jeudi 7 juin 2012

Tuerie au Sud-Kivu : images et témoignage exclusifs

Dans la nuit du 13 au 14 mai dernier, dans un village du Sud-Kivu à l’est de la RDC, 32 personnes dont 6 enfants ont été sauvagement massacrés par les combattants d’une milice rebelle, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Une tuerie qui a duré trois heures et qui s’est déroulée à Kamananga à 3 km d’une base des Casques bleus.

Le témoignage et les images de notre Observateur font froid dans le dos.

Les FDLR sont nées en 2000 d’une sécession de l’Armée de libération du Rwanda, une milice hutu ayant activement participé au génocide rwandais de 1994 qui a fait 800 000 morts, majoritairement tutsis. Opposés au président rwandais Paul Kagamé, ces combattants se sont installés au Congo voisin pour, disent-ils, défendre les intérêts des hutus rwandais réfugiés au Kivu.

Ils ont reçu jusqu’en 2003 le soutien de Kinshasa, qui avait besoin de forces supplétives pour combattre une autre rébellion active dans la région, le Rassemblement congolais pour la démocratie (le RCD), appuyé lui par le Rwanda et l’Ouganda.

Le RCD est devenu en 2007 le CNDP, le Congrès National pour la Défense du Peuple. Il est accusé par Kinshasa d’être responsable d’une mutinerie qui sème le chaos depuis deux mois au Kivu. Un conflit également documenté par l’un de nos Observateurs congolais.

Les rebelles rwandais des FDLR sont officiellement traqués par Kinshasa et Kigali depuis 2009, après que les deux capitales, auparavant ennemies, eurent signé un accord de coopération visant à démanteler les différentes rébellions qui déstabilisent la région depuis vingt ans.

Kamananga est un village situé à 3km de Bunyakiri, une localité de l’extrême nord du Sud-Kivu, et à 80 km de Bukavu, le chef-lieu de cette province. Bunyakiri abrite une base mobile de la Monusco (la Mission de l’ONU en RDC).

Dans la matinée suivant le massacre, lundi 14 mai, les habitants de Kamananga ont manifesté leur colère devant le campement, accusant les Casques bleus de n’avoir rien fait pour défendre la population face aux FDRL.

Des miliciens de Raïa Mutomboki ("peuple révolté" en swahili), un groupe d’autodéfense qui dit se battre contre les rebelles rwandais, étaient présents à cette manifestation. Les forces onusiennes ont dû tirer en l’air pour disperser l’attroupement, certains manifestants ayant fait usage d’armes à feu.

Onze des soldats de l'ONU ont été blessés lors de ces échauffourées. Le porte-parole de la Monusco à Kinshasa a finalement répondu aux accusations des villageois, expliquant à l’AFP que les Casques bleus n’avaient pas réagi "parce que le temps que l’information arrive, les FDRL avaient déjà commis leur forfait"].

La tuerie de Kamananga Kivu n’est malheureusement pas un cas isolé. Pour le seul mois de mai, l’Unicef a recensé de nombreuses tueries dans des villages de la région, au cours desquelles des femmes et des enfants ont été particulièrement pris pour cible.

Depuis avril dernier, l’ONG Médecins sans frontières déclare avoir pris en charge, à l’est de la RDC, plus de 200 civils blessés par balle, à coups de machette ou brûlés. Un chiffre qu’ils reconnaissent dérisoire au regard de l’ampleur des massacres.
Toutes ces photos ont été prises par notre Observateur qui est arrivé à Kamananga après le massacre lundi 14 mai.
Contributeurs


Patrick RDC

"Il y avait partout des corps de femmes qui avaient été violées, mutilées puis tuées"
Patrick (pseudonyme), 28 ans, habite au Nord-Kivu. Il a pris des photos des victimes le matin du massacre. Craignant pour sa sécurité, il préfère rester anonyme.


Quand j’ai appris ce qui c’était passé, j’ai tout de suite pris la route avec mon oncle pour me rendre à Kamananga, mon village d’origine. En arrivant, les maisons brûlaient encore et il y avait partout des corps de femmes qui avaient été violées, mutilées puis tuées. J’ai vu plein de cadavres dans les fourrés et dans les maisons. Deux personnes de ma famille ont été tuées. Ce qui m’a choqué, c’est le nombre d’enfants morts, tués comme ça.

"Le massacre a duré de 3 h à 7 h du matin"

Les plus gravement touchés ont été envoyés directement à Bukavu (chef-lieu du Sud-Kivu). Je me suis rendu à l’hôpital de Bunyakiri où j’ai parlé avec des personnes qui avaient subi des blessures plus légères.

Ils m’ont dit que des hommes armés de machettes et de couteaux étaient venus les surprendre dans leur sommeil. Tout le monde s’était mis à courir, certains avaient réussi à fuir dans la forêt, mais les plus faibles, les femmes et les enfants, ont été les premières victimes. Le massacre a duré de 3 h à 7 h du matin. Ce que j’ai vu m’a terrifié. Je ne peux faire qu’une chose, c’est prier Dieu.

"Pour les villageois, les Casques bleus ont laissé faire les rebelles rwandais"

Pour les gens de Kamananga, les Casques bleus ont clairement laissé faire les rebelles rwandais. Des miliciens de Raïa Mutomboki les ont rejoints pour attaquer les casques bleus. Moi j’ai regardé ça de loin.
ATTENTION, LES IMAGES CI-DESSOUS SONT PARTICULIEREMENT PERTURBANTES.









Ces cadavres de femmes et d'enfants ont été photographiés à l'extérieur des maisons. Notre Observateur affirme qu'ils ont été tués alors qu'ils tentaient de fuir les rebelles.



A l'hôpital Bunyakiri. Notre Observateur affirme que ces femmes ont été violées et mutilées sexuellement.







Ce billet a été rédigé avec la collaboration de Peggy Bruguière, journaliste à FRANCE 24.

Coupures de 1000, 2000, 5000 et 10.000FC : Danger de naufrage pour Matata Ponyo

Jeudi, 07 Juin 2012



Le Premier ministre a décidé de lancer finalement de nouvelles coupures du Franc Congolais à haute valeur faciale. Minimisant tout risque, le chef du gouvernement a annoncé que toutes les mesures d’encadrement ont été prises en vue d’éviter les dérapages.

L’opinion publique veut bien croire son gouvernement. Mais l’expérience récente de l’histoire congolaise renseigne que dans ce genre de manœuvre, il faut se garder de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir abattu. La fragilité du contexte global en Rdc appelle plutôt à l’extrême prudence.

Car, dans ce pays où beaucoup reste encore à faire, les Congolais ont vu des vertes et des pas mûres. Prenons à cet effet le cas, plus récent, de la mise en application de la TVA. Le Gouvernement avait juré avoir pris toutes les précautions avant de lancer cette taxe.

Mais, contre toute attente, lors de la mise en application de cette dernière, les dérapages sont apparus endéans une semaine. Les prix des biens de première nécessité et autres ont pris l’ascenseur. L’exécutif central a beau se jeter dans les invectives, les prix ne sont jamais redescendus.

On a eu beau parler d’opérateurs économiques véreux, on a même scellé certains grands commerces, mais la réalité s’est impose au gouvernement. Plus têtue que jamais.

Aujourd’hui, la page TVA a déjà été tournée sans que le petit peuple ne jouisse de la baisse des prix tant vantée.

On nous a sans cesse rabattu les oreilles avec des avantages supposés de la TVA par rapport à l’ICA. Allain jusqu’à insister qu’à 16 pour cent au lieu de 18 appliqué à l’ICA, la TVA devait induire une réduction de 2 pour cent sur tous les biens de consommation.

Cette revendication est restée dans le domaine des vœux pieux. Le gouvernement a inexplicablement renoncé à défendre le bon droit. La population a été abandonnée à son triste sort à la suite des effets de désintégration provoqués par la mise en œuvre de la TVA.

Catastrophe

Aujourd’hui, le même Gouvernement prétend avoir pris toutes les mesures avant de lancer les coupures de 1.000, 2.000, 5.000 et 10.000FC à partir du 2 juillet prochain.

Comment lui faire confiance après le cafouillage survenu dans le cadre du lancement de la TVA ?

Dans une économie où l’informel domine, il est hasardeux de prétendre avoir tout verrouillé. Dans ce genre d’économie, la part de l’irrationnel reste grande.

