vendredi 31 décembre 2010

RDC: Imaginons le scenario catastrophe - pas d'élections en 2011

31 Décembre 2010

billet

Attendue depuis longtemps comme l'année électorale et, malgré les affirmations du chef de l'Etat lors de son discours du 8 décembre 2010, l'année 2011 pourrait ne pas voir se tenir les élections.

Déjà, l'inconstitutionnel calendrier concocté par l'inconstitutionnelle CEI, présenté par ses auteurs comme très serré et incompressible, prévoit les élections nationales, c'est-à-dire la présidentielle et les législatives, en dehors des délais constitutionnels et légaux selon lesquels ces deux élections auraient dû être organisées début septembre 2011 au lieu de fin novembre, avec le risque que l'élection du président de la République, notamment lors d'un éventuel 2e tour, est ainsi positionnée fin février 2012, largement au-delà de la fin du mandat présidentiel prenant fin le 5 décembre2011. Quant aux élections législatives provinciales et celles des sénateurs, elles sont d'ores et déjà fixées vers fin 2012, sans parler des municipales et des locales oubliées jusqu'en 2013. Même dans cette hypothèse « favorable », l'élection présidentielle pose un grave problème de droit et de politique.

Or, le calendrier lui-même est déjà remis en cause par le président de la République qui, dans son discours du 8 décembre, appelle un calendrier « réaliste » sans qu'il nous dise ce qu'il y a d'irréaliste dans l'actuel calendrier ni qui devrait s'en occuper. La question même de l'initiateur d'un tel calendrier se pose dans la mesure où la CENI, par des manoeuvres dilatoires des politiciens de l'Assemblée nationale, n'est toujours pas près d'être installée deux mois après la désignation de ses membres. Dans ces conditions d'absence de l'autorité organisatrice des opérations pré-électorales et électorales, rien n'indique par ailleurs que les élections aient une seule chance sérieuse de se tenir, ni en termes de moyens financiers nécessaires ni en termes d'organisation des opérations pré-électorales et autres préparatifs des élections, ni même en termes de volonté politique et de détermination des dirigeants et de la classe politique institutionnelle, rien n'indique que ces élections aient une seule chance sérieuse d'avoir lieu dans « les délais légaux » comme on aime bien le dire. Sauf les incantations dont on nous gave, personne ne nous explique comment l'inscription d'environ 35 millions d'électeurs potentiels sur les listes électorales pourrait être terminée avant novembre 2011 sur l'ensemble du territoire national, alors qu'elle n'est pas encore réellement lancée, sans parler du budget 2011 déjà voté qui n'a pas le contenu d'une année électorale pour ce qui est des lignes budgétaires aussi bien en recettes qu'en dépenses. Pour toutes ces raisons, dans certains milieux diplomatiques, et chez certains observateurs avisés de la politique congolaise, on se fait dubitatif sur la capacité des institutions de tenir les délais et même sur leur volonté politique d'y parvenir.

La raison d'être de ces lignes est d'examiner les conséquences juridiques et politiques d'une telle éventualité. Parce que j'ai l'impression qu'au sein de la « majorité » comme de « l'opposition », on fait des calculs pour nous faire déboucher sur un report des élections. Les uns et les autres aimeraient bien prolonger leurs fonctions dans les institutions, alléchés par la perspective de demeurer à la mangeoire ; mais, chacun de ces groupes a par ailleurs des raisons spécifiques de souhaiter le report. Dans la majorité, il y a d'abord le sentiment de traverser une période globalement défavorable, ensuite l'idée que du temps supplémentaire est nécessaire pour rendre « visibles » les « cinq chantiers » dont la visibilité reste pour le moment enfermée dans les panneaux peints placardés par l'astucieuse « cellule de visibilité », afin d'avoir quelque bilan à présenter aux électeurs, il y a enfin la volonté de retarder les choses et, pour des raisons sordides que nous dénoncerons à une autre occasion, agacer Etienne Tshisekedi dont le retour plus que triomphal (accueilli par au moins un million et demi de Kinois) a semé un vent de panique dans les rangs AMP. Dans les rangs de l'opposition « institutionnelle » à laquelle la presse attribue déjà l'intention de viser une nouvelle transition, on berce l'espoir d'un partage du pouvoir au cours d'une transition sans vainqueur ni vaincu et, dans ce cadre, de redistribuer les postes et la richesse. Sauf les démocrates, le report arrangerait donc tout le monde sans que personne ne pense aux conséquences d'une telle situation.

Seulement, tous ces calculs, aussi macabres qu'égoïstes, oublient une chose capitale. C'est que, ni juridiquement ni politiquement, ce ne pourrait se passer ainsi. Car, personne ne peut se prévaloir de sa propre turpitude : voici des compères qui, s'arrangeant délibérément pour traîner et ne rien entreprendre pour mettre réellement en route le processus électoral, provoquent le report, confisquant les institutions sans tenir compte du peuple et des citoyens, et qui, sans aucune forme de procès, imaginent qu'ils pourront automatiquement se maintenir mais en redéployant les rôles.

PORTER L'EXIGENCE DES ELECTIONS EN 2011 CAR LE TEMPS DU CHANGEMENT EST ARRIVE

Sans encore parler des conséquences juridiques dont il faudrait tirer des conséquences politiques, il est clair que les vrais démocrates qui désirent l'avènement d'un vrai changement, celles qui, à l'appel d'Etienne Tshisekedi, sont en train de se regrouper au sein du front commun des forces de changement et de progrès social, à la différence des autres, désirent ardemment, elles, la tenue des élections dans les délais légaux, c'est-à-dire en tout état de cause avant décembre 2011. Pour cela, il faut comprendre que le souhait par le président de la République d'« un calendrier qui tienne à la fois compte du cadre juridique en vigueur, et des conditions techniques et matérielles requisses pour l'organisation des élections réellement libres, transparentes et démocratiques » ne signifie pas dans son esprit que des manoeuvres qui retardent « les conditions techniques requises » l'emportent sur l'obligation constitutionnelle de tenir les élections en 2011. Quand on sait à quel niveau on a parlé de prédation, de corruption et de détournements et vu le luxe exhibé ainsi que le niveau d'enrichissement illicite des individus au détriment de l'Etat au cours de cette législature, on ne peut accepter le prétexte de manque de moyens.

Les démocrates, sur la base de la primauté de la souveraineté populaire et du suffrage universel comme source du pouvoir, ne devraient pas avoir peur des élections comme les autres, au contraire car l'avènement du changement est proche. En effet, pour paraphraser Barack Obama (son discours d'inauguration), « Les transformations sociales, c'est-à-dire les changements, se réalisent lorsque le peuple les désire, parce qu'il (le peuple) exige de nouvelles idées, un nouveau leadership, une nouvelle politique pour des temps nouveaux. Eh bien, Congo, Congolaises et Congolais, voici le temps favorable car ce temps des transformations sociales et du changement est arrivé » et ce sera 2011.

Mais, si ces institutionnels tiennent malgré tout à temporiser pour se rajouter un, deux ou trois ans, le RADER et les forces du changement et de progrès social devraient dire et affirmer d'ores et déjà haut et fort toutes les conséquences juridiques et politiques qui devront être tirées de cette politique et faire s'évanouir le rêve, car au-delà de 2011 sans élections c'est le gouffre et tout se remet à plat. Ce sera la ligne d'attaque, juridiquement fondée, des démocrates pour que l'exercice du pouvoir d'Etat ne soit pas un arrangement entre copains-coquins s'amusant à leur guise avec les règles au gré de leurs appétits matériels égoïstes.

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