lundi 10 juin 2013

Quand «Joseph Kabila» prend les Congolais pour des imbéciles


Le tyranneau "Joseph Kabila"

«Pour diriger sa Commission électorale nationale indépendante, le Congo-Kinshasa ne peut choisir qu’entre un certain Daniel Mulunda Ngoy et Apollinaire Malu Malu, deux personnages controversés ?

Ce grand pays tombe ainsi de Charybde en Scylla ?». L’homme qui parle ainsi est un Béninois. Il se prénomme «Olivier».

Le Bénin a été le premier pays d’Afrique francophone à concevoir un mécanisme original destiné à résoudre, par le dialogue, la crise de régime à laquelle il faisait face au début des années 90. Il s’agit de la «Conférence nationale souveraine» (CNS). Une sorte "d’arbre à palabre".

Les conférenciers avaient un seul objectif : l’instauration d’un nouveau type de rapports, empreints d’écoute et de respect mutuel, entre l’Etat et les citoyens. L’Etat de droit, tenait lieu de «moyen» avec en toile de fond deux thèmes majeurs : la démocratie - impliquant notamment la séparation des Pouvoirs - et le respect des droits de l’Homme.

Le «modèle béninois» a fait tache d’huile dans plusieurs pays francophones du continent. C’est le cas notamment de l’ex-Zaïre, rebaptisé République démocratique du Congo.

C’est avec une certaine incrédulité que les Congolais de Kinshasa ont appris la désignation du très sulfureux abbé Apollinaire Malu Malu à la tête de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

D’aucuns n’ont pas hésité à qualifier ce retour «à la Zorro» comme une gifle que l’actuel locataire du Palais de la nation a décidé d’infliger à un peuple congolais résigné, prêt à tendre la joue gauche après avoir été frappé sur la joue droite. D’autres parlent «de démonstration, par Joseph Kabila, de son mépris à l’égard de tout un peuple».

La nomination de «Monsieur l’Abbé» Malu malu a tout l’air d’un test. Un ballon d’essai destiné à jauger jusqu’où peut aller la capacité d’indignation des citoyens congolais. On peut gager qu’à défaut d’une vive réaction populaire, le pouvoir kabiliste pourrait multiplier d’autres initiatives «audacieuses».

But : obtenir la révision de la Constitution pour permettre à l’actuel chef de l’Etat de rempiler pour un troisième mandat en 2016. Ce n’est nullement un procès d’intention.

«Joseph Kabila» a toujours considéré le pouvoir d’Etat comme un "butin de guerre". Il n’a jamais cessé de confier à des journalistes que «nous avons pris des risques pour nos vies en combattant le président Mobutu par les armes». Il est donc décidé à s’accrocher au pouvoir. Et pourquoi pas mourir au pouvoir?

Lors des élections générales de 2006, Malu Malu avait dirigé de manière chaotique - c’est un euphémisme - la défunte CEI (Commission électorale indépendante). L’homme avait démontré à l’époque son «talent» de tripatouilleur des résultats électoraux au profit du président sortant et de son clan.

Malu Malu a été littéralement chassé de la CEI sous la clameur des observateurs tant nationaux que internationaux.

"J’ai accepté l’inacceptable", déclarait Jean-Pierre Bemba, le challenger. Celui-ci sous-entendait qu’il a été soumis à des pressions insupportables pour ne pas revendiquer une victoire attribuée à "Joseph Kabila", qui était, à l’époque, le chouchou des "Occidentaux".

Malu Malu et son prédécesseur Daniel Mulunda Ngoy n’ont jamais fait mystère de leur sympathie à l’égard de «Joseph Kabila» autant que de leur appartenance à la mouvance kabiliste dite «Majorité présidentielle» (MP).

Faut-il rappeler que Mulunda est co-fondateur du parti présidentiel (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie). Lors du dialogue intercongolais, à Sun City, en Afrique du Sud, Mulunda et Malu Malu faisaient partie de la délégation du gouvernement en tant qu’«experts».