A chaque mouvement majeur enclenché, il résulte une suite de contre-réactions qui ne répondent pas aux normes.

Dans un système d’économie formelle et rationnelle, le lancement de ces différentes coupures ne peut provoquer aucune avalanche. Mais au Congo, il sera la source d’une spéculation sauvage et incontrôlée.
Comme cela s’est passé pour la TVA, on va assister à une flambée des prix des biens de consommation.
Comme toujours, le Gouvernement va tempêter et promettre la chicotte aux spéculateurs.

Là aussi, puisque ces derniers évoluent dans l’ombre, il sera impossible d’endiguer le dérapage. Et une nouvelle fois après la tva, l’équipe Matata va capituler et laisser la situation se dégrader.

Modalités d’injection

C’est pourquoi, plusieurs acolytes conseillent au Premier ministre de se limiter dans un premier temps à lancer la coupure de 1.000 Fc. Le temps d’observer le marché durant toute l’année 2012, lancer une nouvelle coupure année après année jusqu’à la fin de l’actuelle législature. S’il ne le fait pas, Matata ira droit vers la catastrophe.


LP

RDC: Eventuel soutien Rwandais au M23, à quand les résultats de l’enquête initiée par le gouvernement ?

le 6 juin 2012.



Human Rights Watch vient de confirmer les informations fournies il y a peu par la Monusco à ce sujet! Il y a quelques jours, la Mission de Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) a publié des informations recueillies auprès des transfuges rwandais du front ouvert au Nord-Kivu par les forces combattantes du fameux Mouvement insurrectionnel du 23 mars (M23) contre la RDC; impliquant le Rwanda en sa triple qualité de recrutement, de formateur aux combats et de fournisseur d’armement !

Repoussant d’un revers de main avec mépris lesdites informations, le gouvernement avait déclaré à la face du monde que celles-ci n’étaient pas dignes d’intérêt pour la simple raison qu’il ne pouvait s’agir là que d’une basse manoeuvre de manipulation !

Pour se faire valoir, sans doute, devant l’opinion nationale et internationale en émoi, e gouvernement s’est empressé d’affirmer qu’il était outillé pour se procurer des informations de première main auprès de ses propres services au terme d’une enquête à ouvrir dans les heures qui auront suivi celles fournies par la Monusco !
Lundi dernier, alors que le monde libre s’y attendait le moins, l’Organisation non gouvernementale internationale Human Rights Watch (HRW) a publié un sulfureux sur plusieurs pages indiquant que les militaires rwandais apportent un soutien incontestable à une mutinerie en cours à l’Est de la RDC.

Une exigence fondamentale !

En clair, selon cette Organisation internationale qui excelle dans la défense de droits de l’homme à travers le monde, des militaires ont permis à Bosco Ntaganda d’entrer au Rwanda, l’ont approvisionné en fusils d’assaut, grenades, mitrailleuses et artillerie antiarienne. Ils lui auraient aussi fourni 200 à 300 recrues, dont des civils enrôlés de force et des enfants de moins de 18 ans. Des témoins interrogés par HRW ont affirmé quant à eux que certaines recrues ont été froidement abattues sur les ordres des hommes de Bosco Ntaganda au moment où elles tentaient de s’échapper.

Dans sa conclusion, HRW demande au Rwanda de cesser d’aider un criminel de guerre présumé. Approvisionner les forces de celui-ci est en contradiction flagrante avec l’embargo sur les armes décrété depuis un certain temps par le Conseil de sécurité de Nations Unies, fait observer l’organisation internationale.

Comme à l’occasion de lq publication des informations fournies par la Monusco sur le même sujet, le Rwanda a rejeté eh bloc le rapport présenté par HRW en le qualifiant d’irresponsable et aussi dangereux que des balles où des machettes.

Ainsi donc Human Rights Watch vient de confirmer les informations fournies il y a peu par la Monusco sur la situation actuelle de guerre au Nord-Kivu. A quand les résultats de l’enquête annoncée par le gouvernement pour confirmer ou infirmer les informations publiées par la Monusco dont l’ancrage sur le terrain des hostilités est incontestable ?

Les Congolais qui ont soif de tout savoir sur l’implication du Rwanda dans le bourbier du Nord-Kivu pressent le gouvernement de dire « sa part de vérité » afin qu’ils puissent se prononcer en parfaite connaissance de causes mais un débat public à l’Assemblée nationale sur ce problème majeur de l’heure demeure pour eux une exigence fondamentale




KAMBALE MUTOGHERWA

RDC: Confusion totale au sein du CNDP

le 6 juin 2012.



La situation qui prévaut dans l’Est du pays ne cesse de défrayer la chronique. Chaque jour qui passe nous apporte des éléments nouveaux.

Le tout récent résultat sans nul doute de la divergence qui règne au sein du Congrès national du peuple (CNDP) où les violons ne semblent pas s’accorder entre différents membres.

En effet, selon un article publié notamment sur direct.cd, la démission de François Ruchogoza ministre de la Justice et Réinsertion du gouvernement provincial du Nord-Kivu fait suite à la désolidarisation du CNDP de la Majorité présidentielle (MP).

Comme la réponse du berger à la bergerie, le sénateur Mwanza Chuchu cité par notre source a démenti cette défection du CNDP de la M.P.

» Mon parti n’a jamais quitté la MP, ils se sont réunis à Goma sans m’avertir, le conseil de sages va sanctionner cette indiscipline » déclare le sénateur Omar Kavoto, vice-président de la Société civile du Nord-Kivu qui a pour sa part indiqué que le ministre provincial de la Justice a déjà rejoint le M 23.

De son coté, Jean-Louis Kyaviro, porte-parole du gouverneur de la province du Nord-Kivu a fait savoir que le M 23 fait pression de manière permanente sur les ex militaires du CNDP principalement les tutsi pour qu’ils rejoignent leur mouvement.

Le gouvernement de la République est appelé à redoubler d’efforts pour suivre de près cette situation et permettre aux Congolais de l’Est de mener calmement leur vie.





Espérance Olenga

Louise Mushikiwabo : "La Monusco est totalement irresponsable"

07/06/2012 Par Pierre Boisselet


La chef de la diplomatie rwandaise, Louise Mushikiwabo, à Paris en septembre 2011. © Vincent Fournier/J.A.

Faut-il voir la main de Kigali derrière le Mouvement du 23 mars qui sévit en RDC ? Non, répond la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo. Une interview publiée le 3 juin dans J.A. n° 2682.

Le Rwanda soutient-il les mutins du Mouvement du 23 mars (M23), repliés dans l'est de la RDC ? Onze déserteurs l'affirment. Selon leurs témoignages, recueillis par la Mission des Nations unies pour la stabilisation de la RDC (Monusco) et repris dans la presse, ils avaient été recrutés et armés par Kigali pour rejoindre les rebelles proches de Bosco Ntaganda, ce général congolais né au Rwanda et poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI), que Kinshasa veut désormais arrêter. Louise Mushikiwabo, la ministre rwandaise des Affaires étrangères, réagit.

Jeune Afrique : Un rapport de l'ONU vous accuse de soutenir les mutins du M23. Ces informations sont-elles exactes ?

LOUISE MUSHIKIWABO : Je suis catégorique : le Rwanda n'a ni formé ni envoyé de combattants de l'autre côté de la frontière. Cette fuite montre la désinvolture dont fait preuve la Monusco. Nous avons connaissance de ces allégations depuis des semaines. Pourquoi les diffuser ? La première des choses aurait été de les vérifier : qui sont ces Rwandais ? De quel district viennent-ils ?

Ils disent avoir été recrutés entre février et avril dans le camp de Mudende, près de la frontière avec la RDC...

Mudende est une localité bien connue, où il y a un camp de réfugiés congolais. Cela ne constitue certainement pas une preuve. Il y a 56 000 réfugiés congolais sur notre territoire : ils ont de la famille de l'autre côté de la frontière, il y a des va-et-vient. Mais accuser un pays de soutenir une rébellion dans un autre pays, c'est totalement irresponsable, compte tenu de notre histoire récente. Ces fausses informations risquent d'avoir des conséquences très graves pour les villageois des collines du Masisi [majoritairement rwandophones, NDLR]. La Monusco coûte 1 milliard de dollars par an et dispose de 20 000 hommes. Elle est là depuis trop longtemps et n'a obtenu aucun résultat.

