13/06/2015
Congolais expulsés d'Angola
Partout où ils sont, les Congolais sont mal vus. Ils y sont perçus comme des pestiférés, et chassés comme de vulgaires chiens de rue. La raison officielle que tous ces pays avancent est l’immigration clandestine.
Nos compatriotes y vivent donc en situation irrégulière.
Seul le Congo-Brazzaville a une raison supplémentaire qu’il brandit : l’insécurité. L’histoire ne doit pas être oubliée. L’Angola est un pays qui sort de la guerre.
Et, comme chacun le sait, toute guerre produit inévitablement des déplacements humains et des réfugiés. Mais c’était pire pour l’Angola car, avant la guerre fratricide entre les trois factions rivales, il y a d’abord eu la lutte que ces trois mouvements, Unita de Jonas Malhiero Savimbi, MPLA d’Agostino Neto et FNLA d’Holden Roberto, ont menée pour l’affranchissement de leur pays du joug portugais.
On se souviendra que l’Angola est l’un des derniers pays africains à devenir indépendant. Jusqu’au 11 novembre 1975, donc, un nombre incalculable d’Angolais avait fui ce pays.
Et, dans leur grande majorité, les Angolais avaient trouvé refuge en RDC, pour des raisons de proximité, mais également familiales. Ils y sont restés à l’aise des dizaines d’années durant, ont étudié, entrepris du commerce (leur spécialité), circulé partout dans le pays, dans les mêmes conditions que les Congolais.
Certains d’entre eux ont occupé des fonctions très élevées dans la sphère politique congolaise. On ne nous dira pas que tous avaient un séjour régulier !
L’information est sur toutes les bouches : 8.000 Congolais viennent d’être expulsés d’Angola en l’espace de cinq mois. Raison évoquée : séjour irrégulier. Si la nouvelle provoque regret, incompréhension et révolte, elle n’a cependant surpris aucun Congolais.
C’est chaque année que l’on expulse les Congolais de l’Angola, du Congo-Brazzaville et de l’Afrique du Sud.
La reconduite des étrangers à la frontière est une pratique normale, bien connue et universelle. Tout pays a le plein droit de reconduire à la frontière tout citoyen d’un pays étranger à qui il reproche un certain nombre de faits.
Il peut s’agir d’une entrée frauduleuse dans ce territoire, du fait d’y vivre en situation irrégulière, ou encore des abus que cet étranger y commet et qui, au regard des dispositions légales régissant ce pays, en font une personae non grata.
Cependant, la communauté internationale a établi des règles qui doivent être respectées dans l’application de ces dispositions. On reconduit une personne à la frontière dans le respect de la personne humaine.
Dans l’expulsion des étrangers, particulièrement africains, l’Europe a aussi commis quelques bévues, dont certaines ont eu des conséquences fatales, comme le cas de Samira Adamou, la jeune nigériane qui avait trouvé la mort il y a quelques années suite à un traitement coriace de la police d’un pays européen.
Mais c’est en Afrique même qu’il y a un mépris total de la personne humaine, surtout, ô paradoxe !, si la personne à expulser est africaine.
Que ce soit en Angola, au Congo Brazza ou en RSA, les Congolais ont toujours été humiliés, dans leur chair comme dans leur âme, de façon incompréhensible.
Pourquoi sont-ils toujours battus lorsqu’ils doivent être expulsés ? L’année passée, on a même vu des images insoutenables qui sont venues de Brazzaville.
A quoi rime cette barbarie ?
Qu’est-ce qui empêche ces pays de reconduire humainement, quoique fermement, les Congolais dont ils ne veulent pas ? Et pendant ce temps, en Afrique du Sud, d’autres Congolais étaient brimés, voire brûlés.
Aujourd’hui, ce sont plus de 8.000 Congolais qui sont expulsés d’Angola, pendant que d’autres Congolais sont en train de l’être au Congo d’en face. En 2013, ces expulsions avaient atteint le summum avec plus de 52.000 Congolais chassés d’Angola.
L’histoire ne doit pas être oubliée. L’Angola est un pays qui sort de la guerre. Et, comme chacun le sait, toute guerre produit inévitablement des déplacements humains et des réfugiés.
