mardi 14 mai 2013

RDC - Mgr Pierre Marini : "La désignation du président de la Ceni doit se faire par voie démocratique"

14/05/2013


Mgr Marini Bodho a dirigé le Sénat de la RDC pendant la transition (2003-2006). © DR

Qui prendra la tête de la nouvelle Ceni en RDC ? Les tractations se poursuivent dans les états-majors des différents courants et partis de la majorité, de l'opposition ou de la société civile.

Des rumeurs à Kinshasa citent déjà comme favori l’abbé Malu Malu, l’homme des élections de 2006.

Si personne ne confirme, Mgr Pierre Marini, responsable de l’Église du Christ au Congo et ancien président du Sénat congolais, lui, n’exclue pas cette éventualité. Le prélat protestant insiste néanmoins sur le respect des règles démocratiques. Interview.

Une (folle) rumeur a circulé, le 12 mai, à Kinshasa : l’abbé Malu Malu, reviendrait aux manettes de la Ceni en RDC. Officiellement, bien-sûr, il n’en est rien. La Conférence nationale épiscopale du Congo (CNCO) a d’ailleurs improvisé un point de presse dès le lendemain pour « fixer l’opinion nationale et internationale [sur le fait] qu’elle n’a pas présenté de candidat » au poste du président de l’organe électoral.

« Il s’agit en réalité d’un rappel d’une disposition commune des évêques sur la présence des ecclésiastiques (prêtres, religieux, frères, sœurs…) dans l’organe chargé d’organiser les élections », précise l’abbé Félicien Mwanama, secrétaire général adjoint de la CNCO.

« Sauf dérogation exceptionnelle d’un supérieur, il leur est interdit de prendre part à la Ceni, un statut de membre électoral étant incompatible avec leur vocation d’être au dessus des clivages politiques », ajoute-t-il.

De son côté, Mgr Pierre Marini Bodho, le numéro un de l’Église du Christ au Congo (ECC) et ancien président du Sénat (2003 – 2006), explique à Jeune Afrique que les tractations se poursuivent dans les confessions religieuses pour désigner le candidat idéal, le « moins mauvais », capable de diriger la Ceni.

Jeune Afrique : En coulisses, on parle de plus en plus d’un possible retour de l’abbé Malu Malu, qui a déjà présidé à l’organisation des élections de 2006. Serait-il la personne à même de conduire la RDC vers des élections transparentes et apaisées ?

Mgr Pierre Marini : Je n’ai pas d’objection à une éventuelle candidature de l’abbé Malu Malu à la présidence du bureau de la Ceni. S’il estime qu’il peut apporter un plus, aider son pays, pourquoi pas…

L’essentiel pour moi, c’est que la désignation du délégué des confessions religieuses [qui deviendra président de la Ceni, selon la loi électorale, NDLR] se déroule par la voie démocratique. Un vote pour départager les candidats, suivant les critères bien établis, nous éviterait des conflits inutiles.

Quel est donc aujourd’hui le profil d’un bon président de la Ceni qui proviendrait de la société civile ?

Il doit être un homme d’écoute. Un homme capable de concilier les divergences de vue, qui respecte les règles du jeu.

Il doit considérer sa fonction comme un service à rendre à la nation, et non comme un gagne-pain. C’est là que se situe le problème de nos démocraties africaines. Démocratie ne rime pas avec pauvreté : beaucoup se laissent vite corrompre.

Pour sa part, la CNCO vient d’indiquer qu’elle ne présentait pas de candidat à la présidence de la Ceni, "sauf dérogation exceptionnelle". Est-ce que la même disposition est prise au niveau de l’Église du Christ au Congo (ECC) ?

Je n’ai pas tous les éléments de cette décision de la CNCO, mais je considère qu’il s’agit d’une volonté d’instaurer la distance entre l’Église et les aspirations individuelles. Une façon donc d’éviter que les candidats se présentent au nom de l’Église.

C’est une bonne chose dans la mesure où nous sommes là sur un terrain glissant. À l’ECC, nous privilégions les principes généraux qui nous régissent. Si l'un de nous veut prendre part à la Ceni, il devra faire une demande de mise en disponibilité.

C’est une mesure qui rejoint celle de la CNCO. Nous voulons tous qu’il n’y ait pas de confusion entre l’Église et l’individu qui aspire à diriger l’organe électoral.

Je suggère que les confessions religieuses désignent un homme capable de dire "non".

Avez-vous pris des garanties pour que la personne choisie par les membres des confessions religieuses ne soit pas un homme ou une femme imposé par la majorité ou l’opposition ?

C’est une question de conscience individuelle. Nul n’est parfait, mais il existe parmi nous des « moins mauvais ». C’est pourquoi je suggère que les confessions religieuses désignent un homme capable de dire « non ».

Un nom ?

Je ne peux pas donner de nom, mais ces personnes existent bien en RDC.

Et si vos paires vous demandaient de prendre la direction de la Ceni ?

On verra. Moi, j’ai déjà servi mon pays et, en plus, à un moment de belligérance – à l’époque du schéma 1 + 4 [un président de la république et quatre vice-présidents lors de la période de la transition 2003-2006, NDRL]. Aujourd’hui, je préfère que nous laissions la place aux autres. Nous devons chercher les oiseaux rares qui conduiront le pays vers des élections apaisées.
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Propos recueillis par Trésor Kibangula
Jeune Afrique

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