lundi 11 juillet 2011

Libye : Pourquoi Kadhafi résiste



Tombera aujourd’hui, tombera demain. Kadhafi est en train de déjouer tous les pronostics. L’armada occidentale, depuis quatre mois, bombarde les positions de l’armée loyale au guide libyen dans l’espoir de la mettre à genou afin que les insurgés, tels des libérateurs, aillent s’offrir sa chute et sa tête. Mais, comme un roseau, Kadhafi et ses fidèles ploient mais ne rompent pas. Ils résistent. Ils font plus que résister, ils commencent à narguer sérieusement l’OTAN et tous ceux qui ont cru en une guerre-éclair en Libye.
Erreur de calcul ? Inacceptable pour des puissances occidentales, rompues aux renseignements militaires. Elles n’ont pas pu se lancer dans cette campagne libyenne, sans en connaître les risques et la capacité de résistance de l’ennemi. Il ressort peu à peu dans cet enlisement qui se prépare sous nos yeux, que l’OTAN a précipité cette guerre contre le guide libyen. Profitant des circonstances exceptionnelles nées du vent de la révolution du Jasmin qui souffle actuellement sur tous les pays du Maghreb, les Occidentaux ont voulu donner un coup de pouce à la roue de l’Histoire. Malheureusement, cette roue de l’histoire ne tourne pas à la vitesse prévue. Si dans les airs, les avions de l’OTAN règnent en maîtres absolus, leurs alliés au sol, les insurgés du CNT, ont du mal à faire la différence. Tripoli, malgré les assauts répétés des avions de l’OTAN, résiste et le guide dont la vie est plus que jamais en danger, se terre. Mais l’homme n’est –il pas en train de démontrer finalement qu’ au bout de 40 ans de pouvoir, il a réussi à construire une armée suffisamment forte pour résister à un tel assaut aérien ? Le guide vit certainement un martyre, celui de voir une partie de son peuple se rebeller au nom de la démocratie, qu’il n’a pu lui offrir à temps, mais surtout, celui de voir ces derniers s’allier à des Occidentaux, ces "impérialistes" qu’il a toujours combattus au nom d’une certaine idée du nationalisme et du panafricanisme. Ainsi, le temps passe. Plus Kadhafi résistera, plus il se construira une image de martyr et bientôt celle de héros. Le temps joue contre les Occidentaux, et le guide libyen le sait plus que quiconque. Il résistera en attendant cette bombe perdue qui l’emportera ou cet hypothétique assaut militaire au sol, redouté par les Occidentaux eux-mêmes. D’ici là, la cohésion du front anti-Kadhafi en ressentira certainement les effets.
Mardi, le Parlement français fera le point de l’engagement de l’armée française aux côtés des forces de l’OTAN. 160 millions d’euros ont été déjà consacrés à cette guerre dont les objectifs tardent à se réaliser. Sarkozy aurait aimé certainement voir tomber Mouammar Kadhafi avant la fête nationale du 14 juillet. Ce serait alors un joli trophée de guerre. Malheureusement pour lui, Kadhafi n’a pas encore dit son dernier mot. Et tant qu’il continuera à bénéficier de l’appui moral des chefs tribaux les plus importants, tant qu’il disposera à sa guise de la Radiotélévision libyenne, le "Guide" restera toujours debout et droit dans ses bottes. La Coalition occidentale doit donc s’aviser de chercher à travailler au corps certains des plus significatifs des chefs de tribu. Mais elle doit surtout faire taire la Radiotélévision qui dispose là d’un puissant instrument de galvanisation de ses partisans réels ou supposés. De son côté, le CNT n’a pas mieux à faire que de se doter d’une télévision satellitaire pour insuffler dynamisme et force et espérance à ses troupes.

Abdoulaye TAO — Le Pays

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