Mais c’était pire pour l’Angola car, avant la guerre fratricide entre les trois factions rivales, il y a d’abord eu la lutte que ces trois mouvements, Unita de Jonas Malhiero Savimbi, MPLA d’Agostino Neto et FNLA d’Holden Roberto, ont menée pour l’affranchissement de leur pays du joug portugais.
On se souviendra que l’Angola est l’un des derniers pays africains à devenir indépendant. Jusqu’au 11 novembre 1975, donc, un nombre incalculable d’Angolais avait fui ce pays.
Et, dans leur grande majorité, les Angolais avaient trouvé refuge en RDC, pour des raisons de proximité, mais également familiales. Ils y sont restés à l’aise des dizaines d’années durant, ont étudié, entrepris du commerce (leur spécialité), circulé partout dans le pays, dans les mêmes conditions que les Congolais.
Certains d’entre eux ont occupé des fonctions très élevées dans la sphère politique congolaise. On ne nous dira pas que tous avaient un séjour régulier !
Evidemment, le doigt accusateur doit être retourné vers nous-mêmes. Les frontières congolaises sont poreuses. Les gens entrent et ressortent comme ils veulent.
Si aujourd’hui, les Congolais n’ont pas de carte d’identité, sous la 2ème République, c’est n’importe quoi qui se faisait car des étrangers se procuraient ces cartes en l’espace de quelques minutes. La corruption généralisée aidant, quelques billets de banque arrangeaient tout.
Il s’agit donc d’une défaillance politico-administrative. Les compatriotes qui vivent en Angola nous racontent bien les difficultés auxquelles sont butés les étrangers pour se doter des documents de résidence. Les Angolais sont très pointilleux là-dessus. Voilà pourquoi les irréguliers congolais ne peuvent que s’y sentir mal à l’aise.
Rester au pays ?
Avant, on était habitué à apprendre les défections des sportifs, des danseuses et des musiciens. C’était même devenu routinier.
Chaque fois qu’une équipe de sport voyageait pour l’Europe pour un stage ou pour participer à une compétition, l’exception était que cette équipe rentre au pays au grand complet. Car même certains dirigeants n’hésitaient pas à fausser compagnie au reste de la délégation.
Mais on trouvait le plus de défection dans les groupes musicaux. Une certaine, et difficilement compréhensible politique veut, en effet, que les pays européens, surtout ceux de l’Europe occidentale, octroient facilement des visas aux musiciens, tout en décourageant les chercheurs, les étudiants et les scientifiques d’une manière générale.
Pour y aller quand même, plusieurs Congolais s’étaient mis à se transformer ingénieusement en musiciens, juste le temps d’arriver à la terre promise.
On a même vu des intellectuels respectables se coiffer drôlement avec, comme cerise sur le gâteau, une teinte sur les cheveux, et s’habiller comme des musiciens de foire, afin de se faire passer pour de vrais musiciens avec lesquels ils voyageaient.
Les leaders des orchestres se sont délectés de cette opportunité qui leur était ainsi offerte. D’où la naissance du phénomène ngulu. Ces chefs d’orchestre multipliaient des voyages en Europe, et même en Amérique du Nord, car, ce faisant, ils gagnaient doublement.
Parmi ceux qui arrivent à disposer de moyens relativement conséquents, ceux qui ne peuvent pas traverser la Méditerranée se résolvent à tourner les regards vers le sud du continent.
Ceux qui sont dépourvus de moyens se rabattent sur les pays frontaliers. L’Angola et le Congo Brazzaville sont ainsi devenus des nouveaux eldorados.
Des pestiférés ?
Partout où ils sont, les Congolais sont mal vus. Ils y sont perçus comme des pestiférés, et chassés comme de vulgaires chiens de rue.
La raison officielle que tous ces pays avancent est l’immigration clandestine. Nos compatriotes y vivent donc en situation irrégulière. Seul le Congo Brazzaville a une raison supplémentaire qu’il brandit : l’insécurité.
D’après ce pays, les RDCongolais importent dans leur pays, qui serait une oasis de paix profonde et une terre sainte, le banditisme urbain et la prostitution.
La méchanceté (il faut bien que le chat soit appelé par son nom) des Congolais d’en face vis-à-vis de leurs frères de la rive gauche du fleuve Congo ne date pas d’aujourd’hui.
Personne, là-bas comme ici, n’a déjà oublié qu’il y a quelques décennies, un slogan célèbre là-bas disait qu’entre un » Zaïrois » et un serpent, il fallait tuer le premier et épargner le second.