Vous ne jugez pas la Monusco efficace. L'armée congolaise ne semble pas l'être davantage. Sur qui comptez-vous pour combattre les FDLR en RDC (rébellion rwandaise fondée par d'ex-génocidaires hutus) ?

La présence des FDLR pose un grave problème. C'est un poison idéologique et une force utilisée par ceux qui ne veulent pas de la stabilité. La solution ne peut pas venir d'une tierce partie : le Rwanda va résoudre cette question avec le Congo. En revanche, la mutinerie du M23 est le fait de forces armées congolaises, sur le territoire congolais. Il y a des choses que nous ne pouvons pas faire. Ce n'est pas notre pays.

La RDC, justement, a pris une initiative pour tenter d'arrêter Bosco Ntaganda...

Regardons les choses en face. Bosco Ntaganda n'est pas recherché par le Congo, mais par la Cour pénale internationale. Et ce n'est pas parce que la CPI - sur laquelle nous émettons bien des réserves - veut arrêter un seul homme que tant de Congolais doivent souffrir. Pour le reste, contrairement à ce qui a pu être dit, Ntaganda n'a jamais franchi la frontière rwandaise.

Ce rapport risque-t-il de nuire à vos relations avec Kinshasa ?

Kinshasa était, comme nous, déjà au courant de ces allégations. Notre relation est ancienne. Nous avons tout fait pour préserver la stabilité de cette région, et cela ne changera pas. Nous sommes toujours prêts à contribuer à régler le problème si le Congo le demande. Nous continuons d'en discuter.

Dieu vit à Kinshasa

Dans la capitale congolaise, les lieux de culte poussent comme des champignons et s’installent n’importe où. Un peu partout, dans les rues, marchés, transports en commun, il est courant d’entendre un prédicateur, annoncer la bonne nouvelle du royaume des Cieux. Le commerce des âmes rapporte.

Prière dans une paroisse pentecôtiste, près de Kinshasa. REUTERS/Corinne Dufka
 
«Alléluia, Alleluia», lance un prédicateur dans une Eglise de réveil à Kinshasa. En chœur, les fidèles répondent « Amen».  Certains lèvent les bras. « Il est vivant, il est ressuscité. Qui? Jésus». Des acclamations s’ensuivent ce dimanche matin dans la capitale de la République démocratique du Congo.
 
C’est le jour du grand rendez-vous avez le Seigneur. Les chrétiens se mettent sur leur 31. Les femmes veillent aux plus petits détails. La coiffure est impeccable, la tenue vestimentaire des grands jours au rendez-vous du Seigneur. Dans la paroisse Catholique Saint Benoit, certaines femmes ont créé des modèles avec leurs tissus frappés de l’effigie de la vierge Marie ou de l’archidiocèse de Kinshasa. Les hommes, chaussures brillantes aux pieds, sortent leurs vestes.

Sur les routes, c’est souvent un chassé croisé entre ceux qui quittent leurs communes et quartiers pour aller prier ailleurs et ceux qui viennent chercher Dieu dans les communes abandonnées par d’autres. Les conducteurs des taxis-bus tirent leur épingle du jeu en ayant certaines Eglises pour destination finale.

«  Comme il y a beaucoup des gens vont prier à la 7e rue ou à la 16e rue dans la commune de Limete, on les amène là-bas», affirme un chauffeur. Un autre prend la direction d’une Eglise dans le quartier Righini, commune de Lemba.

Des Eglises qui naissent par miracle


Dans une ville où les emplois manquent, la pauvreté et la crise frappent de plein fouet, la prière et la religion sont parfois des refuges où les Kinois (habitants de Kinshasa) vont trouver du réconfort.

Du jour au lendemain, une Eglise nait dans une rue, et ce ne sont pas les fidèles qui manquent. Ils ne se font pas prier et Dieu sait si ces différents lieux de cultes répondent vraiment à leurs besoins. Dans une même rue, il n’est pas rare de trouver deux églises côte à côte, ou plus de trois lieux de cultes différents.

Tous, prient le même Dieu qui les entend tous au même moment vu que certains programmes de culte se font en même temps. Dans cet univers à la compétition spirituelle rude, il faut faire preuve d’ingéniosité.

D’abord, la panoplie des noms des Eglises est riche d’enseignement. Eglise réformée au Congo, Dieu est grand, Bonne nouvelle, Nzambe Malamu, Mont des oliviers, Pierre Vivante, La Borne, Résurrection, La manne cachée... Il y a aussi ceux qui tirent leurs dénominations du registre militaire: Armée de Victoire, Armée de l’Eternel, Armée des vainqueurs.

En plus, certains Hommes de Dieu (c’est ainsi que certains Prédicateurs sont désignés) ont une vision qui dépasse les frontières de la République Démocratique du Congo,  alors que leurs Eglises n’ont même pas encore une implantation nationale.

Les noms donnés à leurs organisations dénotent de leurs ambitions: Vision mondiale, Action missionnaire d’évangélisation, Eglise force internationale de réveil, Ministère du combat spirituel...

 Lorsqu’on veut faire plus original, l’on change carrément de communauté et abandonne la communauté congolaise. Une église se dénomme Communauté d’Israël. 

Chacun prêche pour sa paroisse


Dans la 7e rue de la commune de Limete, non loin de l’Eglise du Pasteur Léopold Mutombo, l’un des prédicateurs en vue à Kinshasa, le dimanche, des écrans géants sont installés en dehors de l’enceinte pour permettre aux fidèles qui n’ont pas trouvé de places à l’intérieur de suivre le culte. Non loin, un panneau indique  «Jésus-Christ est le roi de la RD Congo». Au risque de créer des mécontents parmi ceux qui détiennent le pouvoir politique dans ce pays chrétien à plus de 90%.

Parmi les grandes communautés, il y a les catholiques, les protestants, mais aussi les Eglises de réveil, qui se revendiquent du mouvement pentecôtiste.

Loin des rites grégoriens et latins, ces Eglises de réveil, qualifiées par leurs détracteurs d’«églises de sommeil», ont mis en place un ingénieux dispositif d’ambiance. Les chants sont animés pour donner à ceux qui aiment la danse l’occasion de se trémousser, d’entrer en transe au contact de l’au-delà.

Il y a aussi la possibilité de parler dans des «langues étrangères», venues de Dieu; les barrières hiérarchiques tombent, on est dans la proximité de la grande famille chrétienne. On s’appelle «frères et sœurs en Christ».

Face à cette vague qui a déplumé l’Eglise catholique des ses fidèles, les autorités religieuses ont pensé créer la même ambiance que les églises de réveil. D’où la naissance des mouvements du «renouveau charismatique».

Cette réaction de l’Eglise catholique pour garder ses chrétiens, n’a pas freiné la prolifération des lieux de cultes, appelés à un moment donné «bi nzambi nzambi», entendez, des petits dieux.

«Le miracle c’est de travailler pour le changement»


Pour Sébastien Kabw, psychologue et pasteur, explique:
«Les gens vont prier dans les Eglises pour se protéger contre ceux qui en veulent à leurs vies. D’autres y vont pour obtenir des biens matériels, l’argent, l’ascension sociale, le succès dans les études ou les affaires, la guérison pour ceux qui sont malades, pour le mariage, avoir les enfants pour ceux qui ne conçoivent pas, soit pour avoir le miracle qui vient de Dieu.»
  Dans cet environnement où certains jeunes ne jurent que par un voyage en Europe, d’autres encore vont prier pour avoir le visa et sortir du pays. Bien au-delà de tous ces besoins liés à la situation sociale, «il y a ceux qui vont prier pour avoir la vie éternelle». Echapper à une condition sociale difficile pour espérer le bonheur dans l’au-delà.

C’est ainsi que certaines personnes passent leurs journées à des longs monologues, à genoux, accroupi, allongé à même le sol (tolo na se, entendez la poitrine au sol) ou debout, chacun cherche la meilleure posture qui le rapprochera de Dieu.  

Dans la paroisse Saint Benoit, le curé s’insurge contre ceux qui passent autant de temps dans la paroisse: 
«Je les chasse et leur demande d’aller chercher du travail. Même nous les prêtres, nous travaillons. Et lorsque les gens viennent tuer leurs temps à prier pendant des heures, je les incite à aller chercher de l’argent, cela améliorera leurs conditions de vie. Parce que le miracle c’est de travailler pour le changement. Mais, la pauvreté rend certaines personnes paresseuses qui espèrent au miracle en croisant les bras. Même Dieu, ne prend pas plaisir à voir ce genre de personne» .

