Le M23, qui sous-traite ce projet macabre pour le compte de Kigali et Kampala, contrôle déjà deux territoires de la province du Nord-Kivu (Rutshuru et Nyiragongo). Depuis, il ne cesse de consolider son emprise sur le plan administratif en envisageant même une reprise du contrôle de la ville de Goma.
Pour preuve, cette correspondance de Jean-Marie Runiga, son président, datée du 24 décembre 2012 et adressée aux agences du système des Nations unies opérant dans la province du Nord-Kivu. Curieusement, à Kinshasa, c’est l’aphonie ; motus et bouche cousue.
Les pourparlers de Kampala tendent à laisser Kinshasa se leurrer et dormir sur ses lauriers. Au contraire, le gouvernement devrait redoubler de vigilance et anticiper. Une correspondance du président du M23 datée du 24 décembre 2012 lève, une fois de plus, le pan de voile sur les visées de ce groupe armé pro rwandais.
La missive est adressée aux organisations et agences humanitaires intervenant dans les territoires sous contrôle du M23. La forme et le fond confirment de plus en plus que le plan de balkanisation de la RDC est bien en marche.
Plus l’ombre d’un doute : le M23 est le bras d’exécution du projet de partition de la RDC qui, dans l’Est du pays ne se conjugue plus au futur. Les faits et gestes du M23 en font foi. Ce groupe armé se conforte davantage dans son illusion d’être le seul maître des territoires qu’il contrôle. Au détriment de Kinshasa.
C’est donc dans la stature du président du M23 – par ricochet président des territoires réunis de Rutshuru et de Nyiragongo – que Jean-Marie Runiga répond à une correspondance des agences du système des Nations unies relative au paiement de l’Impôt professionnel sur revenu (IPR). D’ores et déjà, l’on note que ces dernières reconnaissent les pouvoirs dont se prévaut le M23.
Tout en exprimant la reconnaissance de son mouvement à ces organisations pour les efforts qu’elles fournissent pour « alléger les souffrances des populations congolaises se trouvant dans le territoire sous le contrôle du M23 en leur fournissant une assistance humanitaire », Jean-Marie Runiga motive ce prélèvement par le souci d’« exécuter et de soutenir la mise en œuvre des activités d’intérêt public telle que la réhabilitation des routes ou l’appui à des campagnes de vaccination ».
Goma dans le viseur
Dans la même correspondance, il dit répondre positivement aux desiderata des ces ONG et agences humanitaires : « C’est en tenant compte de l’utilité de votre travail que le M23 est décidé de vous exonérer du paiement de l’IPR ». Mais, il y a pire.
C’est, notamment, lorsqu’il leur promet qu’« à partir du moment où notre Mouvement administrera le chef-lieu de la province, les humanitaires seront tenus au strict respect des lois fiscales en vigueur ». Que dire de ce ton ? Que les territoires sous contrôle du M23 échappent complètement au gouvernement central.
Curieusement, aucune réaction n’est venue de Kinshasa. C’est comme si cet échange de correspondances était normal, donnant l’impression que Jean-Marie Runiga dirige un pays soumis aux lois édictées par son mouvement. C’est révoltant ! C’est intolérable !
D’aucuns sont d’avis que Kinshasa serait en train de se prêter au jeu des parrains du M23. Conformément au dernier accord signé dans le cadre de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), le M23 a retiré ses troupes de la ville de Goma.
Au vu de l’évolution, l’on se rend compte que ce retrait n’était que du spectacle destiné à rouler l’opinion dans la farine. Car la réalité aujourd’hui, c’est que les troupes du M23 sont allées jamais partir. Elles sont positionnées à moins de 5 km de Goma, au lieu de 20 km comme convenu.
Dans sa correspondance, Jean-Marie Runiga promet de revenir sur ses exonérations dès que le M23 « administrera » le chef-lieu du Nord-Kivu. Qu’est-ce à dire ? Que le M23 envisage déjà de reprendre le contrôle de Goma ? Rien n’est moins sûr.
Il serait logique de tirer une barre sur les discussions de Kampala. Elles vont tirer en longueur pour lasser l’opinion et, finalement, aboutir à un nouveau partage de pouvoir entre des groupes armés dirigés par des seigneurs de guerre créés à cette fin.
L’évidence aujourd’hui c’est que les éléments du puzzle se mettent en place l’un après l’autre, d’abord dans l’Est ; ensuite dans le reste du pays. Le M23 y travaille activement.
