mardi 17 juillet 2012

La guerre au Nord Kivu : Qui est traître et qui ne l’est pas ?

13 juillet 2012 



Près de trois mois après le déclenchement de la mutinerie des éléments du CNDP, «Joseph Kabila» reste muet. Comme pour détourner l’attention de l’opinion congolaise sur les lacunes de l’appareil d’Etat kabiliste, une certaine presse kinoise suspecte des personnalités politiques de coaliser avec le M23. 

Pendant ce temps, le procureur général de la République s’est cru en droit de perquisitionner chez l’avocat Mbuyi Mbiye. Dans un communiqué daté du jeudi 12 juillet l’Union pour la nation Congolaise (UNC) demande l’organisation d’un «débat national» réunissant le pourvoir et les représentants des forces politiques et sociales.

Après plusieurs semaines d’un jeu de cache-cache, les mutins du M23 ont désormais des visages. Après Vianney Kazarama, le porte-parole militaire, dont le visage a été montré par plusieurs télévisions, le chef du M23, le nommé "Sultani Makenga", est sorti du bois. L’homme ne parle qu’en swahili. 

Jeudi 12 juillet, les spectateurs ont découvert la frimousse du «porte-parole politique» de ce mouvement, un certain Jean-Marie Runiga. Ce dernier a indiqué que leur objectif n’est pas de prendre Goma. «Nous n’hésiterons pas à le faire au cas où la sécurité de la population serait menacée», a-t-il ajouté.

«Exactions sélectives»


Notons que dans un communiqué daté du…8 juillet, le M23 «dénonce et condamne avec la dernière énergie les exactions sélectives perpétrées dans la ville de Goma ce lundi 9 juillet contre des citoyens de la République ciblés pour leur appartenance ethnique». 

«Notre mouvement exige l’arrêt immédiat desdites exactions et promet qu’il ne restera pas inactif face à de ces graves violations des droits humains, en cas de récidive il prendra ses responsabilités.» 

Des membres de la communauté tutsi dont des étudiants de l’université de Goma ont été «brutalisés» la semaine dernière par des personnes non autrement identifiées. Le gouverneur Paluku a fait une mise au point lundi 9 juillet dans laquelle il a fustigé ces actes. 

«Nous avons appris avec beaucoup d’amertume qu’en ville de Goma, il y a certains jeunes gens qui seraient entrain de s’en prendre à d’autres compatriotes, a-t-il déclaré. Il s’agit d’un jeu auquel sont entrain de se livrer les ennemis de la paix». Comment pourrait-il en être autrement ? 

On apprenait jeudi que le patron de la RTNC (radio télévision nationale congolaise) a écopé d’une suspension pour avoir fait diffuser un discours «xénophobe» tenu par des cadres du parti kabiliste, le PPRD.

Il y a une semaine, le ministre des médias, Lambert Mende Omalanga suspendait «jusqu’à nouvel ordre» un quotidien kinois pour le même fait. Peut-on franchement parler de «xénophobie» lorsqu’un Congolais s’en prend à un compatriote issu d’une autre ethnie ?

Diversion

Pendant que les « chefs » du M23 et leurs parrains rwandais savourent l’humiliation infligée aux Forces armées congolaises ainsi qu’à leur «commandant suprême», on assiste à une campagne de diversion de l’opinion qui ne dit pas son nom. L’objectif est manifestement de disculper «Joseph Kabila» dans la débâcle des FARDC. 

Et pourtant, l’incompétence du numéro un Congolais en matière militaire et sécuritaire est mise à nu. On assiste à une tentative de jeter en pâtures des prétendus «complices» du M23 au sein du personnel politique. 

De même, on est stupéfait d’entendre des évêques et des membres de la société civile du Nord Kivu reprocher littéralement à la Mission onusienne son "inaction" en matière de protection de la population. 

C’est à croire que la Monusco doit se substituer à l’Etat dont les fonctions essentielles consistent à défendre le territoire national et à garantir la paix et la tranquillité. Bref, assurer le maintien de l’ordre. 

Un confrère qui se reconnaîtra a osé écrire que Antipas Mbusa Nyamwisi aurait été aperçu à Kigali. Selon ce confrère, «des personnalités politiques congolaises de haut rang» seraient des «membres actifs» d’une prétendue «conjuration» contre le pouvoir de «Joseph Kabila». 

«Ce sont ces nouveaux chevaux de Troie, note-t-il, qui ont fourni tous les renseignements nécessaires à Kigali en vue de rendre possible l’agression en cours au pays». 

Dans cette ambiance de "chasse aux sorcières" qui ne dit pas encore son nom, le bureau du bâtonnier Mbuyi Mbiye à Kinshasa a été perquisitionné par le PGR Flory Kabange Numbi. Ce magistrat corrompu, inféodé au pouvoir exécutif, était, semble-t-il, à la recherche de «documents séditieux». 
 
Dans un communiqué daté du 12 juillet, l’UNC de Vital Kamerhe « condamne » la guerre à l’Est et « invite » les mutins « à déposer sans conditions les armes pour favoriser une issue politique à la guerre et permettre le retour de plus de 220 déplacés et plus de 30.000 réfugiés». 

Le communiqué dément la présence de Vital Kamerhe à Beni et déplore le « définit d’informations entretenu par le pouvoir qui ne donne pas au peuple souverain les vraies causes de cette énième agression lui imposée». 

En conclusion, «exige» l’organisation d’un « débat national » impliquant le pouvoir, l’opposition, les confessions religieuses et la société civile. But : se pencher sur la menace qui plane sur l’unité national et l’intégrité du territoire.

Qui est traître ?

Questions : Tout ce qui est prohibé pour les membres la classe politique congolaise serait-il permis pour «Joseph Kabila» ? 

N’est ce pas Joseph Kabila qui avait, contre toute attente, engagé des pourparlers avec le chef du CNDP, Laurent Nkunda, à l’insu de l’état-major général des FARDC ? 

Quid de l’accord secret conclu entre lui et Paul Kagame en décembre 2008 ? 

N’est ce pas «Kabila» qui avait autorisé le déploiement des soldats rwandais sur le sol congolais à l’insu du Parlement ? 

Qui a ordonné l’intégration sans discernement des ex-combattants du CNDP dans l’armée nationale ? 

A-t-on oublié que le CNDP, devenu un parti politique, faisait partie du cartel dit « Majorité présidentielle » qui regroupe les forces politiques et sociales pro-Kabila ? 

Que dire de l’intégration des officiers et des cadres politiques du CNDP dans l’armée ainsi que dans les institutions provinciales et nationales ? 

N’est-ce pas de la félonie ? 

Question finale : Qui est traître et qui ne l’est pas ?

Au moment de boucler ces lignes, on apprenait que les mutins du M23 menacent de reprendre les localités qu’ils avaient conquis avant de se retirer. C’est le cas de notamment de Rutshuru et de Kiwanja. Selon le gouverneur Paluku, ces localités étaient repassées dimanche 8 juillet sous l’autorité des FARDC.

Baudouin Amba Wetshi

© Congoindépendant

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