Les épées de l’Esprit pour affronter les forces du mal


Pendant ces différentes prières, c’est sont des clameurs qui s’élèvent. Par moment, on se croirait dans un stade de foot lorsqu’une équipe marque un but.  
« Nous crions souvent lorsque nous marquons des buts dans le camp du Diable », répond un fidèle.
L’un des moments forts dans différentes prières est la prière de combat pour détruire les forces du mal. Des gens font des cents pas, claquent les mains . D’autres prennent les épées de l’Esprit pour affronter leurs oppresseurs, lancent des cris de combat comme pour se mobiliser. Une attitude qui dérange les voisins parfois, surtout ceux qui sont à proximité des lieux de culte, de jour comme de nuit.  
«On n’a pas de repos, se plaint Jacques Yves, rencontré dans la commune de Bandal à proximité d’une Eglise. Il y a des prières à longueur des journées et lorsqu’on revient du travail, on est dérangé. La nuit lorsqu’il y a une veillée de prière, c’est pareil surtout qu’ils mettent des baffles et haut-parleurs. Est-ce qu’ils ont le monopole de la prière? Dieu a-t-il demandé que les gens crient comme ça, s’interroge-t-il. Ils ne font que du tapage comme pas possible
A cette critique, Patricia oppose les débits de boissons qui pullulent eux aussi à Kinshasa. «Les bars font plus de bruits que les Eglises, pourquoi on ne s’en plaint pas? Alors que les Eglises apportent la bonne nouvelle et éduque les gens et transforment des vies.

Les bars détruisent la société et poussent les gens à l’alcoolisme, il faudrait plutôt lutter contre eux que se plaindre des Eglises», justifie-t-elle.

Madame Agnès dit «prier pour fuir le mal dans la société, le vol, la prostitution et le péché en général. Malgré tout, ces maux ne baissent pas. Malheureusement, tout ce qu’on fuit en dehors, on le retrouve dans l’Eglise. Je peux dire que les Eglises ont une part importante dans la destruction de ce pays», raconte cette femme qui continue tout de même à se rendre à son Eglise pour éviter la solitude.

Le business, pomme de discorde


Les églises sont aussi des lieux où les fidèles recréent des liens sociaux autour des différentes activités. Jean-Marie Tshibangu «estime que les jeunes garçons peuvent se consacrer à des activités dans la paroisse au lieu de perdre leur temps à ne rien faire ou à trainer en mauvaise compagnie. Et les filles apprennent à être joyeuses (des filles qui dansent pendant la messe Ndlr). La paroisse devient un milieu éducatif, en plus de l’école et de la famille ». 

Les mamans et les papas ont aussi leurs activités qui leur permettent de tisser des liens fraternels dans un endroit où ils sont éloignés de leurs familles respectives. «Ils ont des nouveaux enfants, des frères et sœurs dans le Seigneur .» 

Malgré la crise, les Eglises sont des lieux où l’argent circule quand même pour différentes activités, campagnes d’évangélisation, construction du temple, offrandes et dimes. Et pour couronner ces efforts financiers, «on ne peut pas venir dans la maison du Seigneur les mains vides», soutient un Prédicateur.
Et c’est souvent autour des ces fonds que certaines Eglises se disloquent.  
«Certains Pasteurs font de leurs Eglises une activité génératrice de revenus. Et cela pose des problèmes dans la répartition de l’argent ou la gestion des finances peu transparentes», se désole le Prédicateur qui n’hésite pas à comparer cette à tendance de dislocation aux départs des musiciens dans les groupes musicaux de Kinshasa.
Dans cette ville où les Eglises ont la cote, même les politiques cherchent à s’attirer leurs faveurs et sollicitent des prières des Pasteurs. Une Eglise dont le Pasteur avait promis à un candidat à la députation le vote de ces fidèles a perdu certains habitués qui ont vu d’un mauvais œil ce mélange de genre. «On ne peut pas mélanger Dieu et la politique», tranche un chantre de la dite Eglise.

Dans ce business florissant, les musiciens chrétiens tirent aussi leurs épingles du jeu en produisant des albums qui marchent bien. Ces artistes de Dieu demandent d'aussi bons cachets que les musiciens profanes.

Le clou du spectacle


Il faut aussi convaincre les sceptiques afin d'attirer de nouveaux fidèles. Un dispositif a force de persuasion: le «témoignage». Pour ceux qui doutent encore, certains fidèles, visités par la main invisible de Dieu, rapportent des miracles vécus. Des témoignages qui viennent en appui aux prêches des Pasteurs. Ceux qui ont souffert de paludisme à cause de l’insalubrité et des moustiques qui prolifèrent dans cet environnement témoignent eux aussi de leur guérison.

Lorsque ce ne sont pas les témoignages miracles, place aux séances de délivrance filmées, qui tournent au spectacle et sont diffusées sur certaines chaînes de télévision, propriétés des Pasteurs ou responsables d’Eglises. Une cacophonie se développe ainsi dans cet environnement où le religieux à une place de choix dans plusieurs domaines de la vie. Difficile donc de démêler les vrais Pasteurs des faux.

«Jésus a dit, laissez croître ensemble l’ivraie et le blé jusqu’à la moisson, et, à l’époque de la moisson, je dirai aux moissonneurs: "Arrachez d’abord l’ivraie, et liez–la en gerbes pour la brûler, mais amassez le blé dans mon grenier», explique Sébastien Kabw face à la difficulté qu’ont les fidèles d’identifier les bons bergers des mauvais. «Le Maître de l’œuvre s’en occupera le moment venu», conclut-il.

Pendant ce temps, certains fidèles naïfs continuent de s’appauvrir et d'être abusés par des prédicateurs improvisés et sans scrupules qui profitent de la foi en Dieu pour gagner leur vie.

Jacques Matand
SlateAfrique

Nord-Kivu: les FDLR imposent la taxe hebdomadaire de 1500 FC par personne à Lubero



le 5 juin, 2012


Un milicien FDLR

Les rebelles des Forces démocratique pour la libération du Rwanda (FDLR) perçoivent, chaque semaine, la «taxe» de 1500 FC (16 USD) par personne aux populations des localités de Miriki, Kasiki, Kanyasi, Bunyatenge, Mbuavinywa, Viramba et Mbingi,
en territoire de Lubero (Nord-Kivu).

Des sources proches de la société civile du Nord-Kivu affirment que ces militaires rwandais ont instauré cette perception, depuis fin mai dernier, dans ces localités sous leur contrôle.

Le vice-président de la société civile du Nord-Kivu, Omar Kavota, a indiqué que les FDLR réglementent également les heures précises pour se rendre au champ (10 heures à quitter à 14 heures).

Il a indiqué que les rebelles récoltent également dans les champs des paysans.

La société civile du Nord-Kivu se dit inquiète de cette situation et demande aux autorités de rétablir l’autorité de l’Etat dans ces localités du territoire de Lubero. Ces rebelles des FDLR ne sont pas dans leur premier coup dans cette partie de la province du Nord-Kivu.

On rappelle qu’ils pillaient des biens et des bétails, voire des récoltes de la population civile de cette contrée de la RDC.
en territoire de Lubero (Nord-Kivu).

Source: Apareco.org

Situation de l’Est : Le général Etumba s’est expliqué à la Présidence

le 6 juin 2012.



L’instabilité dans le Kivu retient l’attention de toute la nation. Si à l’Assemblée nationale elle a fait l’objet d’un huis clos décrié par certains, cette question sensible s’est invitée au Conseil extraordinaire des ministres hier.

Sous la présidence du Chef de l’Etat, ce conseil a convoqué le chef d’Etat-Major Général des FARDC en vue d’explications approfondies sur la situation de l’Est.

Le Chef de l’Etat et le gouvernement avaient besoin qu’on leur indique clairement où nous en sommes avec les opérations militaires sur le terrain. Ceci en vue d’apaiser l’opinion publique qui trépigne d’une impatience de voir la guerre de l’Est prendre définitivement fin.

Didier Etumba a donné toutes les explications techniques demandées. A savoir que la situation sécuritaire globale de l’Est tourne en faveur du Gouvernement.

Jamais la menace de l’Est n’a été aussi près de connaître son éradication définitive. En attendant de maîtriser les derniers soubresauts de l’insécurité à l’Est, le Gouvernement a pu se rendre compte que la crise du Kivu est multidimensionnelle.

