Pour éviter une intervention au sol, la coalition internationale espère une fissure dans les rangs du colonel Kadhafi pour faire tomber le régime. Que restent-ils des derniers soutiens du Guide ? Par Sarah Diffalah
Un Libyen pro-Kadhafi à Misrata, le 28 mars 2011. (SIPA)
Drapeaux verts du régime libyen en mains et posters du colonel Kadhafi brandis par des partisans du Guide sur la place Verte de Tripoli : voilà les scènes de liesse que l'on pouvait voir à la télévision libyenne au début de l'insurrection de Benghazi mi-février. Le colonel Kadhafi se targuait alors d'avoir le soutien d'une frange importante de la population libyenne et celui de son appareil sécuritaire réputé fidèle.
Tandis que les doutes apparaissent quant à la capacité militaire des rebelles, la coalition espère aujourd'hui une fissure dans les rangs du colonel pour faire tomber le régime. Le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé a fait état mercredi 30 mars de "premières défections" autour du Guide. Défections qui se sont encore davantage concrétisées jeudi matin avec la défection du ministre libyen des Affaires étrangères, Moussa Koussa.
Dimanche Hillary Clinton et Robert Gates, respectivement à la tête de la diplomatie et de la défense américaines, avaient déjà affirmé que des proches du dirigeant libyen avaient commencé à faire défection. Le Conseil national de transition (CNT), organe représentatif des insurgés libyens, a promis lundi de pardonner aux partisans du colonel Kadhafi s'ils tournaient le dos au leader libyen. Malgré toutes ces promesses, la contre-offensive du Guide met toujours en difficulté les forces des insurgés.
Qui sont ces pro-Kadhafi qui tiennent encore les manettes du pouvoir ?
Il y a d'abord les piliers du régime qui constituent l'appareil sécuritaire entourant de près le colonel Kadhafi. Au sein de celui-ci, il y a d'une part les piliers idéologiques parfois armés qu'on appelle les Comités révolutionnaires, instaurés en 1977, qui disposent d'un organe d'information, d'une Cour de Justice et d'un tribunal révolutionnaire. "C'est l'épine dorsale du régime, les gardiens du temple de l'idéologie de l'Etat des masses", explique Saïd Haddad, maître de Conférences aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan et responsable de la rubrique Libye de la revue l’Année du Maghreb. "Ces membres ont tiré profit de la période de l'embargo grâce à la contrebande et ont vu d'un mauvais œil la tentative de libéralisation de ces dernières années incarnée notamment par l'un des fils du colonel Kadhafi, Seif Al-Islam". A côté des comités révolutionnaires, il y a en effet la famille, aussi bien le premier cercle avec les enfants mais également la famille par alliance.
Ensuite, il y a l'appareil sécuritaire en tant que tel que constitue l'armée, résistante et très offensive comme on peut le voir sur le terrain. Le Guide a placé des proches aux plus hauts postes comme son fils Khamis, à la tête de la 32ème brigade considérée comme la plus performante des unités. "C'est assez ambigu car depuis longtemps Kadhafi se méfie de l'armée craignant un coup d'Etat", explique Saïd Haddad. Ces brigades spéciales sont dévouées au régime.
La Légion islamique ou panafricaine islamique, c'est-à-dire les mercenaires, est très importante en ce moment. Recrutés dans les pays d'Afrique subsaharienne, au Mali, au Nigéria et au Niger notamment, les mercenaires participent à l'offensive militaire et à la répression. "Le régime a toujours eu recours à cette forme de légion étrangère. Ces mercenaires, en sommeil depuis la campagne du Tchad des années 1980, ont été réactivés", rappelle le maître de conférences. "Ce qui est intéressant c'est que ce sont des ressortissants de pays avec qui la Libye a un certain nombre de relations économiques, politiques et financières et où la politique libyenne a un certain écho". En effet, la Libye a toujours eu une politique africaine très importante. Le pays a investi dans des hôtels, des mosquées, des écoles coraniques, ce qui a grandit son image dans les populations africaines.
Il serait hasardeux aujourd'hui de miser sur la défection de la totalité de ces soutiens. Le noyau dur de l'appareil semble, à ce stade, encore loyal à Kadhafi. Tout dépendra de la pression qu'exercera la communauté internationale sur ce dernier.
Sarah Diffalah – Nouvelobs.com
Tandis que les doutes apparaissent quant à la capacité militaire des rebelles, la coalition espère aujourd'hui une fissure dans les rangs du colonel pour faire tomber le régime. Le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé a fait état mercredi 30 mars de "premières défections" autour du Guide. Défections qui se sont encore davantage concrétisées jeudi matin avec la défection du ministre libyen des Affaires étrangères, Moussa Koussa.
