08/08/2011
Money - Dollar notes
Les annulations de la dette de la RDC se succèdent depuis maintenant un an. Après le FMI, la Banque mondiale, les États-Unis, ce fut le tour de la Belgique puis des Pays-Bas, de la France, de la Suède, etc., d’annoncer des annulations de dettes... Mais en quoi consistent-elles vraiment ? Quelles sont les dettes concernées ? Que cachent ces soi-disant actes de générosité de grandes puissances occidentales ?
Arrêtons-nous par exemple sur l’annulation de dette octroyée par la Belgique. Le gouvernement belge comptabilisait 416 millions d’euros de remises de dette dans son aide publique au développement (APD) pour l’année 2010. La Belgique paraît ainsi très généreuse vis-à-vis de la RDC. En réalité, cette opération consiste en un simple jeu d’écriture qui profite surtout à la Belgique qui comptabilise la valeur nominale de cette créance (et non la valeur réelle qui est largement inférieure) dans son APD pour la gonfler artificiellement.
Cet allègement n’est en fait qu’une mascarade surtout lorsque l’on sait que la RDC ne doit rien. Au contraire, c’est la Belgique qui doit au Congo. La Belgique, dont le Sénat a voté le 29 mars 2007 une résolution demandant au gouvernement l’annulation de la dette odieuse en prenant sa valeur réelle (et non nominale) ainsi que la mise en place d’un audit des créances belges sur les pays en développement, doit rendre des comptes aux Congolais (es) sur son implication dans le lourd fardeau de la dette que porte le peuple congolais. Les Congolais(es) doivent également mettre en avant cette résolution du Sénat belge pour exiger un audit de cette dette.
Pour rappel, la Belgique, avec la complicité de la Banque mondiale, nous a légué une dette coloniale le jour même de l’indépendance. Cet héritage odieux est une violation du traité de Versailles, qui interdit le transfert de dettes coloniales aux États indépendants. Ensuite, la Belgique a soutenu, à l’instar des autres puissances capitalistes, la dictature de Mobutu et financé des projets sans le consentement de la population.
De plus, ces projets se sont révélés très souvent improductifs, comme les 4 turbines d’Inga 2 vendues par l’entreprise belge Atelier des Câbleries électriques de Charleroi (ACEC) qui n’ont jamais fonctionné. On peut aussi citer le barrage de Mobayi Mbongo, le renouvellement et électrification du chemin de fer Matadi-Kinshasa (non électrifié jusqu’à ce jour), le projet d’expansion de la Gecamines (n’ayant jamais eu lieu), les soutiens à l’armée de la dictature, etc. Les autorités belges doivent aussi clarifier leur soutien à la sécession du Katanga, qui avait mis un terme à l’indépendance du Congo onze jours seulement après l’indépendance du Congo. Soulignons également que le fameux contentieux belgo-congolais n’a toujours pas été résolu. C’est donc la Belgique qui nous est redevable et pas l’inverse. Le peuple congolais est en droit d’attendre des réparations.
Mais au lieu de cela, les créanciers de la RDC comme le Club de Paris et les Institutions financières internationales (IFI) dont la Belgique fait partie, ont imposé l’austérité budgétaire et la confiscation des ressources naturelles comme conditions à l’annulation de la dette qui est pourtant largement odieuse. La quasi-totalité de la dette qui vient d’être allégée correspond, en effet, à la facture laissée par Mobutu à son peuple. Cette dette odieuse avait par la suite été blanchie par les créanciers au début des années 2000 dans le cadre de l’Initiative pays pauvres très endettés (PPTE).
L’initiative PPTE qui a permis le renforcement de la mainmise des créanciers et des transnationales sur les richesses de notre pays s’est finalement soldée en juillet 2010 par la décision des créanciers d’alléger la dette de notre pays. Les annonces que nous voyons défiler depuis un an ne sont en fait que l’application de cette décision de juillet 2010. De plus, ces annonces relèvent d’une véritable propagande puisque la dette congolaise n’a pas été totalement annulée ! Elle s’élève toujours à 3 milliards de dollars et va très prochainement exploser à nouveau sous l’effet des conditionnalités, dont le fameux « climat des affaires », qui imposent la privatisation des entreprises publiques dans des domaines stratégiques comme le secteur minier.
Alors que les Grecs, les Espagnols, les Irlandais, les Portugais se mobilisent à juste titre contre l’austérité qui les frappe aujourd’hui violemment, les Congolais (es) sont soumis à ces mesures anti-sociales depuis 1976. Le peuple congolais doit comprendre qu’on se moque de lui ! Il nous faut immédiatement exiger l’audit de la dette afin d’exiger la restitution des sommes illégalement perçues par les créanciers. L’exemple de l’Équateur, qui a réalisé l’audit de sa dette externe et interne en 2008, nous montre qu’une telle mesure est tout à fait réaliste.