Mais aussi et surtout qu’une maffia pratiquement régionale nourrit cette crise.
C’est le cas ici de noter l’avancée significative de la position gouvernementale par rapport à l’implication supposée des éléments rwandais au sein de la rébellion.

Dans son compte rendu d’hier, le Gouvernement a affirmé que 25 militaires rwandais ont été capturés par la Monusco dans les rangs du M23. Cette affirmation officielle de Kinshasa vient couper court à toutes les rumeurs qui ont circulé autour de cette affaire.

Maturité

L’implication indiscutable d’éléments rwandais pose un autre problème. C’est une crise qui se déclare dans la crise. Elle a des soubassements politiques, diplomatiques et stratégiques très sensibles. Et ce n’est pas une question à prendre au gré d’humeurs.

C’est pour cela que le Gouvernement s’est contenté de transmettre son constat dans un premier temps. Evitant d’émettre le moindre jugement de valeur sur cette affaire pour ne pas compromettre la suite des événements.

A ce stade du dossier, l’évidence qui crève les yeux, c’est que des militaires rwandais, 25 au total, ont pris une part active à la rébellion du M23.


Mais une chose reste sûre : il faut se méfier pour l’instant des pyromanes de tout bord qui jouent aux alarmistes de mauvais augure.

La région des Grands Lacs reste somme toute une poudrière où le moindre faux pas risque de provoquer une tragédie impossible à maîtriser par la suite. L’histoire récente de cette région a appris aux plus avisés qu’une simple déclaration peut coûter très cher à toute la région.

Dans les Grands Lacs africains, il faut savoir tourner sa langue 7 fois avant de se lancer dans des jugements de valeur précipités.

De ce point de vue, et en dépit de tout ce qu’on peut en penser, la décision du huis clos décidée à l’Assemblée Nationale sur la crise de l’Est est à saluer comme un acte de maturité.





LP

De là à conclure d’emblée, sur la simple base de leurs aveux, que le Gouvernement rwandais a planifié leur intrusion au sein du M23, ce qui demande des éléments encore plus probants.

Jouant ainsi à la prudence, la RDC a promis de se prononcer ouvertement sur ce dossier sensible. Nul pour l’heure ne saurait anticiper sur la déclaration du Gouvernement congolais.

Rwanda, attentat du 6 avril 94 : Un nouvel élément dans l’affaire?

2. juin 2012

Dans son édition de ce vendredi 1er juin 2012, le quotidien Libération dévoilait la découverte d’un document dans les archives de l’ONU dont le contenu est une liste d’armement rédigée le jour de l’attentat par les casques bleus et qui mentionnerait la possession, par les ex- FAR de missiles SA7 et Mistrals, deux types d’armement écartés par le rapport balistique d’experts dans le dossier Français.


Attentat du 6 Avril

Selon Bernard Lugan, expert du Tribunal Pénal International pour le Rwanda,Le TPIR, ce document était connu de tous les experts, et il a été discrédité dans les débats au TPIR.

Toutefois, en supposant que ce document soit nouveau, qu’apporte de neuf au dossier de l’attentat du 6 avril 1994?

Les missiles qui, selon le document, étaient aux mains des ex-FAR ont été écarté de la liste des armes qui pouvaient abattre l’avion du feu Président rwandais et son homologue burundais.

Les missiles SA 7 ne peuvent en effet selon les experts mandatés par le Juge Trevidic, être utilisés de nuit et les mistrals ont été jugés « trop récents » et « trop sophistiqués ». Selon le rapport des experts, la première exportation date de 1996 pour le Mistral 1 et le Mistral 2 n’est produit que depuis l’an 2000.

En supposant que le Mistral 1 ait pu être exporté illégalement, une analyse supplémentaire d’experts est nécessaire pour affirmer qu’un tel missile aurait pu abattre le Falcon 50 du Président Juvenal Habyarimana, en produisant les mêmes effets : trajectoire, temps entre le tir et la destruction, la trajectoire des débris, les lieux probables de tir, etc.

Ces missiles de fabrication française datent de 1983 et ont été utilisés dans la guerre du golfe. Mis à part la France, au moins deux pays avaient passé une commande des Mistrals en 1989 voire avant.

Il s’agit de l’Afrique du Sud et de la Belgique qui aurait commandé 800 missiles de ce type, selon un article de Pascal Krop, “Des missiles bien embarrassants pour l’Élysée” dans l’Événement du Jeudi du 8 mars 1989.

Précautions

Mis à part l’affirmation de l’expert Bernard Lugan, quelques éléments et les circonstances de l’apparition d’un tel document poussent à la précaution :

Premièrement, le moment choisi pour publier l’information coïncide au jour de remise des observations des parties civiles, quant au rapport d’experts sur l’attentat. Cette publication a eu pour effet de faire passer ces observations sous silence médiatique ou presque.

D’autant plus qu’elles remettent sérieusement en doute les éléments qui ont conduit récemment à privilégier trois positions se trouvant au camp Kanombe des ex-FAR et dans ses alentours, comme lieu de tir.

Deuxièmement ce ne serait pas la première fois qu’un document prétendu appartenir aux archives de l’ONU s’avère être faux ou inexistant. En effet, dès fin 1994, plusieurs journalistes et experts ont fait écho d’un fax prouvant la planification du génocide rwandais envoyé au siège Newyorkais de l’ONU par le Général Dallaire, alors commandant des casques bleus au Rwanda.

Ce fax s’est avéré être faux lorsque Me Tremblay avocat de la défense au TPIR dans le procès « Militaire I » a tenté d’obtenir l’original. Etrangement la même journaliste britannique Linda Melvern qui a découvert le document des missiles, a fait écho de ce fax (dans son livre « Conspirancy to murder, the Rwandan genocide»), même après que l’ONU ait confirmé en 2003 qu’il n’a jamais existé.

Troisièmement, le type de missile utilisé est l’élément où la tous les experts qui se sont penchés sur la question sont d’accord, il s’agit de SA 16.

C’est également l’élément le plus incontestable car les lances missiles retrouvés ont permis d’identifier le stock d’où ils provenaient : ils auraient fait partie d’un lot d’armements commandé en Russie par l’Ouganda allié du Front Patriotique Rwandais, FPR accusé dans l’enquête des Juges français Marc Trévidic et Nathalie Poux.

Le quatrième élément est la lettre rédigée le 6 avril 1994 et adressée (mais non livrée), aux deux commandants des armées en conflits, le Général Déogratias Nsabimana chef d’état-major des FAR et Paul Kagame Commandant en chef des rebelles-FPR. Cette lettre du Général Dallaire leur demandait de fournir l’inventaire de l’armement lourd à leur disposition.

Le dernier élément est que la même information fut évoquée par Human Right Watch en attribuant la source à un officier du renseignement de la MINUAR Monsieur Moorhouse. Seulement, ce dernier nie toujours avoir fourni une telle information.

Enfin, en supposant que le document soit authentique, il semble ne rien apporter de neuf à l’enquête, étant donné que les lances missiles utilisés ont été retrouvés, identifiés et tracés : ce sont des SA 16.

Contactée par RFI, l’ONUa refusé d’authentifier le document

La question à se poser c’est, comment et pourquoi en de telles circonstances et avec de telles incertitudes l’entourant, un tel document a pu faire la une des principaux médias occidentaux? Une volonté de détourner l’attention?

JF Singiza
Jambonews.net

Attaque contre un campement des FARDC : Une main noire au Nord-Kivu


Mercredi, 06 Juin 2012



La guerre de l’Est apporte chaque jour à nos compatriotes la preuve que le pays est victime d’un plan de déstabilisation ficelé par une main noire qui se trouve planqués à Kigali.

Le commanditaire de l’insécurité récurrente qui empoisonne le quotidien des milliers de familles congolaises au Nord-Kivu est désormais connu : le Rwanda, Malheureusement, ce pays voisin bénéficie des complicités internes congolaises dans son travail de sape de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo.

Une évidence crève désormais les yeux : les FARDC ne se battent pas contre des mutins congolais mais plutôt contre des éléments de l’armée régulière du Rwanda, dont la dernière vague a été déversée dans les rangs du CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple) et du M.23 (Mouvement du 23 Mars 2009) depuis le mois de février 2012.