Raison pour laquelle, dans les territoires qu’il contrôle, il se considère comme le seul maître à bord, totalement affranchi de l’emprise de Kinshasa. L’unité du pays est en jeu.
Le gouvernement doit mettre tout en œuvre pour décourager tous ceux qui travaillent sur ce projet. Le premier pas consiste à user d’un langage dur et vigoureux envers le Rwanda et l’Ouganda, deux pays reconnus mondialement comme principaux soutiens du M23.
L’enlisement des pourparlers de Kampala engagés entre Kinshasa et le M23 sont autant de signaux qui augurent d’une reprise imminente de la guerre dans l’Est de la RDC. Kinshasa est prévenu ; il devra se comporter en conséquence. Afin d’éviter tout effet de surprise. Mais d’être traîté de complice, malgré lui.
[Le Potentiel]
Lettre du président du M23 aux organisations et agences humanitaires intervenant dans le territoire sous contrôle du M23
Objet : Exonération du paiement de l’IPR
Je vous écris au sujet de votre correspondance relative au paiement de l’impôt professionnel sur revenu (IPR) par celles de vos organisations ayant des bases dans le territoire sous contrôle du M23.
Je voudrais, pour commencer, exprimer la reconnaissance de notre mouvement pour les efforts que vos organisations fournissent afin d’alléger les souffrances des populations congolaises se trouvant dans le territoire sous le contrôle du M23 en leur fournissant une assistance humanitaire.
Laissez-moi porter à votre connaissance que, dans un souci de bonne gouvernance, les impôts et taxes que nous prélevons servent à exécuter et à soutenir la mise en œuvre des activités d’intérêt public tel que la réhabilitation des routes ou l’appui à des campagnes de vaccination comme nous le faisons en ce moment.
C’est en tenant compte de l’utilité de votre travail que le M23 a décidé de vous exonérer du paiement de l’IPR. Toutefois à partir du moment où notre Mouvement administrera le chef-lieu de la province, les humanitaires seront tenus au strict respect des lois fiscales en vigueur.
Sachez Mesdames, Messieurs que notre mouvement est prêt à vous apporter l’assistance nécessaire à la réalisation de vos activités humanitaires. Nous pouvons vous assurer que dans le respect du droit international humanitaire, le M23 vous reconnaît le droit à l’accès aux vulnérables dans l’ensemble du territoire qu’il a sous contrôle.
N’hésitez pas à nous contacter chaque fois que vous en ressentirez le besoin.
Veuillez agréer Mesdames, Messieurs l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Fait à Bunagana, le 24/12/2012
Pour le M23
Bishop Jean-Marie Runiga Lugerero
Président
Addis-Abeba a abrité une réunion consultative sur les mesures de sécurité dans l’Est de la RDC
Dans le cadre des efforts en vue de la résolution rapide de la crise dans la partie orientale de la RDC et la stabilisation de la région des Grands Lacs, la Commission de l'Union africaine (UA) a tenu les 27 et 28 décembre 2012 à Addis-Abeba, une réunion consultative sur la mise en place et le déploiement de la force internationale neutre et le renforcement du Mécanisme conjoint de vérification, comme prévu dans le cadre de la Cirgl.
En plus de l'UA, la réunion a regroupé les délégués de la Cirgl, des pays de la région des Grands Lacs, des organisations régionales africaines concernées (la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale - CEEAC et de la Communauté de développement de l'Afrique australe - SADC), de l'Organisation des Nations Unies, de l'Union européenne ainsi qu’un certain nombre de partenaires bilatéraux, y compris les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU.
La réunion a été convoquée en application du communiqué sur la situation dans la partie orientale de la RDC adoptée par la 346ème séance du Conseil de Paix et de sécurité (CPS) de l’UA, qui s'est tenue à Addis-Abeba le 10 décembre 2012.
Dans ce communiqué, le CPS a demandé à la Commission de l’UA de prendre les mesures nécessaires pour faciliter la tenue, sous ses auspices, des consultations en vue de faciliter la mobilisation de l'appui nécessaire à la mise en place et le déploiement de la force internationale neutre et de la mise en œuvre intégrale du mécanisme conjoint de vérification, en la lumière du concept d'opérations développé par la CIRGL et de la décision prise par la SADC à Dar-es-Salaam le 8 Décembre 2012.
© KongoTimes
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