En novembre 2008, le président équatorien Rafael Correa, prenant appui sur ce rapport d’audit, avait décidé de suspendre le remboursement d’une partie de la dette. Finalement, le gouvernement de ce petit pays est sorti vainqueur d’une épreuve de force avec les banquiers nord-américains détenteurs de ces titres de la dette équatorienne. Il a racheté pour moins de 1 milliard de dollars des titres valant 3,2 milliards de dollars. Le trésor public équatorien a ainsi économisé environ 2,2 milliards de dollars de stock de dette auxquels il faut ajouter les 300 millions de dollars d’intérêts par an pour la période 2008-2030. Au total, grosso modo, l’Équateur a épargné de cette manière plus de 7 milliards de dollars. Cela a permis de dégager de nouveaux moyens financiers permettant au gouvernement d’augmenter les dépenses sociales dans la santé, l’éducation, l’aide sociale et dans le développement d’infrastructures de communication.
Exigeons également des autorités de Kinshasa la divulgation de tous les contrats portant sur les ressources naturelles, comme le Premier ministre vient de s’y engager. Car si nous prenons par exemple le contrat chinois, il y a de quoi se poser des questions sur l’équilibre du contrat, le caractère légal de certaines clauses mais aussi la qualité des travaux. La route qui mène du fleuve à Kinshasa nous le prouve : en moins d’une année, celle-ci est complètement détériorée. Même chose avec la route Mbanza Ngungu - Matadi.
Et que dire du Projet d’appui à la réhabilitation du secteur agricole et rural (PARSAR) financé par la Banque africaine de développement (BAD) dans la province Bas Congo ? De la magouille ! Et c’est le peuple qui paiera si nous laissons faire !
Nous devons immédiatement exiger le respect des articles 56 et 57 de la Constitution congolaise qui qualifient de pillage « tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement ou tout autre fait, qui a pour conséquence de priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout ou partie de leurs propres moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de leurs richesses naturelles » et qui fondent les poursuites judiciaires des auteurs de ce pillage.
Victor Nzuzi (CADTM)
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Les annulations de la dette de la RDC se succèdent depuis maintenant un an. Après le FMI, la Banque mondiale, les États-Unis, ce fut le tour de la Belgique puis des Pays-Bas, de la France, de la Suède, etc., d’annoncer des annulations de dettes... Mais en quoi consistent-elles vraiment ? Quelles sont les dettes concernées ? Que cachent ces soi-disant actes de générosité de grandes puissances occidentales ?
Arrêtons-nous par exemple sur l’annulation de dette octroyée par la Belgique. Le gouvernement belge comptabilisait 416 millions d’euros de remises de dette dans son aide publique au développement (APD) pour l’année 2010. La Belgique paraît ainsi très généreuse vis-à-vis de la RDC. En réalité, cette opération consiste en un simple jeu d’écriture qui profite surtout à la Belgique qui comptabilise la valeur nominale de cette créance (et non la valeur réelle qui est largement inférieure) dans son APD pour la gonfler artificiellement.
Cet allègement n’est en fait qu’une mascarade surtout lorsque l’on sait que la RDC ne doit rien. Au contraire, c’est la Belgique qui doit au Congo. La Belgique, dont le Sénat a voté le 29 mars 2007 une résolution demandant au gouvernement l’annulation de la dette odieuse en prenant sa valeur réelle (et non nominale) ainsi que la mise en place d’un audit des créances belges sur les pays en développement, doit rendre des comptes aux Congolais (es) sur son implication dans le lourd fardeau de la dette que porte le peuple congolais. Les Congolais(es) doivent également mettre en avant cette résolution du Sénat belge pour exiger un audit de cette dette.
Pour rappel, la Belgique, avec la complicité de la Banque mondiale, nous a légué une dette coloniale le jour même de l’indépendance. Cet héritage odieux est une violation du traité de Versailles, qui interdit le transfert de dettes coloniales aux États indépendants. Ensuite, la Belgique a soutenu, à l’instar des autres puissances capitalistes, la dictature de Mobutu et financé des projets sans le consentement de la population.