Recrutés, entraînés, armés, payés et nourris par le régime de Kigali, les ennemis de la paix et de la stabilité du Congo viennent d’être démasqués par les Nations Unies ainsi que plusieurs organisations internationales de défense des droits de l’homme.

L’on peut dès lors douter de la paternité de l’attaque d’un campement des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) dans la localité de Kaseye, à 80 kilomètres de Lubero, au Nord-Kivu, imputée aux éléments des FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda) associés à une nébuleuse Maï-Maï.

Lorsque l’on se livre à une analyse sérieuse des enjeux politiques, militaires, économiques, financiers et fonciers dans cette partie de la République, l’on constate que le régime de Kigali suscite et instrumentalise systématiquement des micro-rébellions chargées de brouiller continuellement les cartes sur le terrain.

Il est bizarre que l’on parle maintenant d’attaques des FDLR contre les positions des FARDC alors que le week-end dernier, les officiels rwandais accusaient l’armée congolaise d’être en collusion avec ces miliciens génocidaires.

Nombre d’observateurs pensent que lé coup fourré reçu par les troupes loyalistes congolaises est venu des rebelles rwandais cachés sous les labels CNDP et M.23. Car, la cartographie du front indique que les FARDC font pour le moment la chasse à ces « forces négatives » étrangères dans toutes les localités où leur présence est signalée.

Ne pas se tromper de cibles

A l’heure où le général Bosco Ntaganda et le colonel Sultani Makenga ainsi que ce qui leur reste encore comme troupes, en attendant des « renforts » que Kigali aura de plus en plus du mal à infiltrer en territoire congolais depuis la dénonciation de son double jeu par les structures onusiennes, les autorités civiles et militaires congolaises ne devraient pas se tromper de cibles.

Des investigations poussées devraient être menées par les services de renseignements civils et militaires de notre pays en vue d’identifier clairement toutes les «forces négatives » présentes au Nord-Kivu et pourquoi pas au Sud-Kivu, afin de mettre définitivement hors d’état de nuire aussi bien les nébuleuses autochtones armées que les rébellions fabriquées par Kigali.

Cet exercice s’avère urgent et capital dans la recherche d’une paix durable au Nord-Kivu. Les FARDC devraient savoir dans quelles directions canaliser des actions de traque de tous les groupes armés nuisibles à la paix, et chargés de la sale besogne de fructifier le fond de commerce du Rwanda, à savoir l’insécurité à l’Est de la RDC.

Rassurer les Congolais


Parallèlement aux actions militaires menées par les FARDC au Nord-Kivu, les décideurs politiques devraient rassurer les Congolais au sujet de la coopération militaire et sécuritaire entre Kinshasa et Kigali, laquelle paraît assise sur des bases suspectes.

Nos compatriotes voient en effet d’un très mauvais œil le dernier accord entre les gouvernements congolais et rwandais, singulièrement en ses dispositions imputant à la partie congolais l’entière responsabilité de la traque des FDLR d’une part, et, d’autre part, donnant le feu vert à l’armée et aux services de sécurité rwandais pour faire du safari à travers le Nord-Kivu à leur convenance.

Pendant combien de temps notre pays va-t-il continuer à laisser son dispositif de défense et de sécurité à la merci du voisin rwandais ? On rappelle qu’entre 1996 et 2003, Kinshasa avait ouvert tous grands aux militaires et agents secrets rwandais, ougandais, burundais, érythréens, angolais, namibiens et zimbabwéens ses services spéciaux, ses bases militaires, ses cartes militaires, ses plans de défense et de sécurité.

Nos concitoyens ont toutes les raisons d’être inquiets, d’autant que le huis clos qui enveloppe la question orale avec débat soulevée par le député national Martin Fayulu a permis au mystère qui persiste au sujet de la situation sécuritaire du Nord-Kivu de ne pas être percé à travers un débat public.

La vigilance doit être de mise car la patrie est en danger avec des chevaux de Troie qui écument l‘Est de la République.


Kimp

Est de la RDC: Guerre de prédation

L’Ituri est de nouveau en ébullition. Des groupes armés ont décidé de reprendre les armes après une période d’accalmie. Cette trêve de courte durée n’a pas été mise à contribution pour consolider la paix durement acquise au bout d’âpres négociations.

 

Plusieurs morts et des déplacements massifs de la population enregistrés n’ont pas dissuadé les protagonistes à reprendre les armes. Cette reprise des affrontements se fait sur fonds de mise en place d’une plate-forme regroupant des belligérants ayant des revendications séparatistes.
 
Un paravent qui cache les motivations réelles de ces apprentis sécessionnistes. Il s’agit tout simplement d’une tentative destinée une fois de plus à légitimer la prédation des ressources naturelles de l’Ituri.
 
Les vraies revendications de la coalition des groupes armés de l’Ituri reposent sur le contrôle par des forces obscures de ces ressources naturelles, essentiellement le pétrole et l’or. Il n’y en a pas d’autres.
 
A l’époque, des entreprises pétrolières se sont livrées à des batailles pour prendre le contrôle de l’or noir. La main invisible qui tente de replonger l’Ituri dans l’instabilité généralisée procède de la même manière.
 
L’instrumentalisation et la réactivation de ces groupuscules armés visent à empêcher la République d’exercer le contrôle de cette partie du territoire national. Ce faisant, les prédateurs tiennent à prendre possession, sans grand frais, du pétrole, de l’or, du café, du bois,… que regorge ce district de la Province Orientale.
 
Le fait de n’exprimer aucun remord après autant de morts enregistrés par le passé démontre que pour ces prédateurs, le pétrole mélangé de sang ne constitue pas un motif de regret.
 
Pour eux, le sang des Congolais, des Ituriens en particulier, n’a aucune valeur marchande par rapport aux revenus à tirer - tout à leur profit.
 
Les revendications autonomistes, venues du bord du lac Albert, ne sont que de la poudre aux yeux. Les multinationales ont donc décidé d’endeuiller une fois plus les Ituriens, avec la sous-traitance avérée des groupuscules en mal de gloriole.
 
Tôt ou tard, la justice se saisira de tous ceux qui avaient trempé dans des manipulations de la population dans le but de cacher les visées prédatrices de leur entreprise.
 
De son côté, le gouvernement, qui a fourni d’incroyables efforts pour ramener la paix dans cette partie du pays, ne devra pas s’avouer vaincu. Des efforts supplémentaires devront être mis en branle pour mettre un terme à ces aventures prédatrices des acteurs tant nationaux qu’internationaux, du reste bien identifiés.
 
La gravité de la situation pousse à des actions d’envergure pour l’instauration d’une paix définitive en Ituri.
L’armée nationale, qui monte en puissance, a donc du pain sur la planche.

La réponse à cette guerre de prédation ne peut être qu’un déploiement conséquent des Forces armées de la République démocratique du Congo pour décourager «les aventuriers» de l’Ituri regroupés au sein de la Cogai.

Conflit en Ituri : l’arbre qui cache la forêt



La création de la «Coalition des groupes armés de l’Ituri (Cogai)» n’est, en réalité, que l’arbre qui cache la forêt. Il s’agit d’un énième épouvantail qu’agite l’Ouganda afin de jouer, comme le Rwanda, sa partition dans le plan de balkanisation de la RDC.

Les «prédateurs» poussent Kampala à annexer les localités de la Province Orientale riches en or, pétrole, diamant, etc.

Au-delà du conflit identitaire entre Hema et Lendu qui mine depuis des années le district de l’Ituri (Province Orientale), des forces invisibles agissent dans l’ombre pour le contrôle des ressources naturelles de cette partie de la RDC, principalement l’or et le pétrole du lac Albert.
 
La création d’une Coalition des groupes armés de l’Ituri (Cogai) vient, comme une pièce, compléter le puzzle conçu par les balkanisateurs du pays et démonté à dessein de temps en temps afin de créer la distraction dans l’opinion nationale.
 
Ce qui est vrai est que la succession des faits n’est pas fortuite. Il y a certes une corrélation. En effet, les événements du Nord-Kivu qui mettent en cause les rebelles du M23 et ceux, tout récemment de l’Ituri, ont certainement le même fil conducteur. Ils tiennent à une logique qui, à terme, vise au démantèlement de la RDC.
 
Les révélations faites récemment par des mutins du M23 ont mis à nu l’implication de Kigali dans l’insécurité qui prévaut dans le Nord-Kivu. Il n’est pas exagéré d’affirmer que Kigali et Kampala sont en intelligence.
 