Lorsqu’on sait qu’en dehors de sa nocivité, le serpent est également un animal maudit, on se fait une idée sur la haine qu’ils ont du Congolais de Kinshasa. On ne peut donc pas être étonné de la barbarie avec laquelle ces derniers sont chassés de Brazzaville et des autres villes comme Pointe-Noire.
Les deux peuples, comme d’ailleurs celui de l’Angola, sont bel et bien frères. Il est utile de le rappeler, non pas pour masquer une quelconque faiblesse, mais bien pour des raisons historiques, étant donné que nul n’a le pouvoir de changer l’histoire. Ils ne devraient donc pas en arriver là sans provoquer des rires des puissances occidentales qui les ont divisés.
Mais pourquoi les Congolais ?
Il y a quelques décennies, Jean-Marie Lepen avait lancé une phrase demeurée célèbre :
« La France ne peut pas supporter toute la misère du monde ».
Cette déclaration était, bien entendu, consécutive à la présence nombreuse des étrangers dans l’Hexagone. C’est vrai que cet homme qui ne mâche jamais ses mots et qui est connu pour son rejet des immigrés ne parlait pas spécialement des Congolais.
D’ailleurs ces derniers sont loin d’être la plus grande communauté d’immigrés en France. Mais la question mérite bien d’être posée.
Pourquoi les Congolais sont-ils aussi mal vus dans les pays voisins ? Y sont-ils trop nombreux ? Sont-ils les seuls à s’y méconduire ? Et pourquoi s’y méconduisent-ils ?
Un dicton populaire dit que la plus belle femme du monde ne peut donner que ce qu’elle a. Abimé par le régime libertin de la 2ème République, le Congolais est aujourd’hui un peuple indiscipliné. On le voit et on le vit au quotidien.
Comment peut-on espérer le voir se comporter différemment à l’étranger, puisqu’il croit que c’est comme cela qu’il doit se comporter ?
Comment veut-on voir se comporter dignement des ressortissants d’un pays qui fait une nette différenciation entre vol et détournement, seul le premier étant, apparemment, condamnable ?
Que peut-on attendre des originaires d’un pays où le kuluna est traité avec laxisme ?
Il s’était passé beaucoup de temps avant la traque de ces bandits de grand chemin qui avaient donc eu le temps de se multiplier et de planter des germes. Et la suspension de la salvatrice opération likofi, suite aux pressions d’une ONG étrangère est venue redonner du souffle au kuluna.
Quelques petits exemples ? Dans leur grande majorité, les chauffeurs congolais ne respectent pas les feux de signalisation, sauf s’ils voient un motard à côté. La plupart de Congolais balancent des immondices carrément dans la rue, s’ils ne les jettent pas dans des caniveaux. On peut les banaliser ici, mais ailleurs, de tels comportements énervent.
Rentrer au pays ?
La réaction la plus écoutée de la part des Congolais est que leurs compatriotes, toujours brimés à l’étranger, doivent regagner carrément leur pays. Certains vont jusqu’à leur demander pourquoi ils sortent du pays, ce qu’ils vont chercher dans ces pays-là.
Mais c’est justement là le nœud du problème.
Car pourquoi les Congolais en arrivent-ils à fuir leur pays ? Pourquoi préfèrent-ils humiliations, brimades et même tueries, à la vie dans leur propre pays ? Car dans leur pays, au moins, la vie est garantie.
Le problème est que l’homme aspire toujours à un mieux-être, ce qui est tout à fait naturel. Or, la vie ne doit pas se limiter au fait de vivre. Si c’est simplement cela le sens que l’on doit donner à la vie, alors elle est un non-sens.
Tout comme il appartient à tout père de famille d’assurer une bonne éducation et une instruction conséquente à ses rejetons qui ne lui ont pas demandé de les faire venir au monde, l’Etat a le devoir sacré d’assurer un mieux-être à ses citoyens.
C’est un droit pour l’enfant de naître dans des conditions acceptables, de bénéficier des soins de santé, d’être formé et de travailler afin qu’il perpétue à son tour la création. Ces droits sont assurés par l’Etat.
Malgré sa volonté et sa détermination, un fonctionnaire de l’Etat qui est réduit à la portion congrue est incapable de remplir ses devoirs parentaux.
