Lundi 4 octobre 2010 Par Cheik FITA
L'onde de choc provoquée par la mort d'Armand Tungulu à Kinshasa a secoué toute la communauté congolaise de l'étranger.
En Belgique, pays de résidence d'Armand, il n'y a pas suffisamment de qualificatifs pour décrire ce que les Congolais ont ressenti: colère ? Révolte?
Conséquence? Une manifestation spontanée est organisée le lundi 5 octobre 2010 à une dizaine de mètres de l’ambassade de la RD Congo à partir de 10heures.
Courageuse, Maman Philo l’épouse d’Armand est là. En signe de deuil, des femmes s’assoient par terre à côté d’elle afin de la soutenir moralement.
Dans les conversations, il ne fait l’ombre d’aucun doute : Armand Tungulu a été tué par la garde présidentielle. Et comme cette garde ne relève que du Président, c’est lui le responsable. Toute la colère déversée va en sa direction. Tous les qualificatifs sont utilisés pour désigner monsieur Joseph Kabila.
Un manifestant arrive même avec une effigie qui subit un sort pas agréable : piétiné, lapidé…
Une requête d’information adressée au Procureur Général de la République est lue.
Au fur et à mesure que le temps passe et que les manifestants arrivent, la tension monte.
Vers 12h30 alors que nous pensons la tension baissée, les manifestants débordent sur l’avenue Luxembourg, trajectoire d’un grand nombre de bus de la STIB. Le trafic est interrompu pour de longs moments.
La police essaie de négocier avec les manifestants, sans succès. Un peu plus tard, après quelques sommations de la police, sans succès, ordre est donné de repousser les manifestants, d’une façon assez musclée. Nous sommes ainsi pris en sandwich, bien encerclés. Enervements de part et d’autre…
Les proches d’Armand Tungulu ne seront pas inquiétés. Une tentative de rencontrer l’ambassadeur échoue.
Dispersés par la police, les manifestants se retrouvent plus tard au quartier Matonge de Bruxelles. La circulation des véhicules est interrompue sur la Chaussée de Wavre, des attroupements se forment, il est prié aux commerçants de fermer leurs boutiques, par solidarité avec Armand Tungulu.
Certains commerçants pakistanais ne semblent pas comprendre. C’est normal, ils ne sont pas au courant de l’actualité congolaise.
La police a bouclé le quartier. Les manifestants ont décidé de se rendre au Ministère belge des Affaires étrangères.
La police n’autorise qu’à une dizaine de personnes de traverser la ceinture policière. Accompagnée et encadrés par la police, ces délégués dont une moitié composée des membres de la famille se dirigent vers le Ministère des Affaires étrangères, sous bonne escorte policière.
Et là, nouvelle négociation pour entrer: dix personnes, c’est trop, trois peut-être.
Finalement, cinq personnes sont reçues par le monsieur Afrique, au nom du Ministre.
Le représentant du ministre présente ses condoléances à la famille et compatit à son malheur.
Il donne la parole tour à tour au représentant de la famille, au représentant des manifestants et enfin à l’avocat de la famille.
Dans l’exposé des congolais, les points suivants sont soulevés :
- Que s’est-il passé entre le moment où Armand a été arrêté et le moment où l’on a annoncé sa mort ?
- Où est le corps du défunt ?
- Pourquoi la famille n’est-elle pas informée et doit se contenter de ce qui se dit sur les médias ?
- Où est la preuve de son décès ?
Des demandes :
- L’autopsie doit se faire ici.
- Les enfants d’Armand étant belges, leurs droits doivent être protégés, ils doivent assister aux funérailles de leur papa. Pas au Congo parce que c’est le Congo qui leur a arraché leur papa.
- Pas d’inhumation précipitée. Cela signifierait soustraire le corps à une autopsie objective. Et surtout pas à Kinshasa. Sa famille est ici, et sa famille le réclame.
L’avocat de la famille informe le fonctionnaire belge qu’une plainte est en préparation.
Dans sa réponse, le fonctionnaire belge prend acte de toutes les informations transmises. Il reçoit pour le Ministre les mémos de la famille et des organisateurs de la manifestation.
Il nous informe que depuis le week-end, le ministère des affaires étrangères suit très attentivement l’évolution de la situation.
Il promet de rendre compte à son ministre.
Il est 16h43 quand la délégation prend congé du représentant du Ministre des affaires étrangères.
La tension n’étant pas encore tombée, il ne fait aucun doute que d’autres manifestations auront lieu. En tout cas, aussi longtemps que le corps d’Armand ne sera pas formellement identifié par son épouse …Ici en Belgique.
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