Depuis la guerre de libération de 1996 menée par les troupes de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), le Rwanda et l’Ouganda ont toujours évolué en duo dans leurs actions en terre congolaise.
 
Que la création de la Cogai intervienne juste après la rébellion du M23 ne relève pas du hasard. Tous ces événements tiennent à un chronogramme dont les étapes sont bien calibrées. Il s’agit, à terme, de se partager la partie Est de la RDC : l’Ituri pour l’Ouganda et le Nord-Kivu pour le Rwanda.
 
A Kinshasa, cette réalité est occultée. Les institutions de la République en parlent du bout des lèvres ou pas du tout. On dirait qu’elles seraient taraudées par une peur bleue d’un adversaire aux tentacules énormes.
Y avait-il opportunité de créer la Cogai ? Pas du tout.
 
A première vue, rien ne pouvait justifier la coalition des groupes armés de l’Ituri autour d’une cause commune telle que l’érection de ce district en une province. Pour autant que la question a été déjà vidée avec la Constitution de 2006 qui a prévu le passage de 11 à 26 provinces, dont l’Ituri. De ce point de vue, l’une des principales revendications de la Cogai paraît vide de sens.
 
REGARD D’UN NATIF DE L’ITURI

Pourquoi la Cogai s’est, malgré tout, lancée dans son aventure ? La réponse à cette question est la clé à l’énigme. Rappelons-nous qu’en 2003, sur fonds de luttes d'influence régionales aux motivations politiques et économiques, les tensions entre populations Hema et Lendu avait dégénéré en guerre sanglante, faisant plus de 50 000 morts et 500 000 déplacés, avec femmes et enfants pour principales victimes.
 
C’est par un accord conclu, sous la houlette de la communauté internationale, qu’une paix relative est revenue dans cette partie de la Province Orientale.
 
En réalité, les ennemis du Congo se sont greffés sur les revendications légitimes des populations de l’Ituri. La question identitaire n’est qu’un leurre, un guet-apens dans lequel les communautés sont tombées. Dans le cas d’espèce, le scénario se dessine déjà.
 
De la décentralisation on va aboutir à l’autonomie en passant par le fédéralisme. Au finish, ce sera la balkanisation laquelle va ouvrir la voie à l’annexion de ce territoire du Congo à l’Ouganda. Le jeu de récupération se fera par la manipulation des élites au pouvoir et au sein de la Société civile.
 
C’est ce que tente d’ailleurs de démontrer avec brio le général Unyon de la Police nationale congolaise – du reste originaire de l’Ituri – dans un ouvrage intitulé : «Le conflit armé en Ituri : la problématique de sa prévention et de sa gestion». L’ouvrage est sorti en 2009, soit trois ans avant la création de la Cogai.
 
Originaire de l’Ituri, l’auteur pose la vraie problématique : «Bien que, à des degrés divers, d’autres ethnies se soient également impliqués dans le conflit de l’Ituri, les acteurs locaux les plus visibles sont les Hema et les Lendu. D’autres acteurs visibles sont constitués de groupes armés, de quelques Etats de la région des Grands Lacs, de certaines organisations internationales de quelques organisations non gouvernementales».
 
Visionnaire, le général Unyon prévenait «Les conséquences du conflit de l’Ituri sont énormes et si dramatiques qu’il faudra plusieurs années pour panser les plaies ouvertes». Aujourd’hui, l’histoire lui donne raison.
 
RETOUR A LA CASE DEPART

En Ituri, c’est donc le retour à la case départ. La création de la Cogai prouve que les accords de paix conclus jusqu’alors n’ont été que des solutions de surface qui n’ont pas atteint la racine du mal. Et, le vrai problème de l’Ituri n’est pas forcément l’objectif primordial de la Cogai.
 
Comme en 2003, c’est encore l’Ouganda et le Rwanda qui rythment la cadence. En effet, chacun joue sa partition pour tirer le drap de son côté et avoir gain de cause. La simultanéité du regain de tension tant au Nord-Kivu qu’en Ituri est la parfaite illustration de la connexion entre les deux pays.
 
En matière géostratégique, rien ne relève du domaine du hasard. De même, en diplomatie, la simultanéité des actions présage nécessairement d’une concertation préalable.
 
A la limite, il s’agit de se partager l’Est de la RDC. L’Ouganda lorgne l’Ituri et le Rwanda se contentera du Nord-Kivu. Les actuels de l’Est du pays tiennent à ce schéma. Les accusations portées contre le Rwanda sur son soutien plus qu’avéré au M23 tiendraient à cette logique. Pas étonnant que la Cogai bénéficie des mêmes faveurs auprès de l’Ouganda.
 
Pendant ce temps que fait le gouvernement ? Rien du tout. Dans le Nord-Kivu, par exemple, Kinshasa continue à attendre, malgré toutes les preuves fournies autant par l’Onu que Human Rights Watch, les conclusions d’une pseudo-mission d’enquête pour se prononcer officiellement. En Ituri, par contre, le silence est total. Sans doute, le dossier est classé «secret défense».
 
C’est la mode depuis un temps. Le drame est que plus Kinshasa se réserve, plus les tireurs de ficelles poursuivent leur œuvre de pillage des ressources naturelles du pays. Et pendant ce temps, Kigali et Kampala se frottent les mains.

Que vient chercher le président rwandais Kagamé en RDC?

Les récentes accusations de l’aide rwandaise fournie à la rébellion à l’est du Congo risquent de dégrader les relations diplomatiques entre les deux pays.

Le président rwandais Paul Kagamé, lors d'une conférence à New York, 22 septembre 2011 REUTERS/Lucas Jackson

C’est une révélation troublante. Le Rwanda soutiendrait la rébellion de fidèles du jeune général Bosco Ntaganda alias «Terminator» regroupés dans le M23. C’est ce que révèlent des enquêtes menées par la Mission d’observation des Nations unies au Congo (Monusco) et les autorités de la République démocratique du Congo elles-mêmes.
 

Des accusations embarrassantes


La base de leurs affirmations se fonde sur des témoignages de jeunes rwandais désœuvrés recrutés pour combattre aux côtés des rebelles et qui ont été arrêtés ou se sont rendus d’eux-mêmes. Comme il fallait s’y attendre, le Rwanda a nié une quelconque implication dans ce qui se passe dans la zone frontalière avec la RD Congo.

Kinshasa n’a pas voulu non plus envenimer la situation en accusant ouvertement son voisin. Les autorités congolaises préfèrent jouer la carte de la prudence en affirmant ne pas avoir de preuves que les combattants interrogés soient effectivement des Rwandais comme les intéressés le soutiennent mordicus. Une preuve qu’entre la RD Congo et le Rwanda, il ne faut pas mettre le doigt parce que les deux pays sont comme un arbre et son écorce.

N’empêche, la situation est tout de même embarrassante. Qu’est-ce que le Rwanda pourrait bien aller chercher dans cette partie tourmentée du territoire de son géant voisin? A priori, rien. Il y eut un moment où la réponse à cette question était évidente pour deux raisons.

L’attitude invasive du Rwanda ne date pas d’hier


La première raison est la présence dans la zone frontalière des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) accusées d’être à l’origine du génocide par le régime de Paul Kagamé. De temps à autre, l’armée rwandaise n’hésitait pas à faire des incursions chez son voisin pour faire le coup de feu contre ces forces considérées comme une menace potentielle et permanente contre le pouvoir du Front patriotique rwandais (FPR) à Kigali.

Pour des raisons sécuritaires, le pays des mille collines se sentait obligé d’agir ainsi, surtout que la RD Congo ne faisait rien pour que son territoire ne serve de base arrière pour déstabiliser son petit voisin. La deuxième raison qui avait amené le Rwanda à prendre pied chez son voisin concerne les richesses minières de ce dernier.

L’instabilité chronique conjuguée avec l’impuissance du pouvoir central à Kinshasa a ouvert la porte à un pillage en règle des richesses. Et il n’y avait pas que les rébellions et les mouvements armés qui s’y adonnaient à cœur joie. Des pays voisins comme l’Ouganda et le Rwanda n’hésitaient pas à se servir quand l’occasion se présentait.

Il n’y a pas de raisons de déstabiliser le grand voisin


Mais aujourd’hui, toutes ces raisons sont caduques. Du moins officiellement. Les FDLR ne constituent plus une grande menace pour Kigali comme par le passé au point de nécessiter des incursions chez le voisin. Il en est de même pour les miliciens. De plus, les relations entre le Rwanda et la RD Congo peuvent être considérées comme étant au beau fixe après des périodes de tensions.