Or, le non-remplissage de ces devoirs envoie les jeunes à la débauche, au vol, au viol, au kuluna. Les plus audacieux cherchent absolument à quitter le pays. Et là où ils vont, ils ne peuvent pas se comporter autrement.
Il y a un taux très élevé de chômage dans ce pays. Ceux des Congolais qui travaillent sont sous-payés, en tout cas pour la plupart d’entre eux. Il y a également une cruelle absence de débouchés, et la perspective d’un avenir sombre.
Voilà pourquoi il y a toujours un nombre effarant de candidatures aux diverses élections. Loin d’être une vocation, tout le monde tient à faire de la politique, seul créneau qui paie bien dans ce pays.
Devant ce tableau noir, les jeunes congolais, et pas seulement eux, ne trouvent d’autre alternative que de s’exiler. Ceux qui arrivent à trouver un peu plus de moyens (certains vont jusqu’à vendre des maisons familiales pour y arriver) pensent, évidemment, à émigrer en Occident.
Quel que soit le travail qu’on y fera, en effet, il n’y a aucune comparaison logique avec ce qu’on peut faire ici. C’est ainsi qu’il n’est pas surprenant que même des cadres du pays, œuvrant dans diverses structures, n’hésitent pas à se volatiliser à l’occasion d’un voyage en Europe.
Car que font-ils en Angola, au Congo Brazza ou en RSA ? Sont-ils des cadres là-bas ? Rien du tout. En dehors du commerce, ils y exercent de petits boulots.
Malgré cela, c’est à eux que l’on fait appel chaque fois qu’il y a un petit problème comme des frais scolaires d’un enfant à payer, des soins de santé à supporter ou lorsqu’il y a un décès dans la famille. Curieusement, l’intervention sollicitée est toujours efficace, supérieure à la contribution de la plupart des membres de famille ici, dont certains occupent des fonctions importantes.
Lorsque les jeunes et même des moins jeunes en arrivent à cette réalité, ils ne peuvent que préférer ces humiliations.
Voilà pourquoi plusieurs des expulsés de Brazzaville n’ont pas hésité à refaire le chemin en sens inverse.
___________
© KongoTimes
Congolais expulsés d'Angola
Partout où ils sont, les Congolais sont mal vus. Ils y sont perçus comme des pestiférés, et chassés comme de vulgaires chiens de rue. La raison officielle que tous ces pays avancent est l’immigration clandestine.
Nos compatriotes y vivent donc en situation irrégulière.
Seul le Congo-Brazzaville a une raison supplémentaire qu’il brandit : l’insécurité. L’histoire ne doit pas être oubliée. L’Angola est un pays qui sort de la guerre.
Et, comme chacun le sait, toute guerre produit inévitablement des déplacements humains et des réfugiés. Mais c’était pire pour l’Angola car, avant la guerre fratricide entre les trois factions rivales, il y a d’abord eu la lutte que ces trois mouvements, Unita de Jonas Malhiero Savimbi, MPLA d’Agostino Neto et FNLA d’Holden Roberto, ont menée pour l’affranchissement de leur pays du joug portugais.
On se souviendra que l’Angola est l’un des derniers pays africains à devenir indépendant. Jusqu’au 11 novembre 1975, donc, un nombre incalculable d’Angolais avait fui ce pays.
Et, dans leur grande majorité, les Angolais avaient trouvé refuge en RDC, pour des raisons de proximité, mais également familiales. Ils y sont restés à l’aise des dizaines d’années durant, ont étudié, entrepris du commerce (leur spécialité), circulé partout dans le pays, dans les mêmes conditions que les Congolais.
Certains d’entre eux ont occupé des fonctions très élevées dans la sphère politique congolaise. On ne nous dira pas que tous avaient un séjour régulier !
L’information est sur toutes les bouches : 8.000 Congolais viennent d’être expulsés d’Angola en l’espace de cinq mois. Raison évoquée : séjour irrégulier. Si la nouvelle provoque regret, incompréhension et révolte, elle n’a cependant surpris aucun Congolais.
C’est chaque année que l’on expulse les Congolais de l’Angola, du Congo-Brazzaville et de l’Afrique du Sud.
La reconduite des étrangers à la frontière est une pratique normale, bien connue et universelle. Tout pays a le plein droit de reconduire à la frontière tout citoyen d’un pays étranger à qui il reproche un certain nombre de faits.
