mardi 9 novembre 2010

Après une semaine cauchemardesque - Kikwit - Signaux inquiétants !

Kimp.
8 Novembre 2010


La ville de Kikwit a été partiellement pillée le vendredi 05 novembre, après que des milliers de jeunes aient passé la nuit de la veille dans les rues et les points stratégiques, afin de barrer la route aux assaillants que l'on disait retranchés dans la périphérie et accusés d'avoir assassiné trois militaires des FARDC au Camp Ebeya. Les émeutiers s'en sont pris aux commerces, mais aussi et surtout à tout ce qui incarne le « pouvoir » : résidences des autorités de la place, agence de la Banque Centrale du Congo, siège du PPRD (Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie), etc.
Cet élan de colère était la réponse, a-t-on appris, à ce qu'ils ont perçu comme étant l'indifférence des responsables de la territoriale, de l'armée, de la police et des services spécialisés à la situation d'insécurité dans laquelle ils étaient placés depuis plusieurs semaines. En effet, la population de Kikwit croit avoir fait sa part de travail, en signalant à qui de droit la présence, dans la brousse avoisinante, d'inconnus armés, manifestement animés de l'intention de perpétrer des forfaits.


Les événements de Kikwit devraient avoir valeur d'avertissement à l'endroit de tous ceux qui ont eu à gérer la « Cité » pendant quatre ans, et qui s'apprêtent à solliciter de nouveaux mandats électifs auprès du souverain primaire. Le rétablissement de l'autorité de l'Etat, de l'ordre et de la sécurité était au nombre des défis que s'était assigné, en 2007, le gouvernement de la République. Le fait que l'ennemi ait frappé au cÅ"ur de la 1ère Région Militaire, un site présumé hautement sécurisé, sans que la riposte puisse s'organiser rapidement pousse les observateurs à se poser des questions.
Le feuilleton meurtrier du Camp Ebeya fait réfléchir. En effet, le mardi 02 novembre, le gouverneur de province, Richard Ndambu, arrive en catastrophe à Kikwit, afin d'en savoir plus sur les rumeurs faisant état de la présence, dans la périphérie, d'hommes armés non identifiés. Que reçoit-il comme informations en rapport avec la situation sécuritaire de cette partie de sa province ? Nul ne le sait. Toujours est-il qu'avant de remettre le cap sur Bandundu/ville, le siège des institutions provinciales, il lance des appels au calme en direction de ses administrés. Apparemment, la « situation est sous contrôle », selon l'expression consacrée.
Mais, quelques heures après son départ, les armes crépitent au Camp Ebeya. Trois vaillants combattants des FARDC sont sur les carreaux. Des armes et des munitions sont emportées par les assaillants. La population, indignée et lasse d'attendre une réaction de l'armée et de la police, décide de se prendre en charge, en montant des milices d'autodéfense.


Question : où sont passés les services de renseignements civils et militaires face aux infiltrations signalées de longue date par les habitants de Kikwit ? Pourquoi les forces de l'ordre et de sécurité n'ont-elles pas agi pendant 72 heures (de mardi soir à vendredi ? Avait-on donné la bonne « information » au gouverneur Ndambu ? Dans la négative : qui a fait la rétention de l'information et pourquoi ?
On était tenté de croire que l'autorité provinciale n'était pas suffisamment renseignée. Autrement, elle ne serait pas rentrée tranquillement à Bandundu/ville. Pourquoi le dispositif de sécurité de Kikwit n'a-t-il pas fonctionné ?
Les « barrières » payeraient-elles mieux ?
Le fleuve Congo et la Nationale numéro 1, entre Kinshasa et Kikwit, sont les voies nationales les mieux dotées en barrières anarchiques. Le rançonnement des embarcations et des véhicules est devenu le sport favori des hommes en uniforme et des agents de sécurité. En dépit des mesures du gouvernement central et de l'exécutif provincial portant suppression de ces goulots d'étranglement des sources d'approvisionnement de la ville de Kinshasa en denrées alimentaires locales et de l'arrière-pays en produits manufacturés, rien ne change.


Nos compatriotes chargés de la sécurité des personnes et de leurs biens dans la province de Bandundu en général et dans la ville de Kikwit en particulier seraient-ils si pris par leurs activités de racolage des bateaux, baleinières et véhicules qu'ils n'auraient plus le temps de répondre à leur mission naturelle de défense du territoire ?
Ce qui vient de se passer à Kikwit est un signal inquiétant en matière de sécurité, pour cette ville comme pour Kinshasa, située certes à 600 kilomètres mais que l'on peut joindre en moins de 6 heures de route.
Interpellation
Les événements de Kikwit sont une interpellation pour l'armée et la police nationale, les services de sécurité, la classe politique, les Congolais dans leur ensemble. Ils rappellent à tous que le pays n'a pas fini de construire sa paix et sa sécurité. Il s'agit particulièrement d'une alerte en rapport avec les ratés du système national de défense. Comme à Mbandaka au mois d'avril de l'année en cours, les autorités civiles et militaires, nationales comme provinciales, en sont à subir les événements, alors que l'opportunité d'anticiper était là. Que se passe-t-il dans le dispositif de sécurité de nos villes et villages pour que ceux-ci subissent d'abord la loi de l'ennemi, même réduit à la portion congrue, avant de réagir sur le tard ?

On pensait que le pays avait tiré les leçons de l'attaque des Enyele. Le sentiment du moment est qu'une fois de plus, on en est à rechercher des coupables dans une ambiance de nature à tourner à la chasse aux sorcières, aux règlements de comptes.
Autre interpellation : les Congolais regardent-ils tous dans la même direction, à la veille des échéances politiques de 2011 - 2013 ? Les événements de Kikwit et de Mbandaka, associés aux bruits de bottes que font entendre le CNDP et plusieurs groupes armés à l'Est du pays, ne sont pas de nature à rassurer la communauté nationale que la culture de l'alternance démocratique au pouvoir existe. Après le feu jaune d'avril 2010 et maintenant celui de novembre 2010, il serait imprudent, pour les gestionnaires du dossier de Kikwit, de s'arrêter aux effets de la tuerie du Camp Ebeya et des émeutes populaires de vendredi.

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