L’ex-président ivoirien pourrait être libéré, puis exilé en Ouganda, à l’issue de son procès à la CPI.
Laurent Gbagbo à la Haye, décembre 2011. REUTERS/POOL New
La rumeur circule, de plus en plus insistante: Laurent Gbagbo, ancien président ivoirien (2000-2011), poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, pourrait jouir bientôt d’une libération provisoire et conditionnelle.
Seulement deux pays africains ont proposé de l’accueillir, selon nos sources, et la plus forte probabilité serait que Laurent Gbagbo soit hébergé par l’Ouganda.
Yoweri Museveni, au pouvoir dans ce pays des Grands Lacs, depuis 1986, a été l’un des rares chefs d’Etat africains à avoir dénoncé l’intervention de la France, lors de la bataille d’Abidjan dès fin mars 2011, pour défaire militairement le régime de Gbagbo. De même, il a dénoncé l’intervention de la France et de l’Otan en Libye.
Le scénario d’une mise en liberté provisoire de Laurent Gbagbo fait depuis plusieurs semaines l’objet de négociations entre le bureau du procureur Luis Moreno-Ocampo et des responsables onusiens et africains, selon le bimensuel d’informations confidentielles La Lettre du Continent.
L’audience de confirmation des charges, fixée du 18 au 22 juin par la CPI, était pourtant censée marquer le début d’un procès-fleuve, sous l’égide du nouveau procureur de la CPI: la Gambienne Fatou Bensouda. Or, c’est toujours Luis Moreno-Ocampo qui se trouve à la manœuvre, en visite à Abidjan, début juin, pour chercher des arguments et des conseils.
Moreno-Ocampo, juste avant son départ, veut éviter un revers majeur. Alors que la justice tarde à se faire en Côte d’Ivoire, la CPI pourrait être, à juste titre, accusée de favoriser une justice des vainqueurs, dans la mesure où aucun responsable d’exactions n’a été arrêté et inculpé dans le camp d’Alassane Ouattara, l’actuel chef de l’Etat ivoirien.
Sur la défensive, le procureur affirme que les «pires crimes» ont été commis par le camp Gbagbo —et ce, malgré le massacre perpétré par les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) à Duékoué, qui a coûté la vie à 816 personnes, sur les 3.000 morts du bilan officiel des Nations unies, sans doute sous-estimé, des victimes de la crise post-électorale ivoirienne.
Le procès de Laurent Gbagbo aura bien lieu, selon toute vraisemblance. Mais l’ancien président ivoirien ne devrait pas rester dans les cellules confortables du pénitencier de Scheveningen, comme Slobodan Milosevic, mort en prison, le 11 mars 2006, lors de la cinquième année de son procès auprès du Tribunal pénal international sur l’ex-Yougoslavie (TPIY).
Ou comme l’ancien président du Liberia, Charles Taylor, condamné à 50 ans de prison le 30 mai 2012 par le Tribunal spécial sur la Sierra Leone (TSSL) —déplacé de Freetown, pour des raisons de sécurité, dans les locaux de la CPI à La Haye. Il serait, selon nos sources, autorisé à faire des allers-retours entre Kampala et les Pays-Bas.
Son avocat, le pénaliste international Emmanuel Altit, a deposé, le 24 mai, un document de 79 pages, sous forme de requête en incompétence de la CPI. Ses motifs? L’absence de tout fondement légal à l’arrestation et la détention de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, puis son transfèrement à La Haye.
Le président déchu a dû attendre quatre mois dans une maison d’un proche de Guillaume Soro, à Korogho —et non dans la résidence officielle de la présidence comme l’ont affirmé les autorités ivoiriennes—, sous la garde d’un chef militaire rebelle visé par des sanctions des Nations unies pour ses atteintes aux droits de l’homme.
Laurent Gbagbo a été confiné dans un espace restreint, en compagnie de son médecin personnel, Christophe Blé, qui s’est occupé, comme il a pu, explique-t-il, des problèmes d’hypertension et d’épilepsie de l’ex-président. Laurent Gbagbo a été, d’avril à novembre 2011, privé de sorties, mais aussi de la visite régulière de sa famille et de ses avocats, qui ont dû surmonter maintes tracasseries pour pouvoir le rencontrer.
De même, son transfèrement à La Haye, le 29 novembre 2011, s’est fait dans des conditions rocambolesques. Son état de santé s’était dégradé au point d’inquiéter les autorités ivoiriennes, qui ne lui ont pas accordé de soins ni d’examen médical.
Gbagbo a été transporté aux Pays-Bas «sans un vêtement de rechange», au terme d’une «parodie» de procédure selon son avocat, Emmanuel Altit, juriste chevronné ayant notamment défendu les infirmières bulgares détenues par le régime de Kadhafi en Libye.
