mercredi 28 novembre 2012

Un peu de courage, Monsieur le Premier ministre!


Le Premier ministre congolais Augustin Matata Ponyo


Mushaki (octobre 2008) et Goma (novembre 2012) symbolisent désormais deux humiliantes débâcles des Forces armées de la RD Congo dans la province du Nord Kivu. La première fois, c’était face aux combattants du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) dirigé à l’époque par le flamboyant Laurent Nkunda Mihigo. Cette fois-ci, c’est encore face aux éléments du CNDP. Des combattants «intégrés» de manière anarchique dans les rangs des FARDC en signe d’une «capitulation» qui ne disait pas son nom.

Le Rwanda de Paul Kagame a-t-il apporté un soutien aux forces du CNDP-M23 lors de ces affrontements ? Sans doute. Rien de bien normal quand on sait que les relations entre Etats ont toujours été basées sur les rapports de force. Voilà pourquoi ce double «coup de pouce» du maître de Kigali ne peut en aucun cas constituer une cause d’excuse pour les gouvernants congolais en général et «Joseph Kabila» en particulier. Gouverner, c’est prévoir. Les dirigeants congolais - le chef de l’Etat en tête - ont failli dans l’accomplissement de la mission qui incombe à tout gouvernement d’assurer la défense du territoire et le maintien de l’ordre.

Depuis le 26 janvier 2001 à ce jour, «Joseph Kabila» a beaucoup promis. Rares sont les promesses qui ont été tenues. N’avait-il pas promis de doter le Congo-Kinshasa d’une «armée moderne, forte, bien équipée, capables de défendre la nation en toutes circonstances» ? N’a-t-il pas l’habitude d’ergoter sur la paix et l’unité dans chacune de ses allocutions? Il faut refuser de regarder pour ne pas voir que Mushaki et Goma constituent une «alerte» sur la mauvaise santé de l’armée congolaise. Bref, la mauvaise santé de la sécurité nationale. L’armée congolaise est malade de l’incompétence, de l’indiscipline autant que de la déloyauté de ceux qui ont la prétention de la régenter. Il faut refuser de regarder pour ne pas voir que "Joseph Kabila" n’est pas un homme de paix. Le Congo est victime de sa "brutalité génétique". L’homme ne comprend qu’un seul langage : le rapport de force.

Depuis son accession à la tête de l’Etat, un certain 26 janvier 2001, le «général-major» «Joseph Kabila», ancien chef d’état-major des Forces terrestres, a fait des questions militaires et sécuritaires une «chassee gardée». L’armée, la police, les services des renseignements civils et militaires relèvent de lui et ne rendent comptent qu’à lui seul. Et pourtant, aucun texte légal ne confère cette compétence au premier magistrat du pays.

En décembre 2006, on a vu le patron de la police nationale d’alors, John Numbi Banza Tambo, entamer des pourparlers avec Laurent Nkunda. Et ce à l’insu du chef d’état-major général de l’armée. En janvier 2009, Numbi a joué un rôle de premier plan lors du déploiement des troupes rwandaises dans le cadre de la fameuse «Opération Umoja Wetu». La suite est connue. Il va sans dire que l’armée congolaise se trouve entre des "mauvaises mains". «Joseph Kabila» qui n’a pas passé une seule année dans une Académie militaire entretient délibérément du «poto poto» au sein des Forces armées par des nominations fantaisistes mettant l’homme qu’il ne faut pas à la place qu’il ne faut pas. Sans oublier des ordres irrationnels donnés à des prétendus « commandants » qui étaient la veille des simples «coupeurs de route» dans les milices qui fleurissent dans les deux Kivu. "Kabila" a peur des cadres militaires bien formés.

La Constitution congolaise en vigueur décrète notamment en son article 91 : «(…). Le gouvernement conduit la politique de la nation. La défense, la sécurité et les Affaires étrangères sont des domaines de collaboration entre le président de la République et le gouvernement. Le gouvernement dispose de l’administration publique, des Forces armées, de la police nationale et des services de sécurité. Le gouvernement est responsable devant l’Assemblée nationale (…)». Il est temps que le Premier ministre congolais Augustin Matata Ponyo cesse de ne penser qu’à sa carrière politique. Il est temps qu’il arrête de parler de la couleur de sa cravate et de la "croissance" pendant que la partie orientale du pays brûle. Le temps est venu pour lui de démontrer que sa nomination à ce poste inaugure "une ère marquée par la rupture avec le passé" comme il l’a laissé entendre dans une interview à l’hebdomadaire "Le Vif/L’Express" n°47.

Le gouvernement se trouve à l’épreuve des faits. Il doit simplement gouverner conformément à la Loi fondamentale. Après Mushake et Goma, plus rien ne doit être comme avant. «Joseph Kabila» est plus que jamais disqualifié pour continuer à exercer un pouvoir discrétionnaire sur les questions militaires et sécuritaires. Toute politique se juge aux résultats. Lorsqu’une politique ne donne guère les résultats escomptés, il faut changer de politique. Agir autrement, équivaudrait à être le complice de l’"euthanasie" d’une Nation. Le Congo-Kinshasa est la propriété de 70 millions de Congolais et non de "Joseph Kabila".

Un peu de courage, Monsieur le Premier ministre !

Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

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