L’offensive des soldats
congolais aux abords de Goma, lancée dimanche dans l’est du pays, a fait
plus d’une centaine de morts. (Photo AFP)
Analyse Revigorées depuis la trêve de décembre, les forces loyalistes ont repris leur marche sur les rebelles du M23, près du Rwanda.
Dans les deux Kivu, à l’extrême est de la
république démocratique du Congo (RDC), la paix ne dure jamais bien
longtemps. Ainsi la trêve décrétée en décembre n’aura duré qu’à peine
sept mois.
Le temps, pour le régime de Kinshasa, de faire semblant de négocier avec les rebelles tutsis congolais du M23 tout en se réarmant activement.
Alors que l’opposition politique se fait entendre à Kinshasa, la reprise du conflit dans l’est du pays n’est peut-être pas tout à fait le fruit du hasard. Car, aux yeux des Congolais, qui dit Kivu dit Rwanda - le petit voisin honni par une bonne partie de la population.
Lourdes pertes. Dimanche, les Forces armées de la république démocratique du Congo (FARDC) sont passées à l’offensive pour repousser les hommes du M23 des abords de Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu.
En novembre, ces rebelles fortement soupçonnés par les experts de l’ONU d’être soutenus par le Rwanda et l’Ouganda s’étaient brièvement emparés de la ville située sur le lac Kivu, avant de s’en retirer sous la pression internationale.
Des pourparlers entre les deux parties avaient ensuite démarré à Kampala, la capitale de l’Ouganda. Sans résultat tangible jusqu’ici.
Très violents, les combats auraient fait plus d’une centaine de morts. Les forces loyalistes affirment avoir infligé de lourdes pertes à leurs ennemis. Ces derniers, en mal de munitions, seraient en grande difficulté.
«Pendant que les pseudo-négociations s’enlisaient à Kampala, Kinshasa a massé des troupes dans les
Kivu et préparé un plan d’encerclement du M23 avec l’aide de milices hutues récemment créées», explique Thierry Vircoulon, expert de l’ONG International Crisis Group (ICG).
Ces derniers jours, les Forces armées de la RDC ont fait montre d’une détermination inédite. Lors des précédentes poussées de fièvre, elles avaient plutôt l’habitude de s’enfuir, avec femmes et enfants, pillant tout sur leur passage. Mais pas cette fois.
Suite aux revers cuisants infligés par le M23 aux troupes loyalistes, Kinshasa a nommé un nouveau chef d’état-major, apparemment plus regardant que son prédécesseur sur le versement des soldes et sur l’approvisionnement de ses hommes.
Le gouvernement de Kinshasa a aussi acquis de nouveaux matériels de guerre dans les pays d’Europe de l’Est, notamment en Bulgarie.
En desserrant l’étau sur Goma, le gouvernement de Joseph Kabila poursuit aussi un objectif politique, selon Thierry Vircoulon : revenir à la table des négociations de Kampala après avoir inversé le rapport de forces.
«Fondamentalement, ce que veulent les Congolais, c’est négocier avec le Rwanda, qu’ils considèrent comme le vrai patron du M23», ajoute-t-il.
Tir de barrage. Le pouvoir de Kinshasa n’est pas le seul à le penser. A l’automne, un rapport établi par un panel d’experts de l’ONU avait fuité dans la presse, mettant durement en cause Kigali, mais aussi Kampala, pour son soutien actif aux rebelles du M23.
Le régime de Paul Kagame avait énergiquement démenti, mais le mal était fait. Plusieurs bailleurs de fonds - dont le Royaume-Uni, un allié stratégique depuis le génocide de 1994 - avaient décidé de suspendre leur aide financière à ce petit pays dépourvu de ressources.
Même les Etats-Unis, pourtant bien disposés à l’égard de Kagame, avaient tapé du poing sur la table.
Depuis ce tir de barrage, le Rwanda fait profil bas, ce qui pourrait expliquer l’affaiblissement du M23, par ailleurs miné par des querelles internes.
Mais Kigali peut-il laisser ses alliés dans les Kivu se faire laminer ?
Depuis près de vingt ans, la politique de Paul Kagame n’a pas varié : en s’appuyant sur des relais locaux, le Rwanda s’adjuge une zone tampon destinée à renforcer sa sécurité face à des groupes hutus toujours actifs, tout en profitant des ressources minières et agricoles dont regorgent les Kivu.
«Kigali est coincé, confie une source proche du dossier. S’il bouge, il va s’attirer les foudres des Occidentaux. S’il ne fait rien, il perd ses positions acquises de longue date au Congo.»
Exaspéré, le Rwanda s’en est pris ces derniers jours à l’ONU, qu’il accuse d’avoir prêté main-forte aux troupes congolaises et même d’avoir bombardé deux villages situés sur la frontière.
Pourtant, jusqu’ici, la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) s’est bien gardée d’intervenir directement dans ce nouveau conflit. Forte de ses 17 000 hommes - ce qui en fait la principale mission de l’ONU dans le monde -, la Monusco est en train de mettre sur pied une brigade d’intervention de 3 000 hommes, dotée d’hélicoptères d’attaque.
