dernier ; elles étaient trop bien informées de ce qui se passait à la frontière congolaise.

“Les deux témoins ont aussi révélé un plan d’élimination ciblée des opposants. Ils ont donné, pour chaque province, les noms des responsables de la gestion des armes et les circuits de distribution, avec les numéros de plaques minéralogiques des véhicules utilisés et les lieux de stockage des armes”, poursuit Me Maingain.

Selon ce dernier, les deux témoins ont dénoncé la présence d’Interahamwés – miliciens génocidaires rwandais qui continuent à semer la terreur à l’est du Congo, où ils sont réfugiés – au service de la Présidence burundaise et du parti au pouvoir, le CNDD-FDD.

“J’ai aussi reçu une liste des chefs de la milice burundaise Imbonerakure, avec copie de leurs cartes d’identité.”

Tous ces documents sont envoyés au Conseil de sécurité de l’Onu, indique l’avocat, qui ajoute que les deux témoins sont “prêts à collaborer à une enquête internationale sérieuse sur ce qui se passe au Burundi”.

Eglise, pays voisins et Onu tentent de forcer le dialogue pour trouver une issue à la crise

L’Eglise du Burundi a rendu publique, mercredi, la position des évêques face à la crise politique qui a déjà fait “plus de 35 000 réfugiés” dans les pays voisins, selon les Nations unies.

Les prélats, soulignant la gravité de la situation, appellent les dirigeants politiques à emprunter la voie du dialogue et de la concertation. 


Au menu des discussions, doivent figurer, selon l’Eglise, les questions suivantes : comment ramener la sécurité dans le pays, à la veille des législatives et communales (26 mai) et de la présidentielle (26 juin) ; comment faire en sorte que toutes les forces rejoignent la voie électorale, alors que la crédibilité des scrutins est déjà mise en doute ; comment favoriser des élections crédibles. Le principal rival de M. Nkurunziza, Agathon Rwasa, a appelé pour sa part à un report des scrutins.

On a appris mercredi que des discussions informelles avaient été ouvertes mardi soir sous l’égide de la Mission électorale de l’Onu. Il semblerait cependant que les autorités burundaises refusent de discuter du troisième mandat du président Nkurunziza, auquel s’opposent de nombreux manifestants et secteurs de la nation. 


Mercredi, les ministres des Affaires étrangères du Rwanda, de Tanzanie, du Kenya et d’Ouganda – les partenaires du Burundi au sein de l’“East African Community” – sont arrivés à Bujumbura. 
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