mercredi 19 septembre 2012

Minerais de sang : les Pays-Bas emboîtent le pas aux USA

 mardi 18 septembre 2012  

Le nombre de Congolais morts - plus de 6 millions -  suite aux affrontements armés récurrents a fini par susciter la compassion de la communauté internationale.

Sensibilisées et prises de compassion, certaines nations ont  imaginé et instauré des mécanismes visant, notamment, à décourager le commerce des minerais du sang, et par la même occasion, casser le cycle de fausses rébellions et autres seigneurs de guerre.

Il s’agit, d’abord, des Etats-Unis avec la loi Dodd-Frank. Et, tout dernièrement, des Pays-Bas avec l’«initiative étain sans conflit », lancée depuis le mardi 18 septembre 2012.  Le fond de toutes ces initiatives étant la certification des minerais de l’Est du Congo, source de tensions récurrentes dans cette partie de la RDC.

Il est une lapalissade de dire que les conflits armés récurrents en RDC ont comme soubassement l’exploitation et le commerce illicites de ses minerais.  Raison pour laquelle les affrontements entre les groupes armés à la solde des multinationales qui pullulent dans l’Est du pays sont observés autour ou dans les localités qui regorgent des substances minérales très prisées, notamment l’or, la cassitérite, le coltan, le diamant, le nobium, l’étain... 

C’est d’ailleurs cet ancrage spatial des conflits armés en RDC qui a permis de remonter la filière maffieuse qui va des zones minières jusqu’aux seniors de la chaîne en passant par une série d’intermédiaires, au nombre desquels des régimes des pays voisins.

Se servant des enquêtes menées sur le terrain, les Etats-Unis ont été le premier pays à prendre des initiatives visant à casser, sinon à réduire l’exploitation et le commerce illicites des substances minérales en provenance des zones de conflits, particulièrement l’Est de la RDC. Le gouvernement américain a appelé, à juste titre, ces substances « minerais du sang ».

Pour concrétiser l’initiative, l’administration américaine a initié la « loi Dodd-Frank » pour décourager, entre autres, le commerce illicite de minerais dans la partie Est de la RDC.

Le texte de plus de 2 300 pages de la loi Dodd-Frank - du nom de  ses principaux artisans, le sénateur Chris Dodd et le représentant Barney Frank – a été adopté par le Congrès américain le 12 juillet 2010. Il constitue la plus vaste réforme de la régulation financière aux Etats-Unis, depuis les années 1930.

Les Etats-Unis avaient donc pris une bonne longueur d'avance, il y a deux ans, en votant ces dispositions sur les ressources minières de l’Est de la RDC. Cette loi impose aux entreprises américaines de s'assurer qu'elles n'ont utilisé ni or, ni tungstène, ni coltan (colombite-tantalite) extrait de mines sous contrôle des groupes armés de RDC. Autrement dit, elles doivent certifier qu’elles n’ont acheté aucun « minerai du sang ».

D’ailleurs, il nous revient que le nom de la République démocratique du Congo est inscrit noir sur blanc dans le chapitre 1 502 de la loi Dodd-Frank. Elle a été rédigée pour réformer le secteur financier américain après la crise de 2008.

Son vote est intervenu en juillet 2010. Toutefois,  deux ans plus tard, la loi n'est toujours pas entrée en vigueur.

Raison : le texte d'application n'est pas encore signé par la Securities and Exchange Commission (SEC), structure qui passe pour le gendarme des marchés aux Etats-Unis. Un brin d’espoir reste, à savoir une soixantaine d'élus du Congrès vient de demander à la SEC d'accélérer le pas. 

Il est vrai que l’adoption de la loi Dodd-Frank par les deux chambres du Parlement américain reste un pas décisif dans la lutte contre le commerce illicite de minerais en provenance de l’Est de la RDC.

« Initiative étain sans conflit » aux Pays-Bas

Deux ans après, l’initiative américaine fait des émules. Il s’agit de la Hollande. Les partenaires de l'industrie de la cassitérite viennent d’annoncer le 18 septembre 2012 aux Pays-Bas le lancement d’un programme d' « étain sans conflit ». L’initiative vise essentiellement l’étain en provenance de l’Est de la RDC, notamment le Sud-Kivu.

Cette initiative a réuni plus de 175 intervenants représentant l'industrie, le gouvernement et la Société civile. Selon notre source, l'« Initiative étain sans conflit » vise à créer une action pour limiter le commerce illicite de l’étain exploité dans l’Est de la RDC, une région dont l'économie s'est effondrée en raison de la série de graves conflits internes et transfrontaliers.

Les groupes armés dans l'Est de la RDC exercent un contrôle sur le commerce des matières premières où ils perçoivent des impôts en tant que source de revenus. De nombreuses entreprises dans le monde ont hésité à acheter des minéraux de certaines parties de la RDC. En outre, la législation récente aux États-Unis a créé un embargo de facto dans la région.

L'Initiative « étain sans conflit » introduit une chaîne d'approvisionnement étroitement contrôlé, en dehors du contrôle des groupes armés. Elle pose le premier pas vers l'activité économique renouvelée et d'espoir aux masses de mineurs au chômage.

Actuellement, l'infrastructure est mise en place en RDC pour le démarrage de ce projet pilote. Jusqu'à présent, Royal Philips Electronics, Tata Steel, Motorola Solutions, Research In Motion (RIM), Alpha Metals & Alloys AIM, Malaysia Smelting Corporation Berhad (MSC), Traxys et ITRI se sont engagés à participer à l'initiative.

L'Initiative se félicite de toutes les entreprises, y compris les mines, les fonderies, les fabricants de composants et les fabricants de produits (utilisateurs finaux) qui ont accepté à se joindre, et son succès sera largement mesuré par la participation de l'industrie dans le système d'approvisionnement en cette matière.

Le ministère néerlandais des Affaires étrangères a pris une part active à cette initiative en amenant tous les partenaires de la chaîne d'approvisionnement de l’étain à rejoindre le projet.

Le gouvernement de la RDC et la Société civile locale sont étroitement impliqués dans l'initiative qui est structurée dans le cadre de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et sera compatible avec les directives de diligence raisonnable de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Ce projet devrait contribuer aux efforts de réforme du gouvernement de la RDC et de son ministère des Mines. Sa progression dépendra de la façon dont la situation sécuritaire au Sud-Kivu se développera.

Ben Knapen, ministre néerlandais de la Coopération au développement espère que « cela peut être une première étape dans une région où il y a beaucoup de torts à faire droit ».

Le Potentiel

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