Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et le mouvement rebelle du M23 entament ce vendredi des discussions à Kampala, pour tenter de mettre fin au conflit dans l'Est du pays.
Des négociations entre le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et le M23 devraient avoir lieu ce vendredi. Crédit Reuters
Actif en République démocratique du Congo depuis plus de quinze ans, j’entretiens d’excellentes relations aussi bien avec Joseph Kabila qu’avec d’autres chefs d’état de la région jouant un rôle éminemment central dans la crise congolaise, notamment Paul Kagame (Rwanda) et Yoweri Museveni (Ouganda).
Fort de cette expérience, je suis sidéré de l’incapacité de la communauté internationale à percevoir que le « Grand Congo » est à la merci de ses petits voisins.
Ils sont venus, ils ont vaincu, puis… ils sont repartis. Il faudrait être plus que candide pour croire que les rebelles du M23 ont pendant douze jours occupé Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), uniquement pour se rappeler au bon souvenir de Kinshasa et du monde extérieur avant de se fondre de nouveau dans les collines alentour.
La communauté internationale se bercerait également d’illusion en se persuadant que ses pressions sur le Rwanda ont cerclé d’une ligne rouge à ne plus franchir l’État du général-président Kagamé.
Ce dernier, ayant fait du génocide des Tutsis en 1994 le bouclier de son impunité, vient au contraire d’apporter la preuve de son emprise décisive sur son grand voisin. Voulez-vous la paix dans l’est du Congo ? Alors, il faut en négocier le prix à Kigali.
On pourrait appeler cela la « loi du post-mobutisme ». En effet, pour chasser du pouvoir le maréchal Mobutu, alors qu’il n’était déjà plus que l’ombre de lui-même en raison d’un cancer terminal, les voisins orientaux du Congo – principalement l’Ouganda et le Rwanda – ont organisé sa succession manu militari.
En octobre 1996, une première « rébellion congolaise » est sortie du sol, toute en armes, treillis de camouflage et bottes en caoutchouc, pour marcher sur Kinshasa. Figure de proue sans corps armé à lui, Laurent-Désiré Kabila, otage des troupes rwandaises, a pris les rênes à Kinshasa.
Après son assassinat en janvier 2001, "son fils Joseph" lui a succédé au pouvoir comme se sont succédées les « rébellions ».
En 2009, un partage des richesses minières dans l’est a été conclu entre Kabila-fils et Kagamé. Cette paix des pillards était fondée sur l’intégration dans l’armée congolaise des rebelles télécommandés par Kigali.
Or, au mois de mars, passé le cap de sa réélection frauduleuse, Joseph Kabila a rompu ce pacte pour le réécrire en sa faveur. La suite est connue.
Pour l’avenir prévisible, cette suite sera sans fin. Comme le soleil, les rébellions se lèveront à l’est tant que le Rwanda n’aura pas sa part des diamants, de l’or et du coltan.
Si l’est du Congo est martyrisé, Joseph Kabila et la classe politique à Kinshasa n’en sont pas pour autant des victimes innocentes de leurs voisins orientaux.
D’abord parce qu’il se trouve toujours un parti d’opposition dans la capitale congolaise – à présent c’est celui de Vital Kamerhe – qui ne demande qu’à monter dans les fourgons rwandais pour se faire conduire au pouvoir.
Ensuite parce que Kabila-fils a de facto effrité le Congo en trois : l’est swahiliphone qu’il ne cesse de se disputer avec les Rwandais et les Ougandais ; Kinshasa et le « pays du fleuve » où le lingala sert de langue véhiculaire et où l’actuel chef de l’Etat n’a jamais été populaire ; enfin, le Katanga, la province méridionale du cuivre et du cobalt dont est originaire Joseph Kabila mais qu’il a bradée aux groupes miniers belges, canadiens et chinois.
jean-yves Ollivier
Atlantico.fr
Des négociations entre le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et le M23 devraient avoir lieu ce vendredi. Crédit Reuters
Actif en République démocratique du Congo depuis plus de quinze ans, j’entretiens d’excellentes relations aussi bien avec Joseph Kabila qu’avec d’autres chefs d’état de la région jouant un rôle éminemment central dans la crise congolaise, notamment Paul Kagame (Rwanda) et Yoweri Museveni (Ouganda).
Fort de cette expérience, je suis sidéré de l’incapacité de la communauté internationale à percevoir que le « Grand Congo » est à la merci de ses petits voisins.
Ils sont venus, ils ont vaincu, puis… ils sont repartis. Il faudrait être plus que candide pour croire que les rebelles du M23 ont pendant douze jours occupé Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), uniquement pour se rappeler au bon souvenir de Kinshasa et du monde extérieur avant de se fondre de nouveau dans les collines alentour.
La communauté internationale se bercerait également d’illusion en se persuadant que ses pressions sur le Rwanda ont cerclé d’une ligne rouge à ne plus franchir l’État du général-président Kagamé.
Ce dernier, ayant fait du génocide des Tutsis en 1994 le bouclier de son impunité, vient au contraire d’apporter la preuve de son emprise décisive sur son grand voisin. Voulez-vous la paix dans l’est du Congo ? Alors, il faut en négocier le prix à Kigali.
On pourrait appeler cela la « loi du post-mobutisme ». En effet, pour chasser du pouvoir le maréchal Mobutu, alors qu’il n’était déjà plus que l’ombre de lui-même en raison d’un cancer terminal, les voisins orientaux du Congo – principalement l’Ouganda et le Rwanda – ont organisé sa succession manu militari.
En octobre 1996, une première « rébellion congolaise » est sortie du sol, toute en armes, treillis de camouflage et bottes en caoutchouc, pour marcher sur Kinshasa. Figure de proue sans corps armé à lui, Laurent-Désiré Kabila, otage des troupes rwandaises, a pris les rênes à Kinshasa.
Après son assassinat en janvier 2001, "son fils Joseph" lui a succédé au pouvoir comme se sont succédées les « rébellions ».
En 2009, un partage des richesses minières dans l’est a été conclu entre Kabila-fils et Kagamé. Cette paix des pillards était fondée sur l’intégration dans l’armée congolaise des rebelles télécommandés par Kigali.
Or, au mois de mars, passé le cap de sa réélection frauduleuse, Joseph Kabila a rompu ce pacte pour le réécrire en sa faveur. La suite est connue.
Pour l’avenir prévisible, cette suite sera sans fin. Comme le soleil, les rébellions se lèveront à l’est tant que le Rwanda n’aura pas sa part des diamants, de l’or et du coltan.
Si l’est du Congo est martyrisé, Joseph Kabila et la classe politique à Kinshasa n’en sont pas pour autant des victimes innocentes de leurs voisins orientaux.
D’abord parce qu’il se trouve toujours un parti d’opposition dans la capitale congolaise – à présent c’est celui de Vital Kamerhe – qui ne demande qu’à monter dans les fourgons rwandais pour se faire conduire au pouvoir.
Ensuite parce que Kabila-fils a de facto effrité le Congo en trois : l’est swahiliphone qu’il ne cesse de se disputer avec les Rwandais et les Ougandais ; Kinshasa et le « pays du fleuve » où le lingala sert de langue véhiculaire et où l’actuel chef de l’Etat n’a jamais été populaire ; enfin, le Katanga, la province méridionale du cuivre et du cobalt dont est originaire Joseph Kabila mais qu’il a bradée aux groupes miniers belges, canadiens et chinois.
jean-yves Ollivier
Atlantico.fr
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