jeudi 14 juin 2012

Kigali étale son arrogance

le 13 juin 2012



Alors que des charges irréfutables s’accumulent contre Kigali concernant son implication dans la tragédie qui perdure dans l’Est de la RDC, celui-ci nie tout en bloc et affiche une désinvolture qui ne peut être autrement interprétée que comme une insulte à l’endroit de nombreuses victimes congolaises et un mépris vis-à-vis de Kinshasa.

L’étalage de cette arrogance, qui s’accompagne sur le terrain de la poursuite du mouvement de transplantation des populations rwandophones sur le territoire congolais, démontre que le Rwanda tiendrait mordicus à son projet d’annexion du Kivu.

Infiltration des hommes armés rwandais dans les FARDC. Commandement parallèle des troupes au front dans l’Est de la RDC. Mutineries cousues de toutes pièces. Transplantation des populations rwandophones sous le couvert d’un retour des réfugiés tutsi.

Viols, massacres, pillages et déplacements forcés des populations locales constituent assez de preuves irréfutables d’une occupation larvée du Kivu. Les révélations du gouvernement, précédées par celles contenues dans le rapport de la Monusco, ne font plus mystère sur cet état de choses.

Voilà que, encore une fois, Kigali nie tout en bloc. Comme en son temps, lorsqu’on l’accusait d’avoir, avec Kampala, agressé la RDC. Une stratégie défensive qui ne peut plus porter aujourd’hui, malgré les élucubrations de sa ministre des Affaires étrangères qui tente de se disculper en déclarant dans les médias internationaux que Kinshasa ne serait pas capable de régler ses problèmes internes et s’y déroberait en prenant Kigali pour bouc-émissaire.

Ce n’est pas moins du mépris vis-à-vis d’un partenaire (ou prétendu tel) lorsque Mme Mishikiwabo déclare que la mutinerie du M23 est une affaire interne à la RDC et dans laquelle son pays n’a rien à voir. Alors que Kinshasa détient des preuves sur les aveux des mutins du M23 venus fraîchement du Rwanda.

De mal en pis, le chef de la diplomatie rwandaise affiche l’attitude d’un conquistador. D’abord, elle qualifie d’irresponsables les conclusions des rapports des Nations Unies et de Human Rights Watch (HRW).

Ensuite, elle annonce, pince sans rire, que «La présence des FDLR pose un grave problème. C’est un poison idéologique et une force utilisée par ceux qui ne veulent pas de la stabilité.

La solution ne peut pas venir d’une tierce partie : le Rwanda va résoudre cette question avec le Congo».

Enfin, elle attribue à son pays le beau rôle :

«Notre relation est ancienne ; nous avons tout fait pour préserver la stabilité de cette région et cela ne changera. Nous sommes toujours prêts à contribuer à régler le problème si le Congo le demande».
Mme Mishikiwabo, dans son envolée oratoire face à notre consœur Jeune Afrique, ne s’est pas rendu compte de contradictions qui lui sortaient de la bouche.

Elle oublie les opérations militaires conjointes qui n’ont jamais résolu la question FDLR, encore moins aujourd’hui le cas CNDP/M23. Bosco Ntaganda et Sultani Makenga n’étant que les deux pièces d’une même monnaie.

Le but poursuivi par cette stratégie défensive, somme toute maladroite, est, on ne peut plus clair : semer le doute et créer la confusion. La démarche du régime de Kigali, encouragée et soutenue financièrement et matériellement par des forces occultes occidentales, vise la création d’un no man’s land où la prédation pourrait s’opérer en toute quiétude.

Les fossoyeurs de la RDC ont une telle détermination qu’ils font peu de cas du nombre de victimes congolaises et déplacés internes.

N’ont-ils pas tenté à plusieurs reprises d’étouffer la sortie des rapports des Nations unies accusant leur protégé ?
Le plan de balkanisation de la RDC, mis en marche par des officines anglo-saxonnes bien identifiées, suit un schéma dont la traçabilité ne donne lieu à aucun doute sur les intentions réelles de leurs auteurs. D’abord, l’affaiblissement de la RDC comme Etat.

UN SCHEMA PENSE ET ECRIT

La dictature mobutienne a conditionné le peuple congolais dans un carcan : la peur. La guerre de libération enclenchée en 1996 sous le fallacieux prétexte identitaire en a rajouté. Aussitôt, un sujet rwandais a occupé le poste ultrasensible de chef d’état-major de l’armée congolaise.

Les armées et les services de renseignements rwandais, ougandais, tanzanien, burundais, érythréen,… ont traversé de part en part l’étendue de la RDC, à côté des kadogo initiés, à peine, au maniement de la kalachnikov.

La résistance populaire a été appuyée par des armées angolaise, zimbabwéenne, namibienne, tchadienne, … Une fois de plus, des étrangers ont eu accès aux données sécuritaires du pays à moindres frais.

LE BRASSAGE ET MIXAGE

A partir du 2 aout 1998 sous les bannières RCD et MLC, une nouvelle fragilisation de l’Etat congolais a été enregistrée. Un semblant d’unification de l’armée nationale s’est opéré par une simple fusion des commandements de différentes rébellions.

Les hommes des troupes, quant à eux, n’ont pas eu droit à une formation idéologique adéquate. Une formulée unique a été mise en pratique pour le mixage des éléments issus des troupes rebelles. L’efficacité ne pouvait pas être au rendez-vous au regard du déficit de corps imputable à une armée formée dans ces conditions.

Pour parachever l’œuvre destructrice amorcée dès le départ, Laurent Nkunda et une frange des militaires du RCD sont restés en marge du processus de brassage. Pour cause ? La protection de l’ethnie tutsi en «danger d’extermination par les génocidaires FDLR».

