lundi 24 janvier 2011

Kigali et le nouvel alibi


L’éternel argument du génocide a fait tellement recette que le Rwanda est en train d’innover dans sa stratégie pour recevoir une fois de plus le soutien - par compassion certainement - de la communauté internationale.Dans ses différentes révélations diffusées sur la toile, le célèbre site WikiLeaks avait livré ce qui serait comme enjeux clés de la diplomatie américaine dans la sous-région des Grands Lacs. Au nombre des cibles prioritaires des Etats-Unis dans cette région troublée de l’Afrique centrale figurait en bonne place le déploiement d’une action sous-régionale pour freiner l’expansion de l’intégrisme musulman.
Fin stratège, le Rwanda a saisi la balle au bond pour se faire valoir vis-à-vis des Américains.
Tout récemment à Kigali, le gouvernement rwandais, qui se connaît bien dans ce genre de marketing politique, a réuni différents ministres de la Défense des pays des Grands Lacs pour les faire adhérer à sa nouvelle stratégie.
Ainsi, pour le Rwanda, l’alibi en béton qui lui a valu depuis une dizaine d’années le soutien sans faille de la communauté internationale a fait son temps. Le temps est venu de lui trouver une pièce de rechange.
Or, en Irak tout comme en Afghanistan, les Etats-Unis, avec le soutien des pays alliés, se battent pour neutraliser ce qui passe pour le bastion du terrorisme mondial.
D’une certaine manière, la mise en place en Afrique par le gouvernement américain de l’Africom se justifie, entre autres, par la nécessité d’estomper l’émergence de l’intégrisme musulman dans le continent noir.
Aussi, pour l’administration américaine, le bourbier somalien où des intégristes musulmans ont pratiquement pris en otage la corne de l’Afrique ne devait-il pas s’étendre sur le reste du continent. D’où, l’intense activité de sa diplomatie pour éviter à ce que les pays fragiles de des Grands Lacs - généralement post-conflits - ne soient attirés par le charme des groupes terroristes.
Kigali a su capter le message. Le voilà qui recadre son action de marketing international – conscient du fait que le génocide ne porte plus dans le cœur de la communauté internationale.
Fini le temps où l’argument du génocide passait pour un fonds de commerce pour mériter de l’attention toute particulière de la communauté internationale.
Par le fait de l’usure et de l’obsolescence, le génocide ne fait plus vendre. Aussi, Kigali a-t-il trouvé mieux de se servir de la thèse qui fédère ; celle sur laquelle Américains et Européens se sentent liés : la montée de l’intégrisme musulman.
En embarquant les autres pays dans son schéma, Kigali joue une carte qui n’est pas forcément celle de ses voisins des Grands Lacs.
Chancelant, le régime de Kigali cherche à se reprendre du poil de la bête. Il a donc choisi la voie idéale pour y parvenir, en faisant voir à la communauté internationale qu’il est le seul, par la puissance de son armée, de jouer le jeu en vue de mettre en péril le projet des intégristes musulmans dans les Grands Lacs.
Est-ce qu’en se faisant inviter à Kigali, Kinshasa a-t-il su décrypter le message caché de Kigali ?
Kinshasa doit éviter d’être de nouveau le dindon de la farce dans le jeu macabre de Kigali.
L’expérience malheureuse des opérations conjointes de traque des éléments des FDLR menées - sans succès d’ailleurs, selon International Crisis Group - dans les Nord et Sud-Kivu, doit lui servir de signal d’alerte.

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