Il peut s’agir d’une entrée frauduleuse dans ce territoire, du fait d’y vivre en situation irrégulière, ou encore des abus que cet étranger y commet et qui, au regard des dispositions légales régissant ce pays, en font une personae non grata.
Cependant, la communauté internationale a établi des règles qui doivent être respectées dans l’application de ces dispositions. On reconduit une personne à la frontière dans le respect de la personne humaine.
Dans l’expulsion des étrangers, particulièrement africains, l’Europe a aussi commis quelques bévues, dont certaines ont eu des conséquences fatales, comme le cas de Samira Adamou, la jeune nigériane qui avait trouvé la mort il y a quelques années suite à un traitement coriace de la police d’un pays européen.
Mais c’est en Afrique même qu’il y a un mépris total de la personne humaine, surtout, ô paradoxe !, si la personne à expulser est africaine.
Que ce soit en Angola, au Congo Brazza ou en RSA, les Congolais ont toujours été humiliés, dans leur chair comme dans leur âme, de façon incompréhensible.
Pourquoi sont-ils toujours battus lorsqu’ils doivent être expulsés ? L’année passée, on a même vu des images insoutenables qui sont venues de Brazzaville.
A quoi rime cette barbarie ?
Qu’est-ce qui empêche ces pays de reconduire humainement, quoique fermement, les Congolais dont ils ne veulent pas ? Et pendant ce temps, en Afrique du Sud, d’autres Congolais étaient brimés, voire brûlés.
Aujourd’hui, ce sont plus de 8.000 Congolais qui sont expulsés d’Angola, pendant que d’autres Congolais sont en train de l’être au Congo d’en face. En 2013, ces expulsions avaient atteint le summum avec plus de 52.000 Congolais chassés d’Angola.
L’histoire ne doit pas être oubliée. L’Angola est un pays qui sort de la guerre. Et, comme chacun le sait, toute guerre produit inévitablement des déplacements humains et des réfugiés.
Mais c’était pire pour l’Angola car, avant la guerre fratricide entre les trois factions rivales, il y a d’abord eu la lutte que ces trois mouvements, Unita de Jonas Malhiero Savimbi, MPLA d’Agostino Neto et FNLA d’Holden Roberto, ont menée pour l’affranchissement de leur pays du joug portugais.
On se souviendra que l’Angola est l’un des derniers pays africains à devenir indépendant. Jusqu’au 11 novembre 1975, donc, un nombre incalculable d’Angolais avait fui ce pays.
Et, dans leur grande majorité, les Angolais avaient trouvé refuge en RDC, pour des raisons de proximité, mais également familiales. Ils y sont restés à l’aise des dizaines d’années durant, ont étudié, entrepris du commerce (leur spécialité), circulé partout dans le pays, dans les mêmes conditions que les Congolais.
Certains d’entre eux ont occupé des fonctions très élevées dans la sphère politique congolaise. On ne nous dira pas que tous avaient un séjour régulier !
Evidemment, le doigt accusateur doit être retourné vers nous-mêmes. Les frontières congolaises sont poreuses. Les gens entrent et ressortent comme ils veulent.
Si aujourd’hui, les Congolais n’ont pas de carte d’identité, sous la 2ème République, c’est n’importe quoi qui se faisait car des étrangers se procuraient ces cartes en l’espace de quelques minutes. La corruption généralisée aidant, quelques billets de banque arrangeaient tout.
Il s’agit donc d’une défaillance politico-administrative. Les compatriotes qui vivent en Angola nous racontent bien les difficultés auxquelles sont butés les étrangers pour se doter des documents de résidence. Les Angolais sont très pointilleux là-dessus. Voilà pourquoi les irréguliers congolais ne peuvent que s’y sentir mal à l’aise.
Rester au pays ?
Avant, on était habitué à apprendre les défections des sportifs, des danseuses et des musiciens. C’était même devenu routinier.
Chaque fois qu’une équipe de sport voyageait pour l’Europe pour un stage ou pour participer à une compétition, l’exception était que cette équipe rentre au pays au grand complet. Car même certains dirigeants n’hésitaient pas à fausser compagnie au reste de la délégation.
