mardi 12 juillet 2011

Cet exil qui ne finit pas

par Jean Roger Mboyo Ey'ekula, mardi 12 juillet 2011

Etre chez soi, une idée de combat.

Dépité que son exil dure longtemps, un ami, réfugié congolais aux Etats Unis, m’a dit un jour : ''que j'aimerais être au pays !''.  Mais, son souhait, malheureusement, n'est pas réalisable tant que la situation au pays ne change pas. Comme un murmure d'adolescent boudeur, ce souhait emprisonne plus qu'il ne libère. 

Comme cet ami, moi aussi j'aimerais être chez moi. Avec mes enfants et la femme qui occupe mes pensées. Etre chez moi pour vivre comme un maître et non comme un sujet. Moins encore, comme un intrus. Mais, comme mon ami, je ne peux pas. 

Et, malgré cette nostalgie qui me ronge, je dois regarder de loin en espérant que la situation change.

Depuis 1993, mon chemin est celui de l'exil. Une première fois, en 1993, j'ai été contrait de quitter mon pays pour sécuriser ma vie et protéger ma famille. Cela fait 18 ans. 18 ans, surtout pour ma famille que n'est jamais plus répartie au pays.  Mes enfants ne connaissent pas chez eux. 

Moi, par contre, grâce à mon travail de journaliste, j'ai pu revoir, un temps très court, la terre de mes ancêtres en 2007. Une terre qui n’est comparable à nul autre au monde. Oui, les autres m'accueillent, mais elle m'appartient.

En 2007 donc, grâce à Syfia International, une agence de presse basée à Montpellier, j'ai pu revoir mon pays. Mais, le choc a été terrible. Et, la révolte a aussitôt suivi. J'ai été saigné de voir que rien n'avait changé sur les plans des libertés, raison de mon exil. 

Mais, plus, j'ai observé avec horreur comment les occidentaux en se débarrassant de Mobutu, avaient réussi à asseoir un nouvel ordre encore plus abject. Un ordre colonial dont le miroir est une infamante imposture.

J’ai essayé de travailler pour Syfia qui ne traite que l’actualité de proximité, mais le cœur n’était pas à l’ouvrage. J’ai essayé de travailler pour Spore, le magazine spécialisé de l’ACT, agence pour la coopération technique basée à Bruxelles, mais, comme avec Syfia, mon esprit ailleurs. J’ai aussi fait les provinces du pays pour le compte du magazine de la coopération belge. 

Mais, plume voulait absolument se battre ; combattre le monstre hideux qui avait réussi à gangrener mon pays. Je suis donc allé travailler à la rédaction du quotidien. Là,j’ai pu, au moins un laps de temps, me retrouver. Je me suis mis dans le travail de sensibilisation contre les perversions qui souillent ma nation. Là-bas donc, j’ai pu me lancer dans le combat patriotique.

Des articles rédigés en utilisant des pseudos, comme Mamadou Bineta, m’ont permis d’agir contre un système qui tue mon peuple. J’ai été interpellé et détenu pendant plusieurs heures pour avoir dénoncé l’exploitation de pauvres mamans vendeuses de Gambela par un commissaire de police, le capitaine Mbuyi Mukengeshayi. 

Un proche du pouvoir colonial qui faisait fi de la loi. Au sujet de la loi, est-ce qu’elle existe vraiment en République démocratique du Congo ? La réponse sans détour est non. Le Congo de  ‘’Joseph Kabila’’, de son vrai nom Hyppolite Kanambe, est ‘’une vraie jungle’’. Une jungle à l’image des scènes de Jurassic Park : impitoyable et morbide. 

Dès lors, ayant pris la mesure de la situation, je n’ai plus arrêté. Même les conseils de Marie Agnès Leplaideur, directrice exécutive de Syfia pour qui je travaillais alors, n’ont rien fait..J’ai dénoncé les auteurs de l’assassinat de Dan, Vice président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa, un crime imputable à André Kimbuta. 

J’ai dénoncé les arrestations arbitraires des officiers ressortissants de l’Equateur, ma province d’origine.  J’au aussi dénoncé l’absence des libertés et la bestialité des FARDC. Leur propension à brimer et  à tuer des civils innocents. Enfin, j’ai dénoncé un pouvoir qui est tout sauf légitime. Ils ont cherché à m’éliminer physiquement. Ils m’ont fait coffrer pour monter une cabale qui justifierait mon élimination physique. 

Mais, la providence veillait. Dans la pénombre d’un cachot sordide, un ange à l’aspect humain est venu vers moi. Il m’a dit : ‘’ suis-moi, je te fais traverser le fleuve. Là-bas, en face, tu seras en sécurité’’. Mais, en réalité, c’était le début d’un nouveau cauchemar.

Jean Roger Mboyo Ey’ekula in

Exil sans fin à paraître bientôt.    

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