jeudi 7 mars 2013

Alain Destexhe: pourquoi ne pas envoyer de troupes belges en Afrique centrale?

A l’issue des travaux de la commission d’enquête parlementaire qui s’est réunie en 1997, avec pour mission de déterminer les responsabilités de la Belgique au Rwanda et plus particulièrement d’examiner les circonstances de l’ assassinat de dix casques bleus belges à Kigali, plusieurs recommandations ont été adoptées par la Chambre et le Sénat.

Je me souviens qu’à l’époque, les conclusions des travaux n’ont pas été votées en séance plénière, car elles mettaient en cause trois personnalités, qui étaient en fonction en 1994 : Jean-Luc Dehaene, Premier Ministre, Léo Delcroix, Ministre de la Défense et Frank Swaelen, alors président du Sénat.

A l’époque, ce qui importait, c’était d’obtenir l’adhésion de toutes les formations politiques, y compris le Cdnv, ce qui signifie que les membres de la Commission Rwanda, qui était dirigée par Guy Verhofstadt, n’ont pas exigé que les conclusions soient acceptées par les deux Chambres.

Quels ont été les effets de cette résolution sur la politique extérieure de la Belgique ?

Alors qu’il ne s’agissait que d’une résolution, qui, au fond, n’avait guère de valeur contraignante, elle a fortement bloqué la politique extérieure de la Belgique en Afrique centrale.

Selon moi, l’une des causes de ce blocage inutile est le vieux fonds pacifiste flamand : il y avait clairement divergence entre le Nord et le Sud du pays, les Flamands ne voulaient plus s’engager militairement, ni dans nos anciennes colonies à la suite du Rwanda ni dans d’autres guerres, comme l’Irak…

Le député SPA Dirk Vandermaele, est l’incarnation de ce courant…

Pensez vous que l’intervention de troupes belges en Afrique centrale pourrait faire la différence ?

Il faut d’abord relever le terrible scandale que représente le déploiement de la Mission des Nations unies au Congo, qui coûte bon an, mal an, un milliard quatre cent mille dollars, une gabegie qui vient encore d’être dénoncée dans un article de Tony Blair publié dans la revue Foreign Policy.

Il me semble qu’avant toute discussion sur un nouveau redéploiement de Casques bleus au Congo, une évaluation s’impose. Il faudrait faire un bilan et examiner si ces militaires ont ou non protégé les populations civiles…

L’accord de paix qui vient d’être signé à Addis Abeba renforce encore cette coûteuse mission, qui, sur le terrain, n’a pas réussi grand chose. Cela étant, je ne suis pas sûr que le déploiement de militaires belges serait une bonne idée.

Certes, des officiers pourraient être détachés au niveau de l’état major, être chargés de certaines tâches de formation ou de renseignement, mais pour ce qui concerne des troupes au sol, je suis plus sceptique…Il ne faut pas sous estimer le climat anti-belge qui a quelquefois régné dans la région, que ce soit au Congo ou au Rwanda…

De toutes façons, il faudrait prendre en compte les éventuelles objections des pays de la région…

Quels seraient les cas où un déploiement belge s’imposerait ?

Je crois que, dans certaines circonstances, comme une menace de génocide, il faudrait prendre en compte un impératif moral et déployer tous les efforts possibles pour imposer la paix…

Mais cela devrait être exceptionnel, et une telle implication devrait bénéficier du consensus de toute la région…

Le carnet de Colette Braeckman

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