Le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, président de la Ceni. © AFP
Séducteur-né, le patron de la Ceni congolaise, Daniel Ngoy Mulunda, n’est jamais avare de belles paroles, mais elles ne se traduisent pas toujours dans les actes.
À Kinshasa, un missionnaire américain le remarque. L’archevêque sud-africain Desmond Tutu cherche une tête bien faite pour animer la jeunesse de la Conférence des Églises de toute l’Afrique, la Ceta, dont le siège est à Nairobi. Il organise un concours. Sur dix-huit candidats, Ngoy Mulunda est retenu. Sûr qu’il a fait un malheur à l’oral… Puis il décroche deux mastères aux États-Unis…
Négociateur
À la chute de Mobutu, en 1997, le pasteur est déjà un Congolais en vue dans la diaspora. Son atout maître, c’est l’empathie. À coups de confidences, il sait mettre en confiance ses interlocuteurs. Très vite, à partir de 2001, Joseph Kabila en fait l’un de ses émissaires secrets pour monter l’attelage « 1 + 4 » qui dirigera la transition jusqu’en 2006 (un président, quatre vice-présidents).
En 2003, il est de ceux qui convainquent le chef rebelle Azarias Ruberwa et l’homme d’affaires Moïse Katumbi de revenir à Kinshasa ou à Lubumbashi. Il est moins heureux avec Étienne Tshisekedi.
Un cadre de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), Jean-Joseph Mukendi, se souvient : « À l’époque, Tshisekedi était en Afrique du Sud. Mulunda est venu le voir, lui a juré que Kabila était d’accord pour qu’il devienne vice-président. On ne l’a plus jamais revu. » On devine le regard suspicieux du vieux Tshisekedi le jour où Ngoy Mulunda est venu lui faire l’article. Entre les deux hommes, la brouille ne date pas d’aujourd’hui.
Le pasteur est-il l’un des membres fondateurs du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie
(PPRD) de Joseph Kabila ? Dans un entretien au Soft (26 septembre 2005), il s’en vante : « Regardez sur la liste des membres fondateurs du PPRD. Mon nom y figure. » Aujourd’hui, il dément énergiquement : « Je n’ai jamais été membre fondateur. Je n’ai jamais signé. Donnez-moi la preuve. » Qui croire du Mulunda de 2005 ou de celui de 2011 ? Ce qui est sûr, c’est que le pasteur a voté Kabila en 2006. Il ne s’en cache pas.
Habileté
Ces dernières années, il a l’habileté de prendre du champ. Opérations « Arme contre vélo » ou « Arme contre 100 dollars »… L’homme crée une ONG, le Programme œcuménique de paix, transformation des conflits et réconciliation (Parec).
Avec ses talents de prédicateur, il bat les estrades du Katanga, du Nord-Kivu et de l’Ituri pour récupérer des milliers d’armes. Au début de cette année, dès qu’il est nommé à la présidence de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), il en enfile la veste et la casquette d’agent et tente de rassurer l’opposition en mettant en avant son sens du dialogue et s’engage : « La stabilisation des résultats va se faire par les témoins.
S’il y a 62 000 bureaux de vote, il faut au moins 62 000 témoins. La Ceni n’est pas là pour préparer une fraude massive, mais pour faire de bonnes élections. »
Le problème, c’est que, lors du dépouillement des élections du 28 novembre, beaucoup de témoins ne peuvent pas témoigner.
« Au Katanga, dans le Sud-Kivu, dans la Province-Orientale, à Kinshasa, les observateurs et les témoins des partis politiques ont été empêchés d’observer l’ensemble des étapes de la compilation des résultats », affirme la mission de l’Union européenne.
De la parole aux actes, les chemins du pasteur sont parfois sinueux.
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