Mais on trouvait le plus de défection dans les groupes musicaux. Une certaine, et difficilement compréhensible politique veut, en effet, que les pays européens, surtout ceux de l’Europe occidentale, octroient facilement des visas aux musiciens, tout en décourageant les chercheurs, les étudiants et les scientifiques d’une manière générale.
Pour y aller quand même, plusieurs Congolais s’étaient mis à se transformer ingénieusement en musiciens, juste le temps d’arriver à la terre promise.
On a même vu des intellectuels respectables se coiffer drôlement avec, comme cerise sur le gâteau, une teinte sur les cheveux, et s’habiller comme des musiciens de foire, afin de se faire passer pour de vrais musiciens avec lesquels ils voyageaient.
Les leaders des orchestres se sont délectés de cette opportunité qui leur était ainsi offerte. D’où la naissance du phénomène ngulu. Ces chefs d’orchestre multipliaient des voyages en Europe, et même en Amérique du Nord, car, ce faisant, ils gagnaient doublement.
Parmi ceux qui arrivent à disposer de moyens relativement conséquents, ceux qui ne peuvent pas traverser la Méditerranée se résolvent à tourner les regards vers le sud du continent.
Ceux qui sont dépourvus de moyens se rabattent sur les pays frontaliers. L’Angola et le Congo Brazzaville sont ainsi devenus des nouveaux eldorados.
Des pestiférés ?
Partout où ils sont, les Congolais sont mal vus. Ils y sont perçus comme des pestiférés, et chassés comme de vulgaires chiens de rue.
La raison officielle que tous ces pays avancent est l’immigration clandestine. Nos compatriotes y vivent donc en situation irrégulière. Seul le Congo Brazzaville a une raison supplémentaire qu’il brandit : l’insécurité.
D’après ce pays, les RDCongolais importent dans leur pays, qui serait une oasis de paix profonde et une terre sainte, le banditisme urbain et la prostitution.
La méchanceté (il faut bien que le chat soit appelé par son nom) des Congolais d’en face vis-à-vis de leurs frères de la rive gauche du fleuve Congo ne date pas d’aujourd’hui.
Personne, là-bas comme ici, n’a déjà oublié qu’il y a quelques décennies, un slogan célèbre là-bas disait qu’entre un » Zaïrois » et un serpent, il fallait tuer le premier et épargner le second.
Lorsqu’on sait qu’en dehors de sa nocivité, le serpent est également un animal maudit, on se fait une idée sur la haine qu’ils ont du Congolais de Kinshasa. On ne peut donc pas être étonné de la barbarie avec laquelle ces derniers sont chassés de Brazzaville et des autres villes comme Pointe-Noire.
Les deux peuples, comme d’ailleurs celui de l’Angola, sont bel et bien frères. Il est utile de le rappeler, non pas pour masquer une quelconque faiblesse, mais bien pour des raisons historiques, étant donné que nul n’a le pouvoir de changer l’histoire. Ils ne devraient donc pas en arriver là sans provoquer des rires des puissances occidentales qui les ont divisés.
Mais pourquoi les Congolais ?
Il y a quelques décennies, Jean-Marie Lepen avait lancé une phrase demeurée célèbre :
« La France ne peut pas supporter toute la misère du monde ».
Cette déclaration était, bien entendu, consécutive à la présence nombreuse des étrangers dans l’Hexagone. C’est vrai que cet homme qui ne mâche jamais ses mots et qui est connu pour son rejet des immigrés ne parlait pas spécialement des Congolais.
D’ailleurs ces derniers sont loin d’être la plus grande communauté d’immigrés en France. Mais la question mérite bien d’être posée.
Pourquoi les Congolais sont-ils aussi mal vus dans les pays voisins ? Y sont-ils trop nombreux ? Sont-ils les seuls à s’y méconduire ? Et pourquoi s’y méconduisent-ils ?
Un dicton populaire dit que la plus belle femme du monde ne peut donner que ce qu’elle a. Abimé par le régime libertin de la 2ème République, le Congolais est aujourd’hui un peuple indiscipliné. On le voit et on le vit au quotidien.
Comment peut-on espérer le voir se comporter différemment à l’étranger, puisqu’il croit que c’est comme cela qu’il doit se comporter ?
Comment veut-on voir se comporter dignement des ressortissants d’un pays qui fait une nette différenciation entre vol et détournement, seul le premier étant, apparemment, condamnable ?