En embuscade, le général Laurent Nkunda devrait entrer en danse le moment venu. En très peu de temps, il a créé son CNDP et est arrivé jusqu’à la porte de Goma. La forte pression exercée par la communauté internationale et l’opinion interne ne lui avait pas permis de progresser.

LE COMMANDEMENT PARALLELE

Ayant joué sa partition, Laurent Nkunda est extrait du devant de la scène et un séjour doré lui est offert en terre rwandaise. Un nouveau joker monte sur les planchers pour poursuivre l’œuvre non achevée.

Il se nomme Bosco Ntaganda. Dans un jeu de chaise musicale dont le secret est détenu par Kigali, le wanted de la CPI prétend avoir évincé son mentor pour faire la paix avec Kinshasa.

Sous l’instigation de Kigali, Kinshasa conclut un arrangement qui l’empêche de déployer des éléments issus du CNDP en dehors du Nord-Kivu. Ces derniers occupent tous les postes de commandement dans l’Est du pays pendant une période assez longue.

Le raffermissement de l’autorité de l’Etat dans cette partie du pays est demeuré un mirage. Aussi, lorsque Bosco Ntaganda s’est senti en insécurité, les positions occupées par les chefs CNDP ont été abandonnées comme par enchantement.

POT-AUX-ROSES

Toutes les attaques perpétrées contre la RDC dans sa partie orientale poursuivent un but précis : la mise en place, étape par étape, de la balkanisation du pays. A côté s’opère l’implantation en douceur des populations tutsi rwandaises.

Finalement, ces terres querellées de manière cyclique deviendraient des «no man’s land». D’un côté, des autochtones constamment en fuite, de l’autre des populations implantées, vivant la peur au ventre d’être délogés du jour au lendemain.

Enfin, ces terres congolaises riches en minerais rares seront abandonnées à la merci des prédateurs qui en feront usage sans témoins gênants. Sauf, le gendarme Kigali qui ne se cache pas d’étaler son arrogance se voulant incontournable dans les Grands Lacs.

M23: la ministre rwandaise des affaires étrangères nie l’implication de Kigali

Faut-il voir la main de Kigali derrière le Mouvement du 23 mars qui sévit en RDC ?

Non, répond la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo. Une interview publiée le 3 juin dans J.A. n° 2682. Le Rwanda soutient-il les mutins du Mouvement du 23 mars (M23), repliés dans l’est de la RDC ?

Onze déserteurs l’affirment. Selon leurs témoignages, recueillis par la Mission des Nations unies pour la stabilisation de la RDC (Monusco) et repris dans la presse, ils avaient été recrutés et armés par Kigali pour rejoindre les rebelles proches de Bosco Ntaganda, ce général congolais né au Rwanda et poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI), que Kinshasa veut désormais arrêter.

Louise Mushikiwabo, la ministre rwandaise des Affaires étrangères, réagit.

Jeune Afrique : Un rapport de l’ONU vous accuse de soutenir les mutins du M23. Ces informations sont-elles exactes ?
Louise Mushikiwabo

Je suis catégorique : le Rwanda n’a ni formé ni envoyé de combattants de l’autre côté de la frontière. Cette fuite montre la désinvolture dont fait preuve la Monusco.

Nous avons connaissance de ces allégations depuis des semaines. Pourquoi les diffuser ? La première des choses aurait été de les vérifier : qui sont ces Rwandais ? De quel district viennent-ils ?

Ils disent avoir été recrutés entre février et avril dans le camp de Mudende, près de la frontière avec la RDC…
Mudende est une localité bien connue, où il y a un camp de réfugiés congolais. Cela ne constitue certainement pas une preuve. Il y a 56 000 réfugiés congolais sur notre territoire : ils ont de la famille de l’autre côté de la frontière, il y a des va-et-vient.

Mais accuser un pays de soutenir une rébellion dans un autre pays, c’est totalement irresponsable, compte tenu de notre histoire récente. Ces fausses informations risquent d’avoir des conséquences très graves pour les villageois des collines du Masisi [majoritairement rwandophones, NDLR].

La Monusco coûte 1 milliard de dollars par an et dispose de 20 000 hommes. Elle est là depuis trop longtemps et n’a obtenu aucun résultat.

Vous ne jugez pas la Monusco efficace. L’armée congolaise ne semble pas l’être davantage. Sur qui comptez-vous pour combattre les FDLR en RDC (rébellion rwandaise fondée par d’ex-génocidaires hutus) ?
La présence des FDLR pose un grave problème. C’est un poison idéologique et une force utilisée par ceux qui ne veulent pas de la stabilité. La solution ne peut pas venir d’une tierce partie : le Rwanda va résoudre cette question avec le Congo.

En revanche, la mutinerie du M23 est le fait de forces armées congolaises, sur le territoire congolais. Il y a des choses que nous ne pouvons pas faire. Ce n’est pas notre pays.

La RDC, justement, a pris une initiative pour tenter d’arrêter Bosco Ntaganda…
Regardons les choses en face. Bosco Ntaganda n’est pas recherché par le Congo, mais par la Cour pénale internationale. Et ce n’est pas parce que la CPI – sur laquelle nous émettons bien des réserves – veut arrêter un seul homme que tant de Congolais doivent souffrir.

Pour le reste, contrairement à ce qui a pu être dit, Ntaganda n’a jamais franchi la frontière rwandaise.

Ce rapport risque-t-il de nuire à vos relations avec Kinshasa ?
Kinshasa était, comme nous, déjà au courant de ces allégations. Notre relation est ancienne. Nous avons tout fait pour préserver la stabilité de cette région, et cela ne changera pas. Nous sommes toujours prêts à contribuer à régler le problème si le Congo le demande. Nous continuons d’en discuter.
 
Source: AFRIQUE REDACTION

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