Le général français Vincent Desportes, ex-directeur de l’Ecole de guerre, opposant notoire à la guerre en Afghanistan, a estimé, dans un entretien diffusé par le journal du dimanche, qu’il "est temps de trouver un compromis avec les autorités libyennes" tout en ajoutant : "Nous ne pouvons pas attendre indéfiniment que le régime de Kadhafi tombe". Ces déclarations de quelqu’un qui parle en connaissance de cause ont fait l’effet d’une bombe en France, pays à la tête de l’équipée occidentale contre Kadhafi avec un Sarkozy qui se réjouit de casser du Guide comme il l’a fait avec Laurent Gbagbo le 11 avril dernier.
Comme si le message du général a été entendu, la France semble se ramollir en faisant évoluer sa position : en effet, elle a fait remarquer, dimanche 11 juillet 2011, que l’issue du conflit libyen sera non pas militaire mais le fruit de négociations entre les parties en présence ; ce qui rapproche, à en croire le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, les positions de l’Union africaine et de l’Otan. Cette position est d’autant plus surprenante que les insurgés seraient à une cinquantaine de km de Tripoli, même si ce n’est manifestement pas demain qu’ils vont marcher sur la capitale. Si la position de l’Hexagone a sensiblement changé, c’est peut-être parce que les forces occidentales, notamment françaises, sont à bout de souffle financièrement, logistiquement et tout ce qui s’en suit. Depuis quelques semaines des experts avaient laissé entendre qu’elles ne pourraient pas tenir dans cette situation délicate.
Sans doute pensait-on au début de l’aventure, que c’était une question de semaine. Voilà bientôt quatre mois que les bombardements ont commencé et si le Guide a plié l’échine, il n’a pas rompu malgré de nombreuses saignées tant politiques que militaires. En se contentant d’affaiblir les forces loyalistes par des bombardements sans répit, les Occidentaux croyaient que les insurgés finiraient le travail au sol, mais force est de constater que cette bande peu ou pas formée et désorganisée n’est pas en mesure de terminer la manœuvre nonobstant les avancées sporadiques qu’elle enregistre sur le terrain. De deux choses donc l’une : ou les puissances occidentales se résolvent à mettre le pied à terre pour mettre fin au mythe d’une armée dont la stratégie tient jusque-là, mais le coût humain (il faudrait, selon certains experts, quelque 10 000 hommes), logistique et financier serait trop lourd à supporter ; ou bien elles se résolvent à négocier d’une manière ou d’une autre avec le colonel, et c’est peut-être ce qui est en train de s’amorcer avec cette nouvelle position du pays de l’empereur Napoléon. L’option militaire n’est pas la solution la plus évidente pour l’U.A., qui va se réjouir de voir un fléchissement vers sa position, à savoir une solution négociée. Cela nous enseigne une sagesse bien de chez nous qui veut que tout homme, puissant soit-il, évite la défiance du genre "si je me lève, je te mettrai KO" lancé à un autre homme. En tout cas, l’OTAN l’apprend à ses dépends en s’attaquant au gravillon alors qu’elle s’attendait à moudre facilement du maïs.
Abdou Karim Sawadogo — L’Observateur Paalga
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