mardi 12 février 2013

Joseph Kabila : Un chef d’Etat dilettante


Population en errance dans le Nord Kivu. Photo d’archives

Selon le «Dictionnaire pratique Quillet», le mot «dilettante» désigne une personne «qui considère la vie comme un spectacle, qui joue avec les idées et ne prend rien au sérieux». C’est aussi l’«attitude de celui qui ne cherche que l’amusement de l’esprit».

Contrairement aux autres nations où le chef de l’Etat rencontre, une fois l’an, les membres du corps diplomatique à l’occasion de l’échange de vœux, «Joseph Kabila» s’est affranchi de ce devoir. Point d’échange de vœux de nouvel an.

Le samedi 26 janvier, le locataire du Palais de la nation a «innové». Il a invité les ambassadeurs et chefs de mission diplomatique en poste à Kinshasa à venir s’entretenir avec lui à la Cité de l’Union Africaine.

De quoi ont-ils parlé ?

Dans un communiqué daté du même samedi, le directeur du cabinet présidentiel indique que «la situation générale qui prévaut sur l’ensemble du territoire national et les efforts en cours pour ramener une paix durable dans le Nord-Kivu ainsi que dans la région des Grands Lacs» étaient au centre des conversations.

Jusque là, il n’y a rien à fouetter un chat sauf pour constater que le "nationaliste de gauche" qu’est «Joseph Kabila», - dixit, l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito - s’est cru obliger de rendre compte sur la situation du pays devant des étrangers.

Loin est donc l’époque où les pseudo-nationalistes du 17 mai 1997 clamaient leur indignation face à tout ce qui ressemblait à de "l’ingérence étrangère" dans les "affaires domestiques" du Congo démocratique.

Parlant de la situation sécuritaire - c’est l’objet de cet édito -, «Kabila» a osé dire devant ces distingués messieurs et dames - dont la mission consiste non seulement à «représenter» mais surtout à «observer» et à «informer» les pays d’envoi sur les réalités du pays d’accueil - que «le calme règne sur l’ensemble du territoire national, hormis la situation d’occupation des territoires de Rutshuru et de Nyiragongo dans le Nord-Kivu ainsi que son onde de chocs dans quelques zones avoisinantes».

«Joseph Kabila» serait-il un menteur impénitent ou simplement un pauvre bougre, déconnecté des réalités du pays aux destinées duquel il est censé présider? Comment peut-il aligner des contrevérités avec autant d’aplomb alors qu’il a fait le serment «de maintenir» non seulement l’indépendance mais aussi l’intégrité du territoire national?

Ce territoire national qui est justement amputé de la partie passée, depuis plusieurs mois, sous le contrôle des rebelles du M23. Devrait-on conclure que pour l’actuel locataire du Palais de nation, la paix se résume à l’absence de conflit armé?

Peut-on honnêtement soutenir que «le calme règne sur l’ensemble du territoire national» pendant que l’ex-chef milicien Kyungu Mutanga, alias Gédéon, et des combattants Maï Maï sèment la terreur dans le Nord-Katanga ?

Que dire des guérilleros ougandais de l’ADF/NALU qui continuent à se mouvoir impunément dans la Province Orientale et dont la présence a été signalée à Beni, au Nord Kivu ?

Un chef d’Etat, sain de corps et d’esprit, conscient de ses responsabilités, peut-il décemment parler d’accalmie sur «l’ensemble du territoire national» pendant que le nombre de ses "concitoyens", déplacés pour cause d’insécurité, est passé «de 1,7 millions en décembre 2011 à 2,7 millions en décembre 2012?

Que dire de la situation dans le district de l’Ituri, dans la Province Orientale, où des miliciens font régner leur «loi» dont le fameux «Cobra Matata» ? Que dire enfin de l’enlèvement depuis le 19 octobre dernier dans le diocèse de Béni-Butembo de trois religieux (Anselme Wasukundi, Jean Ndulani et Edmond Kisughu) par des «ravisseurs non identifiés» ?

Quelle représente, pour "Joseph Kabila", la fonction de chef de l’Etat? Quelle est sa conception du pouvoir d’Etat? Est-ce un service, une charge ou simplement un privilège? La fonction de chef d’un Etat se limite-t-elle, pour lui, aux aspects frivoles?

A travers cette rencontre avec les diplomates accrédités à Kinshasaa, «Joseph Kabila» vient, une fois de plus, de démontrer aux Congolais qu’il vit dans un monde irréel. Il fait une lecture minimaliste de la situation générale du pays. Pour lui, «tout va bien» pendant que tous les observateurs constatent que rien ne va.

Devrait-on comprendre que, pour "Joseph", le "calme" règne et regnera aussi longtemps que les coups de canons ne retentiront pas aux portes de la capitale?

Devrait-on comprendre que, pour lui, le calme règne et continuera à régner aussi longtemps que les Kinois ne descendront pas dans les rues pour exiger son départ?

Baudouin Amba Wetshi © Congoindépendant

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