jeudi 15 novembre 2012

La Belgique suspend sa coopération militaire avec le Rwanda

Une mesure symbolique mais douloureuse



Entre la Belgique et le Rwanda, c’est l’escalade. Sur la pointe des pieds…Bien après la plupart des pays européens, la Belgique a décidé de suspendre sa coopération militaire avec le Rwanda à la suite des rapports de l’ONU accusant Kigali de soutenir au Nord Kivu le mouvement rebelle M23.

Il s’agît, de la part de Bruxelles, de la première mesure concrète, même si le partenariat militaire entre les deux pays est plus que symbolique : il porte principalement sur la formation de militaires rwandais et sur des échanges en matière médicale.

Deux militaires belges avaient ainsi été envoyés à l’hôpital militaire de Kigali afin d’y assister les spécialistes en médecine tropicale et les formations prévues pour 2012 et 2013 ont été supprimées.

La présence de militaires rwandais à l’école royale militaire n’est cependant pas mise en question et l’attaché militaire belge à Kigali n’a pas été rappelé. La minceur de cette coopération tranche avec la situation qui prévalait avant 1994, où les militaires belges, très présents, dispensaient, entre autres des formations de para commandos aux unités d’élite du régime Habyarimana.

Bien avant la Belgique, d’autres partenaires du Rwanda avaient exercé des pressions concrètes : fin septembre l’Union européenne avait suspendu ses nouveaux projets d’aide, tandis que Hollandais, Scandinaves et Américains réduisaient leur coopération.

Les Britanniques, qui ont suspendu, puis rétabli leur aide, demeurent manifestement divisés sur le sujet.

Quant à la Belgique, elle avait jusqu’à présent privilégié la « diplomatie de la parole », Didier Reynders durcissant son discours de semaine en semaine et allant jusqu’à s’abstenir de voter en faveur de la candidature du Rwanda, qui, avec 148 voix, a été élu membre non permanent du Conseil de sécurité lors de la dernière Assemblée générale de l’ONU.

Manifestement, la Belgique, deuxième contributeur en termes d’aide au Rwanda, répugne à tailler dans des programmes de coopération qui non seulement bénéficient à la population mais sont, en plus, gérés de manière très satisfaisante.

Même si la mesure est largement symbolique, la suspension du partenariat militaire accompagne un positionnement diplomatique de plus en plus net : lors de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne, Didier Reynders entend revenir sur la question des sanctions.

Ayant contribué à la formation de deux bataillons de militaires congolais par l’envoi d’instructeurs à Kindu (Sud Kivu), la Belgique dispose en effet d’informations de première main sur la situation qui prévaut dans la région, confirmant les conclusions des experts de l’ONU à propos du soutien apporté aux rebelles par le Rwanda et l’Ouganda.

En outre, la position de la Belgique, très écoutée par ses partenaires, ferme toutes les perspectives d’avenir du M23, dont les membres, comme tous leurs prédécesseurs jusqu’à présent, espéraient obtenir impunité et promotions à l’issue d’une négociation avec Kinshasa.

Sur le terrain cependant, la situation n’évolue guère : le nombre de déplacés dépasse le demi-million, les ONG dénoncent une recrudescence des violences sexuelles et des recrutements forcés, dont des mineurs.

En outre, le mouvement rebelle, composé initialement de militaires mutins s’est étoffé d’une branche politique qui multiplie les contacts, espérant que le temps confortera le fait accompli de l’occupation d’une région dotée de vastes ressources et adossée à deux postes frontaliers qui génèrent d’importantes recettes douanières.

Même si elle est plutôt symbolique, la décision belge a été mal reçue à Kigali d’autant qu’elle était assortie d’une déclaration abrupte du ministre Reynders qui assurait ” on ne va pas former des militaires qui, par ailleurs, déstabilisent le Congo.”

Ces propos peu diplomatiques risquent d’entraîner une réaction peu diplomatique elle non plus…

C.B, le soir

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