samedi 1 juin 2013

Nouvelles expulsions violentes d’Angola de Congolais sans papier



Près de 50 000 Congolais sans papiers ont été violemment expulsés d’Angola ces derniers mois. Arrivés les mains vides, ils vivent de la charité en attendant une aide qui ne vient pas. La plupart d’entre eux compte repartir dans ce pays sans chercher cependant à régulariser leur situation. Jusqu’à la prochaine expulsion.

Autour d’un feu qu’ils ont maintenu allumé toute la nuit tant il fait très frais en ce début de saison sèche au Katanga, Bob et ses cinq collègues se réchauffent à leur réveil ce matin de mai.

Ils ont passé la nuit dehors à côté d’une Eglise de réveil dans la cité de Kapanga, au nord du Katanga. Arrivés début mai d’Angola d’où ils ont été expulsés pour séjour irrégulier, ils sont rentrés au pays sans rien et vivent de la charité des habitants.

« Tous les sans-papiers avaient jusqu’au 15 mai pour quitter volontairement l’Angola. Mais avant cette date, la police nous traquait déjà violemment. Nous avons été brutalisés et dépouillés sur la route avant d’être conduits directement à la frontière sans rien », raconte Bob qui a séjourné en Angola pendant six ans. 
Il vient du Bandundu, sa province d’origine, et travaillait comme boulanger à Lunda Norte (Angola).

« J’avais même déjà fait des petites économies pour mon mariage, tout est resté », regrette-t-il.

Son collègue Paul qui y exerçait comme cordonnier, s’indigne que rien ne soit fait pour accueillir des Congolais qui retournent chez eux.

« Nous avons été accueillis à l’arrivée par les Eglises de la place. Mais deux jours après, raconte-t-il, les responsables de ces Eglises nous ont demandé de laisser la place aux autres expulsés qui venaient après nous. Depuis, nous ne savons où dormir et nous nous débrouillons pour manger ».

Risque d’insécurité et d’épidémie

Le territoire de Kapanga, frontalier avec les zones minières d’Angola, accueille depuis des années des expulsés congolais originaires de différentes provinces. Mais cette fois-ci, leur nombre a fortement augmenté, fait savoir Claude Mbaya, membre de la société civile locale.

Selon les quelques structures qui s’occupent de ces expulsés, ils seraient déjà 50 000 a avoir regagné les provinces du Katanga, les deux Kasaï et le Bandundu frontalières avec l’Angola depuis ces deux derniers mois. « Si aucune disposition n’est prise, le territoire de Kapanga sera en proie à l’insécurité et aux épidémies », prévient Mbaya.

Selon les sources de l’hôpital général de Kapanga, depuis début mai, 48 femmes violées selon elles par la police angolaise se sont présentées pour suivre des soins. Et le nombre de femmes victimes des violences sexuelles augmente avec les nouvelles arrivées, témoigne un des responsables de cet hôpital.

« Ces expulsions se font sans aucun respect des droits de l’homme », s’indigne de son côté Donatien Ngoy, administrateur du territoire de Kapanga. Le gouvernement congolais devait mettre en place des structures d’accueil pour ces expulsés ».

Plusieurs voix se sont déjà élevées pour dénoncer la violence avec laquelle ces Congolais sont chassés. Ivan Simonovic, sous-secrétaire des Nations unies aux droits de l’homme a condamné ces expulsions lors de sa visite en RDC le 10 mai dernier. Il s’agit selon lui « d’une violation de la loi internationale sur la protection des immigrants en situation irrégulière ».

Se mettre en règles dans le pays d’accueil

Mais en dépit des violences qui accompagnent ces expulsions devenues récurrentes ces dix dernières années, de nombreux expulsés jurent toujours de rentrer vivre en Angola.

« Là au moins je sais me trouver facilement de l’argent pour payer le loyer, prendre mon lait le matin et me nourrir sans problème pendant le mois », se rappelle Rufin, un creuseur de diamant dans une mine angolaise.

« Ils vont chercher ailleurs ce qu’ils n’ont pas trouvé chez eux, explique un responsable d’Eglise à Kapanga. Mais seulement ils devraient se mettre en ordre avec le pays qui les accueille. Pour l’instant, les gouvernements angolais et congolais devaient s’arranger afin d’organiser le retour de ces Congolais sans violence ».

La plupart de ces expulsés retournent en Angola dès que la situation s’est calmée mais rares sont ceux qui pensent régulariser leur situation au pays d’accueil afin de se mettre à l’abri des ennuis.

 « Ils remettent toujours à plus tard de se mettre en règle, témoigne Rufin. Quand tout est calme, ils oublient et sont surpris à chaque fois qu’on les expulse ».

Maurice Mulamba 
(Syfia Grands Lacs/RD Congo)

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