Cet avocat féru de causes médiatiques dispose d’arguments solides pour dénoncer la manière dont son client a été traité, sur le strict plan juridique.
Sabine Cessou
SlateAfrique
Yoweri Museveni, au pouvoir dans ce pays des Grands Lacs, depuis 1986, a été l’un des rares chefs d’Etat africains à avoir dénoncé l’intervention de la France, lors de la bataille d’Abidjan dès fin mars 2011, pour défaire militairement le régime de Gbagbo. De même, il a dénoncé l’intervention de la France et de l’Otan en Libye.
Tractations
Le scénario d’une mise en liberté provisoire de Laurent Gbagbo fait depuis plusieurs semaines l’objet de négociations entre le bureau du procureur Luis Moreno-Ocampo et des responsables onusiens et africains, selon le bimensuel d’informations confidentielles La Lettre du Continent.
L’audience de confirmation des charges, fixée du 18 au 22 juin par la CPI, était pourtant censée marquer le début d’un procès-fleuve, sous l’égide du nouveau procureur de la CPI: la Gambienne Fatou Bensouda. Or, c’est toujours Luis Moreno-Ocampo qui se trouve à la manœuvre, en visite à Abidjan, début juin, pour chercher des arguments et des conseils.
Moreno-Ocampo, juste avant son départ, veut éviter un revers majeur. Alors que la justice tarde à se faire en Côte d’Ivoire, la CPI pourrait être, à juste titre, accusée de favoriser une justice des vainqueurs, dans la mesure où aucun responsable d’exactions n’a été arrêté et inculpé dans le camp d’Alassane Ouattara, l’actuel chef de l’Etat ivoirien.
Sur la défensive, le procureur affirme que les «pires crimes» ont été commis par le camp Gbagbo —et ce, malgré le massacre perpétré par les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) à Duékoué, qui a coûté la vie à 816 personnes, sur les 3.000 morts du bilan officiel des Nations unies, sans doute sous-estimé, des victimes de la crise post-électorale ivoirienne.
Vices de procédure
Le procès de Laurent Gbagbo aura bien lieu, selon toute vraisemblance. Mais l’ancien président ivoirien ne devrait pas rester dans les cellules confortables du pénitencier de Scheveningen, comme Slobodan Milosevic, mort en prison, le 11 mars 2006, lors de la cinquième année de son procès auprès du Tribunal pénal international sur l’ex-Yougoslavie (TPIY).
Ou comme l’ancien président du Liberia, Charles Taylor, condamné à 50 ans de prison le 30 mai 2012 par le Tribunal spécial sur la Sierra Leone (TSSL) —déplacé de Freetown, pour des raisons de sécurité, dans les locaux de la CPI à La Haye. Il serait, selon nos sources, autorisé à faire des allers-retours entre Kampala et les Pays-Bas.
Son avocat, le pénaliste international Emmanuel Altit, a deposé, le 24 mai, un document de 79 pages, sous forme de requête en incompétence de la CPI. Ses motifs? L’absence de tout fondement légal à l’arrestation et la détention de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, puis son transfèrement à La Haye.
Le président déchu a dû attendre quatre mois dans une maison d’un proche de Guillaume Soro, à Korogho —et non dans la résidence officielle de la présidence comme l’ont affirmé les autorités ivoiriennes—, sous la garde d’un chef militaire rebelle visé par des sanctions des Nations unies pour ses atteintes aux droits de l’homme.
Exil en Ouganda
Laurent Gbagbo a été confiné dans un espace restreint, en compagnie de son médecin personnel, Christophe Blé, qui s’est occupé, comme il a pu, explique-t-il, des problèmes d’hypertension et d’épilepsie de l’ex-président. Laurent Gbagbo a été, d’avril à novembre 2011, privé de sorties, mais aussi de la visite régulière de sa famille et de ses avocats, qui ont dû surmonter maintes tracasseries pour pouvoir le rencontrer.
De même, son transfèrement à La Haye, le 29 novembre 2011, s’est fait dans des conditions rocambolesques. Son état de santé s’était dégradé au point d’inquiéter les autorités ivoiriennes, qui ne lui ont pas accordé de soins ni d’examen médical.
Gbagbo a été transporté aux Pays-Bas «sans un vêtement de rechange», au terme d’une «parodie» de procédure selon son avocat, Emmanuel Altit, juriste chevronné ayant notamment défendu les infirmières bulgares détenues par le régime de Kadhafi en Libye.
Cet avocat féru de causes médiatiques dispose d’arguments solides pour dénoncer la manière dont son client a été traité, sur le strict plan juridique.
Sabine Cessou
SlateAfrique
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