Selon Victoria Nuland, porte-parole du département d’Etat américain, les Etats unies d’Amérique se disent profondément perturbés par les viols massifs perpétrés dans cette partie du territoire congolais. Washington presse Kinshasa de mener une enquête complète et de mettre hors d’état de nuire les responsables de ces actes commis entre le 10 et le 13 juin 2011 dans le territoire de Fizi au Sud Kivu.
Un colonel et 200 soldats de l’armée congolaise, accusés d’avoir violé des dizaines de femmes au mois de juin dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), se sont rendus jeudi aux autorités militaires.
Il y a quelques jours, l’AFP rapportait les témoignages accablants de ces femmes qui, après avoir été violées au mois de juin par des soldats déserteurs de l’armée congolaise, sont aujourd’hui rejetées par leur mari.
Justice pourrait bien être rendue. C’est du moins ce qu’a laissé entendre le lieutenant-colonel Sylvain Ekenge, porte-parole de l'armée dans la région, en rendant publique la reddition du colonel Nyiragire Kulimushi, connu sous le nom de « Kifaru », et de ses 116 soldats. « Il n'a pas négocié les conditions de sa reddition puisqu'il n'y a pas de conditions à négocier. On lui a intimé l'ordre de sortir et il est sorti de la brousse. Il reste à la disposition des autorités en attendant les résultats de l'enquête militaire. Il n'est pas détenu », a-t-il ajouté.
La justice militaire en charge de l'affaire
Selon le même officier, une enquête est menée par la justice militaire. Quatre magistrats, la police judiciaire, un officier des opérations militaires, deux officiers de sa milice Maï Maï, qui ne l'ont pas suivi, et des agents de la section des droits de l'homme de la Mission de l'ONU en République démocratique du Congo sont chargés de l’affaire.Les fait qui seront examinés remontent au début du mois de juin, lorsque le colonel Kifaru, ancien membre d'une milice Maï Maï, aurait déserté avec ses 200 soldats un centre militaire du territoire de Fizi. Ils auraient attaqué, entre le 10 et 12 juin, les villages de de Nyakiele, Kanguli et Abala, violant les femmes seules.
Quand les femmes brisent le tabou du viol
Dans un village congolais, 121 femmes ont eu le courage de raconter leur viol par des soldats. Pour cela, certaines d’entre elles sont rejetées par leur époux.Même le repas qu’elle a préparé avec soin ne trouve pas grâce aux yeux de son mari, qui préfère celui confectionné par les sœurs de son épouse. La faute de cette jeune Congolaise, prénommée Adèle ? S'être trouvée au mauvais endroit, au mauvais moment et avoir eu la force de raconter son calvaire.
Comme 121 autres femmes de Nakiele, un village congolais de 12 300 habitants, cette mère de 19 ans a été violée. Le corps et la dignité meurtris, elle doit aujourd’hui face au rejet de son époux. « Mon mari n'accepte plus de partager le lit avec moi. Je dors par terre. (…) Je ne comprends pas pourquoi on doit m’abandonner ». Pourquoi ? Parce que, comme dans beaucoup de pays, le viol reste un tabou. Et Adèle, comme les autres femmes du village victimes de viols, a refusé de garder le silence. Depuis, une dizaine d’entre elles sont rejetées violemment par leurs époux.
Les femmes ont brisé le tabou. Elles se sont rendues à l’hôpital pour raconter ce qu’il s’était passé ce matin là. Le 11 juin, 150 soldats déserteurs débarquent. Les hommes du village s’empressent de se réfugier dans la brousse, par crainte d’être utilisés comme porteurs, et d'avoir à subir les violences de ces hommes commandés par un ancien membre d’une milice Maï Maï.
"Femme de militaire"
Une poignée d’homme seulement reste sur place, dont le chef du village, le médecin et ses infirmiers. Leurs femmes échapperont alors à la barbarie des soldats. Mais pas les autres.Sifa a 20 ans. Elle a cru pouvoir confier son désarroi à son mari, alors qu’il revenait de sa fuite le 12 juin au matin. « Il m'a dit que maintenant j'étais une femme de militaire, que je devais suivre les soldats et ne pas rester ici. Mais il ne m'a pas encore chassée. Je ne comprends pas pourquoi il dit ça ». Qu’adviendrait-il d’elle, et de son enfant d’un an serré contre son dos ?
« J'ai honte de passer dans le village. Je suis l'objet de critiques, de moqueries, on dit que je suis une femme de militaire, porteuse de maladie (vraisemblablement le Sida, NDLR) », raconte Dekila, une autre jeune femme de 28 ans, contrainte par son mari de « laisser le lit ».
Phénomène collectif
Si les hommes du village ne s’attendaient pas à voir la dignité de leurs femmes bafouée par les soldats, c’est que les habitudes des militaires ont visiblement changé. Ils avaient coutume, depuis 2009, de passer dans les villages pour quémander « des rations, une chèvre, et les femmes restent en toute quiétude », raconte Losema Etamo Ngoma, le chef de Nakiele. « Mais cette fois ça a mal tourné », déplore-t-il.Une psychologue a tenté d’apaiser le mal-être de ces femmes, en a écouté une cinquantaine, quelques jours plus tard. « (Elles) ont eu le courage de le dire, il y a eu un phénomène collectif, et la sensibilisation d'ONG pour qu'elles se déclarent », estime la thérapeute Eugène Byamoni.
Pour lever le tabou qui sévit en RDC autour du viol, la psychologue essaie de mettre en place des discussions, de « réunir les hommes et les femmes, de les sensibiliser, et d’expliquer que le malheur qui est arrivé n'est pas de la faute des femmes ». Et pour la thérapeute, le « groupe de dix sages » réunis par le chef du village pour essayer de contrer les réactions excessives des maris « n’a pas la méthodologie ». « Il faudrait que des spécialistes viennent leur apporter des méthodes, le plus vite possible, sinon les foyers vont continuer à se disloquer », déplore-t-elle. Dans deux autres villages proches, 127 femmes ont aussi raconté avoir été violées par les soldats.
(Avec AFP)
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