Que peut-on attendre des originaires d’un pays où le kuluna est traité avec laxisme ?
Il s’était passé beaucoup de temps avant la traque de ces bandits de grand chemin qui avaient donc eu le temps de se multiplier et de planter des germes. Et la suspension de la salvatrice opération likofi, suite aux pressions d’une ONG étrangère est venue redonner du souffle au kuluna.
Quelques petits exemples ? Dans leur grande majorité, les chauffeurs congolais ne respectent pas les feux de signalisation, sauf s’ils voient un motard à côté. La plupart de Congolais balancent des immondices carrément dans la rue, s’ils ne les jettent pas dans des caniveaux. On peut les banaliser ici, mais ailleurs, de tels comportements énervent.
Rentrer au pays ?
La réaction la plus écoutée de la part des Congolais est que leurs compatriotes, toujours brimés à l’étranger, doivent regagner carrément leur pays. Certains vont jusqu’à leur demander pourquoi ils sortent du pays, ce qu’ils vont chercher dans ces pays-là.
Mais c’est justement là le nœud du problème.
Car pourquoi les Congolais en arrivent-ils à fuir leur pays ? Pourquoi préfèrent-ils humiliations, brimades et même tueries, à la vie dans leur propre pays ? Car dans leur pays, au moins, la vie est garantie.
Le problème est que l’homme aspire toujours à un mieux-être, ce qui est tout à fait naturel. Or, la vie ne doit pas se limiter au fait de vivre. Si c’est simplement cela le sens que l’on doit donner à la vie, alors elle est un non-sens.
Tout comme il appartient à tout père de famille d’assurer une bonne éducation et une instruction conséquente à ses rejetons qui ne lui ont pas demandé de les faire venir au monde, l’Etat a le devoir sacré d’assurer un mieux-être à ses citoyens.
C’est un droit pour l’enfant de naître dans des conditions acceptables, de bénéficier des soins de santé, d’être formé et de travailler afin qu’il perpétue à son tour la création. Ces droits sont assurés par l’Etat.
Malgré sa volonté et sa détermination, un fonctionnaire de l’Etat qui est réduit à la portion congrue est incapable de remplir ses devoirs parentaux.
Or, le non-remplissage de ces devoirs envoie les jeunes à la débauche, au vol, au viol, au kuluna. Les plus audacieux cherchent absolument à quitter le pays. Et là où ils vont, ils ne peuvent pas se comporter autrement.
Il y a un taux très élevé de chômage dans ce pays. Ceux des Congolais qui travaillent sont sous-payés, en tout cas pour la plupart d’entre eux. Il y a également une cruelle absence de débouchés, et la perspective d’un avenir sombre.
Voilà pourquoi il y a toujours un nombre effarant de candidatures aux diverses élections. Loin d’être une vocation, tout le monde tient à faire de la politique, seul créneau qui paie bien dans ce pays.
Devant ce tableau noir, les jeunes congolais, et pas seulement eux, ne trouvent d’autre alternative que de s’exiler. Ceux qui arrivent à trouver un peu plus de moyens (certains vont jusqu’à vendre des maisons familiales pour y arriver) pensent, évidemment, à émigrer en Occident.
Quel que soit le travail qu’on y fera, en effet, il n’y a aucune comparaison logique avec ce qu’on peut faire ici. C’est ainsi qu’il n’est pas surprenant que même des cadres du pays, œuvrant dans diverses structures, n’hésitent pas à se volatiliser à l’occasion d’un voyage en Europe.
Car que font-ils en Angola, au Congo Brazza ou en RSA ? Sont-ils des cadres là-bas ? Rien du tout. En dehors du commerce, ils y exercent de petits boulots.
Malgré cela, c’est à eux que l’on fait appel chaque fois qu’il y a un petit problème comme des frais scolaires d’un enfant à payer, des soins de santé à supporter ou lorsqu’il y a un décès dans la famille. Curieusement, l’intervention sollicitée est toujours efficace, supérieure à la contribution de la plupart des membres de famille ici, dont certains occupent des fonctions importantes.
Lorsque les jeunes et même des moins jeunes en arrivent à cette réalité, ils ne peuvent que préférer ces humiliations.
Voilà pourquoi plusieurs des expulsés de Brazzaville n’ont pas hésité à refaire le chemin en sens inverse.
___________
© KongoTimes
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire