Armand Tungulu est décédé en prison, deux jours après son arrestation. Cet homme d’une trentaine d’années, installé à Bruxelles, avait été arrêté mercredi 29 septembre à Kinshasa alors qu’il lançait des pierres sur le cortège du président Kabila. Alors suicide ou assassinat ? Les journaux congolais restent pour le moins prudents et l’affaire est loin de faire la Une dans le pays… « Armand Tungulu : mort confirmée », titre La Prospérité qui rapporte le communiqué officiel selon lequel Tungulu « se serait suicidé dans la nuit du 1er au 2 octobre dans sa cellule. Un tissu servant d’oreiller lui aurait permis de tourner définitivement le dos à la vie sur cette terre des hommes », écrit le journal. «Alors qu’on s’attendait, normalement, à un procès en bonne et due forme, pour en savoir un peu plus sur les vraies motivations de ses faits et gestes, poursuit La Prospérité, l’homme aurait, apparemment, choisi d’emprunter le chemin raccourci.»
« Vous êtes au service d’un assassin ! »
Changement de ton sur le site d’information KongoTimes, site d’opposition installé à l’étranger : « Joseph Kabila déclare la guerre à la diaspora congolaise ! » Pour KongoTimes, « il ne fait plus l’ombre d’un doute qu’Armand Tungulu a bel et bien été assassiné. Et les assassins présumés appartiennent à la garde personnelle du chef de l’Etat », affirme-t-il. Le site d’informations congolais cite des témoins. L’un d’eux rapporte la scène de l’interpellation mercredi après les jets de pierre : « 'vous êtes au service d’un assassin', aurait crié Tungula aux sbires de la Présidence. 'vous servez avec zèle un pouvoir qui maintient vos parents dans la misère…'. C’est à ce moment qu’un élément de la garde dite républicaine, poursuit KongoTimes, lui a assené un coup de crosse à la tête. 'Le Bruxellois a perdu connaissance, il saignait abondamment', raconte le témoin. C’est dans cet état qu’il a été soulevé et 'jeté' dans une Jeep. » D’autres témoins affirment que Tungulu aurait été poignardé. En tout cas, poursuit le site, l’opposant aurait ensuite été torturé et aurait succombé à ses blessures en cellule. «Dimanche soir, la famille Tungulu n’avait toujours pas accès au corps du regretté Armand. Pourquoi ? », s’interroge KongoTimes.
Le précédent Chebeya
Cette affaire a dépassé les frontières de la RDC. « Peut-on croire à la thèse du suicide, dans un pays où les droits de la personne humaine sont en permanence bafoués ? », s’interroge L’Observateur au Burkina. « Rien n’est moins sûr, répond-il, surtout quand on pense à la mort récente du défenseur des droits de l’homme Floribert Chebeya dans les bureaux de la police. Coutumière du fait, poursuit le journal, la République démocratique du Congo 'mange' ses filles et fils qui œuvrent à ce que les valeurs démocratiques tiennent dans le pays : journalistes, responsables de partis politiques, acteurs de la société civile… »
« Pauvre Tungulu ! », s’exclame pour sa part Le Pays, toujours au Burkina. « Il a dû confondre la Belgique, où il a passé une bonne partie de sa vie, avec son Congo natal. (…) Le trentenaire a sans doute oublié que les deux continents, l’Europe et l’Afrique, sont loin l’un de l’autre, non seulement de par le niveau de développement, mais aussi et surtout en matière de droits humains. (…) Tungulu n’a hélas pas compris, poursuit Le Pays, que dans 'les républiques très très démocratiques du Gondwana', expression chère à l’humoriste Mamane, le président est comme un demi-dieu. Dans certains pays, son nom même ne se prononce pas n’importe où, n’importe quand et n’importe comment. »
Armand Tungulu à côté de Mr Yves Leterne, Premier Ministre Belge
Enfin, en marge de ce dossier, nous revenons à la presse congolaise, avec Le Potentiel qui annonce que « le journaliste Tumba Lumembu du journal la Tempête des Tropiques, paraissant à Kinshasa, est porté disparu depuis quelques jours. Ce journaliste serait détenu au bureau de l’ANR (l’Agence nationale de renseignements) pour outrage au chef de l’Etat, précise Le Potentiel. L’ONG Journaliste en Danger, poursuit-il, a souhaité que Tumba Lumembu soit transféré aux institutions juridiques compétentes pour toute infraction qu’il aurait commise. » Source: RFI
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