Avec un mandat qui ne se réduit pas à la protection des populations civiles, mais l’autorise à passer à l’attaque contre les groupes armés. Or, dans les Kivu, ils sont loin de se limiter au M23.
Libération.fr
Le temps, pour le régime de Kinshasa, de faire semblant de négocier avec les rebelles tutsis congolais du M23 tout en se réarmant activement.
Alors que l’opposition politique se fait entendre à Kinshasa, la reprise du conflit dans l’est du pays n’est peut-être pas tout à fait le fruit du hasard. Car, aux yeux des Congolais, qui dit Kivu dit Rwanda - le petit voisin honni par une bonne partie de la population.
Lourdes pertes. Dimanche, les Forces armées de la république démocratique du Congo (FARDC) sont passées à l’offensive pour repousser les hommes du M23 des abords de Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu.
En novembre, ces rebelles fortement soupçonnés par les experts de l’ONU d’être soutenus par le Rwanda et l’Ouganda s’étaient brièvement emparés de la ville située sur le lac Kivu, avant de s’en retirer sous la pression internationale.
Des pourparlers entre les deux parties avaient ensuite démarré à Kampala, la capitale de l’Ouganda. Sans résultat tangible jusqu’ici.
Très violents, les combats auraient fait plus d’une centaine de morts. Les forces loyalistes affirment avoir infligé de lourdes pertes à leurs ennemis. Ces derniers, en mal de munitions, seraient en grande difficulté.
«Pendant que les pseudo-négociations s’enlisaient à Kampala, Kinshasa a massé des troupes dans les
Kivu et préparé un plan d’encerclement du M23 avec l’aide de milices hutues récemment créées», explique Thierry Vircoulon, expert de l’ONG International Crisis Group (ICG).
Ces derniers jours, les Forces armées de la RDC ont fait montre d’une détermination inédite. Lors des précédentes poussées de fièvre, elles avaient plutôt l’habitude de s’enfuir, avec femmes et enfants, pillant tout sur leur passage. Mais pas cette fois.
Suite aux revers cuisants infligés par le M23 aux troupes loyalistes, Kinshasa a nommé un nouveau chef d’état-major, apparemment plus regardant que son prédécesseur sur le versement des soldes et sur l’approvisionnement de ses hommes.
Le gouvernement de Kinshasa a aussi acquis de nouveaux matériels de guerre dans les pays d’Europe de l’Est, notamment en Bulgarie.
En desserrant l’étau sur Goma, le gouvernement de Joseph Kabila poursuit aussi un objectif politique, selon Thierry Vircoulon : revenir à la table des négociations de Kampala après avoir inversé le rapport de forces.
«Fondamentalement, ce que veulent les Congolais, c’est négocier avec le Rwanda, qu’ils considèrent comme le vrai patron du M23», ajoute-t-il.
Tir de barrage. Le pouvoir de Kinshasa n’est pas le seul à le penser. A l’automne, un rapport établi par un panel d’experts de l’ONU avait fuité dans la presse, mettant durement en cause Kigali, mais aussi Kampala, pour son soutien actif aux rebelles du M23.
Le régime de Paul Kagame avait énergiquement démenti, mais le mal était fait. Plusieurs bailleurs de fonds - dont le Royaume-Uni, un allié stratégique depuis le génocide de 1994 - avaient décidé de suspendre leur aide financière à ce petit pays dépourvu de ressources.
Même les Etats-Unis, pourtant bien disposés à l’égard de Kagame, avaient tapé du poing sur la table.
Depuis ce tir de barrage, le Rwanda fait profil bas, ce qui pourrait expliquer l’affaiblissement du M23, par ailleurs miné par des querelles internes.
Mais Kigali peut-il laisser ses alliés dans les Kivu se faire laminer ?
Depuis près de vingt ans, la politique de Paul Kagame n’a pas varié : en s’appuyant sur des relais locaux, le Rwanda s’adjuge une zone tampon destinée à renforcer sa sécurité face à des groupes hutus toujours actifs, tout en profitant des ressources minières et agricoles dont regorgent les Kivu.
«Kigali est coincé, confie une source proche du dossier. S’il bouge, il va s’attirer les foudres des Occidentaux. S’il ne fait rien, il perd ses positions acquises de longue date au Congo.»
Exaspéré, le Rwanda s’en est pris ces derniers jours à l’ONU, qu’il accuse d’avoir prêté main-forte aux troupes congolaises et même d’avoir bombardé deux villages situés sur la frontière.
Pourtant, jusqu’ici, la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) s’est bien gardée d’intervenir directement dans ce nouveau conflit. Forte de ses 17 000 hommes - ce qui en fait la principale mission de l’ONU dans le monde -, la Monusco est en train de mettre sur pied une brigade d’intervention de 3 000 hommes, dotée d’hélicoptères d’attaque.
Avec un mandat qui ne se réduit pas à la protection des populations civiles, mais l’autorise à passer à l’attaque contre les groupes armés. Or, dans les Kivu, ils sont loin de se limiter au M23.
Libération.fr
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