Depuis le 9 décembre dernier, le second dirige le groupe d’experts du gouvernement aux pourparlers de Kampala avec les rebelles du M23. En dépit de ces réalités, "Abbé Apollinaire" continue à revendiquer son appartenance à la société civile. Sans doute, de la "société civilement politique", comme ironisent les Kinois.

La désignation de Malu Malu à la tête de CENI est une injure grave pour le peuple congolais. Cet acte sonne comme un immense gâchis. Un recul. C’est un mauvais signal envoyé en direction de la toute «jeune démocratie congolaise».

Cet homme - dont la corruptibilité a franchi les frontières nationales - n’est pas celui qu’il faut pour assurer une supervision impartiale d’un processus électoral. Encore moins de garantir la liberté et l’équité des élections.

La «démocratie congolaise» marche plus que jamais à reculons.

Le vote n’est pas seulement l’occasion de choisir les nouveaux gouvernants. C’est aussi un moyen, pour le citoyen, d’exiger des comptes aux "sortants" en sanctionnant ceux qui se sont révélés incapables de répondre aux aspirations de la population à un mieux-être.

Lors des «consultations nationales» initiées, de Janvier à mars 1990, par le président Mobutu Sese Seko, les Zaïrois d’alors avaient bruyamment rejeté l’arbitraire du parti-Etat. Ils avaient fustigé le népotisme, le favoritisme, le tribalisme, la corruption, la gabégie et les violations des droits humains.

Dans son discours du 24 avril 1990, le président Mobutu annonçait la restauration du pluralisme politique. Lors des travaux de la CNS (1991-1992), les «conférenciers» avaient levé l’option en faveur de l’avènement d’un nouvel ordre politique fondé sur la démocratie et le respect des droits humains.

Lors de la prise du pouvoir par l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre), en mai 1997, LD Kabila et ses «amis» commettaient le «péché originel» en passant, par pertes et profits, les résolutions de la CNS.

Une incapacité de lire les signes de temps mais aussi l’Histoire immédiate du pays. Cette outrecuidance ne lui apportera pas le bonheur. La suite est connue.

Lors de la signature de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka, fin juillet 1999, les participants (Gouvernement, RCD et MLC) n’avaient pas manqué de réaffirmer la nécessité de promouvoir un nouvel un nouvel ordre politique ayant la démocratie et le respect des droits comme socles.

Cette résolution sera institutionnalisée lors du Dialogue intercongolais à Sun City, en Afrique du Sud. Le 18 février 2006, «Joseph Kabila» promulguait la nouvelle Constitution. Hélas, le renouveau escompté tarde à poindre à l’horizon.

Depuis 2006 à ce jour, le pluralisme politique consacré dans la nouvelle charte fondamentale reste un simple «idéal». Il en est de même des droits et libertés du citoyen. L’armée, la police et les services de renseignements se comportent en milices du régime.

Pire, les autres institutions nationales sont phagocytées par le Pouvoir exécutif en général et le Président de la République en particulier. Celui-ci exerce un pouvoir sans contrôle. Omnipotent, l’homme semble rêver d’une «présidence à vie». Plus rien ne l’arrête. Adieu donc l’alternance.

L’Accord-Cadre signé le 24 février dernier à Addis-Abeba "demande" au gouvernement congolais notamment de « promouvoir la réconciliation nationale, la tolérance et la démocratisation».

En douze années d’exercice d’un pouvoir solitaire, «Joseph Kabila» a prouvé qu’il est allergique à la démocratie ainsi qu’aux valeurs humanistes que sont notamment la justice, la liberté et l’égalité.

Chez lui, tout se résume en rapports de force. Il ne respecte que les adversaires qui lui tiennent tête.

Jusqu’à quand les Congolais vont-ils subir l’avenir au lieu de le façonner à l’instar d’autres peuples? Le retour de Malu Malu aux affaires est constitutif de provocation. Aussi, doivent-ils réagir vigoureusement en exerçant leur droit sacré à résister à l’oppression.

Il s’agit de "stopper" un tyranneau autiste, rendu fou par le pouvoir. Un tyranneau qui considère le peuple congolais comme une bande d’imbéciles...

Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

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