mercredi 9 septembre 2015

Provinces : « Kabila » teste la capacité d’indignation des Congolais


"Joseph Kabila" et son homologue burundais Pierre Nkurunziza...

La déclaration faite, jeudi 3 septembre, par le Premier ministre Augustin Matata Ponyo selon laquelle "le gouvernement n’a pas d’argent pour organiser l’élection des gouverneurs et des vice-gouverneurs" est perçu par des observateurs comme un test. 


Pour eux, le duo «Kabila»-Matata veut jauger la capacité d’indignation du peuple congolais. Selon des sources bien informées, le coût de ce scrutin au suffrage universel indirect est estimé à 2,1 millions de dollars (deux millions, cent mille dollars). Le «Grand Congo» n’a pas cette insignifiante somme ?

«La déclaration du Premier ministre Augustin Matata Ponyo selon laquelle il n’y a pas d’argent pour organiser l’élection des gouverneurs et des vice-gouverneurs de nouvelles provinces est non seulement un ballon d’essai pour tester la capacité d’indignation du peuple congolais mais surtout confirme la volonté de Joseph Kabila d’obtenir le glissement du calendrier électoral. Le Congo entre désormais dans la logique burundaise qui consiste à gouverner par défi». 


« En restant muet sur le coût de ces opérations électorales, Matata étale une mauvaise foi indigne d’un homme d’Etat qui doit prêcher par l’honnêteté et l’exemplarité». 

«A partir de quel moment le Premier ministre - qui avait signé précipitamment un décret mettant en place les commissions chargées de l’installation de nouvelles provinces au 30 juin dernier - a-t-il réalisé que le trésor public n’était pas en mesure de financer ces opérations électorales ? Doit-on parler d’irresponsabilité ou de banditisme administratif? » 

Ce sont là les quelques réactions enregistrées à chaud par la rédaction de Congo Indépendant au cours du week-end.

Matata en colère contre la Cour constitutionnelle

A Kinshasa, le député national Martin Fayulu Madidi, président de l’ECIDé (Engagement citoyen pour le développement) a demandé à la Cour constitutionnelle de «reconstituer» les provinces démembrées. 


Pour lui, Premier ministre Matata et le ministre de l’Intérieur doivent, sans d’autre forme de procès, rendre le tablier. 

Les gouverneurs doivent regagner leurs sièges. De même, les assemblées provinciales doivent récupérer leurs députés provinciaux "et que tout le monde continue". «Monsieur le Premier ministre Matata et monsieur le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et Sécurité doivent démissionner », a-t-il asséné.

On en sait un peu plus sur l’atmosphère qui a prévalu lors de la «visite» du «Premier» Matata à la Cour Constitutionnelle. C’était le jeudi 3 septembre.

On rappelle que, le 31 août, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avait saisi cette haute juridiction afin d’obtenir l’interprétation de la loi de programmation relative à l’installation de nouvelles provinces. 


En cause, l’écoulement du délai de 120 jours pour organiser l’élection des gouverneurs et vice-gouverneurs des 21 provinces issues des anciennes régions démembrées. Délai frappé de forclusion.

A en croire une source judiciaire, le vice-président de la CENI, Mpungue Songo, aurait confié aux neuf juges que le coût de ces opérations électorales s’élève à 2,1 millions de dollars US. Et que la CENI disposerait des ressources nécessaires pour supporter cette dépense. 


« Le Premier ministre Matata a blâmé le numéro deux de la CENI en lui interdisant de financer les élections pour les gouvernorats ». L’homme qui parle est un parlementaire étiqueté «majorité présidentielle».

A en croire notre interlocuteur, Matata a tenté en vain de convaincre les juges à la Cour suprême d’autoriser « Joseph Kabila » à procéder à la nomination des 21 chefs des exécutifs provinciaux et leurs adjoints. 


Le deuxième alinéa de l’article 198 de la Constitution stipule que le gouverneur et le vice-gouverneur sont élus par les députés provinciaux. «Joseph Kabila est conscient de son impopularité, dit-il. Il a peur de voir les 21 nouvelles provinces échapper à son contrôle. 

Dans sa stratégie, il compte sur les 21 gouverneurs pour faire triompher l’idée d’un référendum constitutionnel. L’objectif est d’instaurer le scrutin présidentiel au suffrage universel indirect. »

C’est un Augustin Matata en colère qui a regagné, bredouille, la primature le jeudi 3 septembre. Ne sachant ce qu’il allait dire au «raïs» à son retour de Pékin, le «Premier» a présidé une «réunion de crise». 


Selon des sources recoupées, deux personnalités ont participé à cette rencontre. A savoir, le directeur du cabinet présidentiel, Néhémie Wilondja Mwilanya et le secrétaire général du PPRD, Henry Mova Sakanyi. 

«Ces juges ne sont pas avec nous », aurait vociféré Matata devant certains membres de son cabinet. Ajoutant : « S’ils ne sont pas avec nous, ils devront en tirer les conséquences... ».

La « guerre larvée » «Kabila»-Katumbi

Selon un confrère kinois joint au téléphone dimanche soir, «Joseph Kabila» a perdu son self-control depuis que les «Katangais» de la mouvance présidentielle rechignent d’appuyer son idée de faire modifier la Constitution pour qu’il brigue un troisième mandat. 


«Après avoir perdu l’Ouest, le Centre et l’Est, le président Kabila a perdu le Nord avec les tueries à répétition dans le territoire de Beni, dit-il. Désormais, c’est un homme sans fief. Il n’a pas été capable de rassembler son camp avant d’aller à la conquête du reste du pays. L’emprisonnement de Vano Kiboko et de Jean-Claude Muyambo n’arrange pas sa situation ». 

Le confrère de conclure : «Les trois penaltys de Moïse Katumbi l’ont rendu fou. Il n’a jamais été défié à ce point. Kabila est hanté par Katumbi qu’il suspecte d’être derrière chaque coup fourré. Il est convaincu que ‘Moïse’ sera candidat à la présidentielle de 2016. Il voulait neutraliser le gouverneur du Katanga par le démembrement de cette province. C’est un échec.»

Et maintenant ? Toute la question est là. 


Notre source judiciaire de conclure : « Si le peuple congolais ne lançait pas une mise en garde solennelle après les propos du Premier ministre, il ne serait pas surprenant que le même discours soit tenu en ce qui concerne la présidentielle et les législatives. Dans cette hypothèse, l’actuel chef de l’Etat deviendra un verrou à faire sauter pour assurer l’alternance démocratique… » 
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Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

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