De plus, ces projets se sont révélés très souvent improductifs, comme les 4 turbines d’Inga 2 vendues par l’entreprise belge Atelier des Câbleries électriques de Charleroi (ACEC) qui n’ont jamais fonctionné. On peut aussi citer le barrage de Mobayi Mbongo, le renouvellement et électrification du chemin de fer Matadi-Kinshasa (non électrifié jusqu’à ce jour), le projet d’expansion de la Gecamines (n’ayant jamais eu lieu), les soutiens à l’armée de la dictature, etc. Les autorités belges doivent aussi clarifier leur soutien à la sécession du Katanga, qui avait mis un terme à l’indépendance du Congo onze jours seulement après l’indépendance du Congo. Soulignons également que le fameux contentieux belgo-congolais n’a toujours pas été résolu. C’est donc la Belgique qui nous est redevable et pas l’inverse. Le peuple congolais est en droit d’attendre des réparations.
Mais au lieu de cela, les créanciers de la RDC comme le Club de Paris et les Institutions financières internationales (IFI) dont la Belgique fait partie, ont imposé l’austérité budgétaire et la confiscation des ressources naturelles comme conditions à l’annulation de la dette qui est pourtant largement odieuse. La quasi-totalité de la dette qui vient d’être allégée correspond, en effet, à la facture laissée par Mobutu à son peuple. Cette dette odieuse avait par la suite été blanchie par les créanciers au début des années 2000 dans le cadre de l’Initiative pays pauvres très endettés (PPTE).
L’initiative PPTE qui a permis le renforcement de la mainmise des créanciers et des transnationales sur les richesses de notre pays s’est finalement soldée en juillet 2010 par la décision des créanciers d’alléger la dette de notre pays. Les annonces que nous voyons défiler depuis un an ne sont en fait que l’application de cette décision de juillet 2010. De plus, ces annonces relèvent d’une véritable propagande puisque la dette congolaise n’a pas été totalement annulée ! Elle s’élève toujours à 3 milliards de dollars et va très prochainement exploser à nouveau sous l’effet des conditionnalités, dont le fameux « climat des affaires », qui imposent la privatisation des entreprises publiques dans des domaines stratégiques comme le secteur minier.
Alors que les Grecs, les Espagnols, les Irlandais, les Portugais se mobilisent à juste titre contre l’austérité qui les frappe aujourd’hui violemment, les Congolais (es) sont soumis à ces mesures anti-sociales depuis 1976. Le peuple congolais doit comprendre qu’on se moque de lui ! Il nous faut immédiatement exiger l’audit de la dette afin d’exiger la restitution des sommes illégalement perçues par les créanciers. L’exemple de l’Équateur, qui a réalisé l’audit de sa dette externe et interne en 2008, nous montre qu’une telle mesure est tout à fait réaliste.
En novembre 2008, le président équatorien Rafael Correa, prenant appui sur ce rapport d’audit, avait décidé de suspendre le remboursement d’une partie de la dette. Finalement, le gouvernement de ce petit pays est sorti vainqueur d’une épreuve de force avec les banquiers nord-américains détenteurs de ces titres de la dette équatorienne. Il a racheté pour moins de 1 milliard de dollars des titres valant 3,2 milliards de dollars. Le trésor public équatorien a ainsi économisé environ 2,2 milliards de dollars de stock de dette auxquels il faut ajouter les 300 millions de dollars d’intérêts par an pour la période 2008-2030. Au total, grosso modo, l’Équateur a épargné de cette manière plus de 7 milliards de dollars. Cela a permis de dégager de nouveaux moyens financiers permettant au gouvernement d’augmenter les dépenses sociales dans la santé, l’éducation, l’aide sociale et dans le développement d’infrastructures de communication.
Exigeons également des autorités de Kinshasa la divulgation de tous les contrats portant sur les ressources naturelles, comme le Premier ministre vient de s’y engager. Car si nous prenons par exemple le contrat chinois, il y a de quoi se poser des questions sur l’équilibre du contrat, le caractère légal de certaines clauses mais aussi la qualité des travaux. La route qui mène du fleuve à Kinshasa nous le prouve : en moins d’une année, celle-ci est complètement détériorée. Même chose avec la route Mbanza Ngungu - Matadi.
Et que dire du Projet d’appui à la réhabilitation du secteur agricole et rural (PARSAR) financé par la Banque africaine de développement (BAD) dans la province Bas Congo ? De la magouille ! Et c’est le peuple qui paiera si nous laissons faire !
Nous devons immédiatement exiger le respect des articles 56 et 57 de la Constitution congolaise qui qualifient de pillage « tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement ou tout autre fait, qui a pour conséquence de priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout ou partie de leurs propres moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de leurs richesses naturelles » et qui fondent les poursuites judiciaires des auteurs de ce pillage.
Victor Nzuzi (CADTM)
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