Dimanche Hillary Clinton et Robert Gates, respectivement à la tête de la diplomatie et de la défense américaines, avaient déjà affirmé que des proches du dirigeant libyen avaient commencé à faire défection. Le Conseil national de transition (CNT), organe représentatif des insurgés libyens, a promis lundi de pardonner aux partisans du colonel Kadhafi s'ils tournaient le dos au leader libyen. Malgré toutes ces promesses, la contre-offensive du Guide met toujours en difficulté les forces des insurgés.
Qui sont ces pro-Kadhafi qui tiennent encore les manettes du pouvoir ?
Il y a d'abord les piliers du régime qui constituent l'appareil sécuritaire entourant de près le colonel Kadhafi. Au sein de celui-ci, il y a d'une part les piliers idéologiques parfois armés qu'on appelle les Comités révolutionnaires, instaurés en 1977, qui disposent d'un organe d'information, d'une Cour de Justice et d'un tribunal révolutionnaire. "C'est l'épine dorsale du régime, les gardiens du temple de l'idéologie de l'Etat des masses", explique Saïd Haddad, maître de Conférences aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan et responsable de la rubrique Libye de la revue l’Année du Maghreb. "Ces membres ont tiré profit de la période de l'embargo grâce à la contrebande et ont vu d'un mauvais œil la tentative de libéralisation de ces dernières années incarnée notamment par l'un des fils du colonel Kadhafi, Seif Al-Islam". A côté des comités révolutionnaires, il y a en effet la famille, aussi bien le premier cercle avec les enfants mais également la famille par alliance.
Ensuite, il y a l'appareil sécuritaire en tant que tel que constitue l'armée, résistante et très offensive comme on peut le voir sur le terrain. Le Guide a placé des proches aux plus hauts postes comme son fils Khamis, à la tête de la 32ème brigade considérée comme la plus performante des unités. "C'est assez ambigu car depuis longtemps Kadhafi se méfie de l'armée craignant un coup d'Etat", explique Saïd Haddad. Ces brigades spéciales sont dévouées au régime.
Des tribus silencieuses
Il y a aussi les alliances tribales qui entrent en compte. Si l'une des tribus les plus importantes, celle des Wafala, avait déclaré la fin de son soutien au régime libyen, sa position reste floue. "Je suis frappé par le silence des tribus en ce moment" déclare Saïd Haddad, "comme si elles étaient dans une position d'attente pour savoir de quel côté penche la balance".La Légion islamique ou panafricaine islamique, c'est-à-dire les mercenaires, est très importante en ce moment. Recrutés dans les pays d'Afrique subsaharienne, au Mali, au Nigéria et au Niger notamment, les mercenaires participent à l'offensive militaire et à la répression. "Le régime a toujours eu recours à cette forme de légion étrangère. Ces mercenaires, en sommeil depuis la campagne du Tchad des années 1980, ont été réactivés", rappelle le maître de conférences. "Ce qui est intéressant c'est que ce sont des ressortissants de pays avec qui la Libye a un certain nombre de relations économiques, politiques et financières et où la politique libyenne a un certain écho". En effet, la Libye a toujours eu une politique africaine très importante. Le pays a investi dans des hôtels, des mosquées, des écoles coraniques, ce qui a grandit son image dans les populations africaines.
La population : une grande inconnue
Enfin, le soutien des Libyens de la Tripolitaine est une grande énigme. Au bout de 42 ans de régime autoritaire, cette population plutôt pro-Kadhafi entretient un rapport ambigu avec son dirigeant. Contrairement à ce qu'on a pu voir en Tunisie et en Egypte, une partie des Libyens adhère vraisemblablement au régime de Kadhafi. Selon Saïd Haddad, "le grand bond dans l'inconnu" freine les habitants de Tripoli par exemple. "Ce n'est pas évident pour eux de se projeter dans l'inconnu", explique-t-il. "Ils n'ont connu qu'un seul régime et le colonel Kadhafi apparaît comme celui qui a stabilisé le pays, qui leur a largement redistribué la rente pétrolière et qui a construit des infrastructures". Cependant, il est encore difficile de savoir ce qui relève de l'adhésion spontanée de celle sur commande. "Les comités de quartiers sont très présents à Tripoli notamment. Ils quadrillent le pays et empêchent toute expression d'opinions divergentes ou hostiles au régime", explique Saïd Haddad.Il serait hasardeux aujourd'hui de miser sur la défection de la totalité de ces soutiens. Le noyau dur de l'appareil semble, à ce stade, encore loyal à Kadhafi. Tout dépendra de la pression qu'exercera la communauté internationale sur ce dernier.
Sarah Diffalah – Nouvelobs.com
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