lundi 3 septembre 2012

Enrôler nos jeunes dans l’armée ou les envoyer à l’abattoir !

Vendredi, 24 Août 2012

Nous n’avons pas besoin, pour le moment, d’une armée aux ordres des « chevaux de Troie » envahissant nos institutions.


Nous avons, au contraire, besoin de créer et d’entretenir nos « fronts nationaux de résistance et de libération » en phase avec les masses populaires.

Nous avons besoin d’une politisation progressive et permanente de nos masses populaires. Contrairement aux apparences, notre pays et notre continent traversent des moments durs de violence et de recolonisation entretenus par la petite bourgeoisie compradore ayant orchestré le coup d’Etat après les élections de novembre et décembre 2011 et ses alliés Ougandais et Rwandais.

Il arrive que l’amnésie soit, de temps en temps, la chose la mieux partagée par plusieurs d’entre nous. Et surtout par certains médias de Kinshasa.

De plus en plus, ces médias relaient l’appel de « l’Etat major général » (des affairistes) invitant les jeunes (dont l’âge oscille entre 18 et 25 ans) à pouvoir s’enrôler dans l’armée.

Le souhait aurait été que les questions liées à la non-formation d’une armée républicaine après le dialogue inter-congolais puissent être débattues publiquement avant que nos jeunes puissent être envoyés à « l’abattoir ».

Pourquoi certaines résolutions prises à ce dialogue n’ont-elles pas pu être mises en pratique ? Evoquons-en deux : la mise sur pied d’une armée républicaine et de la commission (Justice), Vérité et Réconciliation.

La guerre de basse intensité et de prédation menée contre notre pays s’était servie de plusieurs élites compradores congolaises et étrangères qui se sont retrouvées dans plusieurs institutions du pays et même dans l’armée.

Leur infiltration dans ces institutions a largement contribué à leur affaiblissement, à la vente de notre terre, au pillage en règle de nos richesses du sol et du sous-sol, à l’extermination de nos populations au profit du réseau transnational de prédation dont ces élites font partie.

Les dernières défections des ex-membres du CNDP de ce qui était considérée jusque-là comme « l’armée congolaise » est un témoignage éloquent.

Parler de l’enrôlement de nos jeunes dans l’armée dans les conditions actuelles est une erreur gravissime. Les gouvernants lançant cet appel sont, pour plusieurs d’entre eux, issus et/ou complices du coup d’Etat administratif ayant eu lieu après les élections de novembre et décembre 2011.

Depuis le début de cette guerre d’agression, à plusieurs reprises, sur plusieurs fronts d’affrontement entre ce qui faisait office d’armée congolaise et les agresseurs Rwandais et Ougandais par plusieurs milices interposés, quand « notre armée » donnait l’impression de prendre le dessus sur l’adversaire, les ordres émanant de la « haute hiérarchie » lui conseillaient d’arrêter.

Aussi, au fur et à mesure que cette guerre de prédation dure, ses secrets ont été mis à nu : l’accès aux hauts grades permettait aux hauts gradés de s’enrichir illicitement en détournant l’argent destiné à l’achat des armes ou autre matériel de guerre.

Ces hauts gradés de différents armés impliqués dans cette guerre de rapine coopéraient entre eux et en partageaient les dividendes avec leurs « hautes hiérarchies » et les multinationales.

Si nos populations civiles paient un pris très lourd dans ce gangstérisme économique, « les pays amis », « les grandes puissances », « les ONG humanitaires », la bourgeoisie compradore du Rwanda, du Burundi, de l’Ouganda et du Congo dit démocratique en tirent un profit énorme.

En sus, au Congo (RD), cette bourgeoisie compradore dirigeant les institutions dans l’illégitimité et dans l’illégalité veut se refaire une petite santé politique sur le dos d’une guerre dans laquelle elle joue le rôle de la police locale.

Répondre aux appels de cette petite bourgeoisie inutile, c’est cracher sur notre propre histoire.

Non. Nous n’avons pas besoin, pour le moment, d’une armée aux ordres des « chevaux de Troie » envahissant nos institutions. Nous avons, au contraire, besoin de créer et d’entretenir nos « fronts nationaux de résistance et de libération » en phase avec les masses populaires ; malgré la longueur de la nuit.

Oui. Nous avons besoin d’une politisation progressive et permanente de nos masses populaires.

Contrairement aux apparences, notre pays et notre continent traversent des moments durs de violence et de recolonisation. De grands partis des masses allant à la rencontre des citoyens dans les coins et recoins de notre pays sont plus qu’indispensables.

Comme sous la colonie, il y a une nécessité de « reconversion » de nos masses populaires en véritables acteurs de notre histoire collective.

La petite bourgeoisie kabiliste soutenue par « les vieux dinosaures mobutistes » ne sera d’aucune utilité dans cette « reconversion ».

Comme sous la colonie, « la reconversion ne sera pas opérée au niveau des structures mises en place par la bourgeoisie au cours de son règne, cette caste n’ayant fait (et/ou ne faisant) autre chose que de prendre sans changement l’héritage de l’économie, de la pensée et des institutions coloniales » (F. FANON, Les damnés de la terre, Paris, La découverte/Poche, 2002, p.169) et néocoloniales.

« La reconversion » se fera à partir des cellules de base de nos masses populaires. Oui. « Il faut une base, des cellules qui donnent précisément contenu et dynamisme.

Les masses doivent pouvoir se réunir, discuter, proposer, recevoir des instructions. Les citoyens doivent avoir la possibilité de parler, de s’exprimer, d’inventer. » (Ibidem)

Politiser les masses pourrait se révéler plus efficace que mille bombes. Et politiser les masses ne peut pas signifier leur tenir épisodiquement de grands discours vantant les mérites de quelque leader charismatique que ce soit.

Non. « Politiser c’est ouvrir l’esprit, c’est éveiller l’esprit. C’est comme le disait Césaire, « inventer des âmes ».

Politiser les masses ce n’est pas, ce ne peut pas être faire un discours politique. C’est s’acharner à faire comprendre aux masses que tout dépend d’elles, que si nous stagnons c’est de leur faute et que si nous avançons, c’est aussi de leur faute, qu’il n’y a pas de démiurge, qu’il n’y a pas d’homme illustre et responsable de tout, mais que le démiurge c’est le peuple et que les mains magiciennes ne sont définitive que les mains du peuple. » (Ibidem, p.187)

Cet effort de politisation des masses populaires ne peut être mené par des partis politiques bourgeois dont les sphères d’actions se limitent aux grandes villes. « Pour réalise ces choses, dit Frantz Fanon, pour les incarner véritablement, il faut décentraliser à l’extrême. » (Ibidem)

Savoir est un pouvoir. Un savoir partagé avec les masses populaires, est un pouvoir multiplié.

Dans la situation actuelle de notre pays, en marge des cellules et comités locaux de résistance, en marge des « fronts nationaux de résistance et de libération » à créer et/ou à entretenir, l’enrôlement de nos jeunes dans « une armée des mercenaires » est une option hasardeuse.

La politisation persévérante et l’éveil de conscience de nos masses populaires est la meilleure. Nous serions très avancés, si nous avions « un grand parti populaire », capable de mobiliser et de politiser les masses des quatre coins du Congo (RD) comme l’église catholique en a fait la démonstration il y a quelque temps.

Mbelu Babanya Kabudi
Congoone

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