Logiquement, l’un n’a plus besoin de déstabiliser l’autre par mouvements rebelles interposés. Alors, qu’est-ce qui peut bien amener Kigali à jouer les trouble-fêtes malgré tout? Sont-ce les richesses minières inépuisables qui attisent les convoitises d’un pays qui n’en est pas doté?

Ou bien est-ce un coup de main à Bosco Ntaganda, lâché par Kinshasa, mais qui aurait toujours des sympathies de l’autre côté? Une fois de plus, on se perd en conjectures dans cette région trouble.

Séni Dabo
(Le Pays)

Est de la RDC : 240 morts dans les combats contre les mutins, selon Kinshasa

06/06/2012  Par Awa Diallo, à Kinshasa


L'armée congolaise compterait 40 morts depuis le début des affrontement avec les mutins.
© Phil Moore/AFP

C’est le premier bilan officiel des combats. Selon Kinshasa, les affrontements qui opposent depuis plus d’un mois l’armée et les mutins dans la province du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, ont été surtout meurtriers pour les dissidents issus de l’ex-rébellion du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Bosco Ntaganda, que le gouvernement estimait mi-mai à environ 300 hommes.

« Le bilan humain des engagements provoqués par cette mutinerie est le suivant : 200 mutins (…) ont été tués ; 250 d’entre eux ont été blessés ; 374 mutins se sont rendus aux FARDC (Forces armées) dont 25 citoyens rwandais. Une quantité importante d’armes et munitions ont été récupérées par les FARDC. Du côté des FARDC, on déplore 40 morts et 93 blessés », indique le compte-rendu du conseil des ministres de lundi, qui ne mentionne pas de victimes civiles.

Onze citoyens rwandais, dont un mineur, se sont rendus à la Mission de l’ONU pour la stabilisation du Congo (Monusco) en disant avoir été recrutés et formés dans leur pays pour combattre en RDC aux côtés des mutins, indique par ailleurs un rapport de l’ONU révélé fin mai par la BBC. Dans les colonnes de Jeune Afrique, la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, a quant à elle dénoncé des « fausses informations ». Depuis, 14 autres Rwandais ont fait défection.

Les 25 citoyens du pays des Milles collines ont été interrogés « à la fois par les autorités congolaises, rwandaises et aussi le CICR (Comité international de la Croix-Rouge). En l’état actuel de la situation, les personnes n’ont pas encore été rapatriées. Elles sont encore entre les mains de la Monusco », a affirmé mercredi à la presse Amadou Ba, porte-parole militaire intérimaire de la mission onusienne.

Partie émergée de l'iceberg

Cette poignée d’homme n’est que la partie émergée de l’iceberg, si l’on en croit l’ONG américaine des droits de l’Homme Human Rights Watch. Dans un rapport publié lundi, elle assure notamment que « des responsables militaires rwandais ont fourni des armes, des munitions » aux mutins, ainsi qu’« environ 200 à 300 recrues », dont des civils et des mineurs recrutés de force.
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Par Awa Diallo, à Kinshasa

Un coup d’Etat se préparait à Goma contre Paul Kagame, affirme un journal Rwandais


le 6 juin 2012.



Pendant que l’actualité dans la région des Grands Lacs reste dominée par l’arrestation des militaires de l’armée rwandaise qui combattent dans les rangs des rebelles du M23 qui affrontent les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) depuis quelques semaines, un journal rwandais parle de l’échec d’un coup d’Etat qui était en préparation contre Paul Kagame.

Selon le journal «IBIYAGA BIGARI», dans sa publication n°07 du 21 au 31 mai 2012 paraissant à Kigali, un coup d’Etat se préparait à Goma (chef-lieu de la province du Nord-Kivu en RDC) et Gisenyi (la deuxième grande ville du Rwanda qui est voisine à Goma) contre le président Paul Kagame.

Le tabloïd rwandais indique que des officiers supérieurs de l’armée rwandaise venus de Kigali, des officiers rwandais qui vivent en exil, des opposants rwandais et des Congolais seraient les auteurs de ce putsch.

Toutefois, le journal «IBIYAGA BIGARI» n’indique pas clairement les lieux exacts où se réunissaient les comploteurs que ce soit à Goma ou à Gisenyi. Bien plus, il ne cite aucun nom des principaux instigateurs de ce coup.

Museveni aussi visé

Le journal rwandais ne parle pas seulement du complot raté contre l’homme fort de Kigali. Il affirme également qu’un autre «coup d’Etat» contre le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni a aussi raté de justesse.

Allant loin dans sa réflexion, «IBIYAGA BIGARI» semble faire un lien entre les rumeurs sur les «putsch ratés» contre Paul Kagame et Yoweri, et la situation de guerre qui prévaut dans l’Est de la République Démocratique du Congo.

Et le journal de s’interroger : «A qui profite la guerre qui se passe maintenant en RDC?». «IBIYAGA BIGARI» rappelle que trois photos (celles de Joseph Kabila, de Laurent Nkunda et de Bosco Ntaganda) étaient mises à l’affiche de ladite publication.

Que comprendre?

Dans certains milieux politiques, on a du mal à croire à cette information dans la mesure où depuis quelques années, Kinshasa et Kigali entretiennent de très bonnes relations. Il est donc difficile de comprendre que le gouvernement de Kinshasa puisse laisser des officiers rwandais et congolais monter un complot contre son collègue Kagame sur le territoire congolais.

En plus, cette information paraît surprenante parce qu’au début du mois de mai, les chefs d’Etat-major des armées rwandaise et congolaise s’étaient rencontrés dans la ville de Gisenyi, au Rwanda.

Et quelques jours après, ce sont les ministres de la Défense de deux pays qui s’étaient réunis dans la même ville. Que gagnerait le régime Kabila en cautionnant un coup d’Etat au Rwanda? C’est la question que d’aucuns peuvent se poser.

Selon certains analystes, cette information est livrée dans le seul but de détourner l’intention de la communauté internationale par rapport aux nouvelles selon lesquelles les militaires recrutés et formés au Rwanda renforcent les rangs des rebelles du M23 qui combattent les FARDC.

Affaire à suivre!




Thomas NABOR

Des Rwandais dans M23 ? Un gardien de vaches était chargé de recruter les candidats

le 5 juin 2012.



Le dossier brumeux sur l’implication du Rwanda dans les affrontements meurtriers au Nord-Kivu entre les mutins du M23 et l’armée régulière congolaise commence à livrer quelques pans de ses secrets après la publication par la BBC du rapport confidentiel de l’Onu accusant le Rwanda de soutenir la nouvelle rébellion le Mouvement du 23 mars, M23 en lui fournissant armes et munitions et…hommes formés à Kigali.

Ces volontaires étaient recrutés par un…bouvier de la localité de Mudende qui garde des vaches appartenant à un gradé de l’armée rwandaise. À ce jour, une cinquantaine de ces combattants de nationalité rwandaise se sont rendus aux autorités congolaises, vingt-quatre sont hébergés dans le camp de la force de paix des Nations unies, la Monusco, à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, tandis que treize autres sont entre les mains de l’armée régulière (FARDC), et enfin quatorze qui étaient arrivés à la Monusco le 17 mai dernier ont disparu, probablement reconduits en toute discrétion au Rwanda.

Depuis la révélation du contenu de ce rapport accablant, le Rwanda et la RDC ont décidé de mener une enquête conjointe pour éclairer ce dossier qui implique pour la énième fois le Rwanda de déstabiliser son voisin le Congo Kinshasa. Des officiers militaires congolais et rwandais ont interrogé les 29 et 30 mai les onze premiers soldats rwandais du M23 à s’être rendus à la Monusco à l’intérieur du camp de l’Onu à Goma, en présence de témoins membres de la force des Nations unies.

Les résultats de ces auditions ne laissent en effet plus de doute sur l’implication du Rwanda dans les combats qui se déroulent au Nord-Kivu, précisément sur le caractère systématique du recrutement et de l’envoi de ressortissants rwandais vers la RDC, où ils combattent l’armée régulière aux côtés des mutins du M23. Selon plusieurs témoignages de ces jeunes Rwandais, le personnage clé du recrutement des soldats est incontestablement un bouvier (un gardien de vaches) qui joue le rôle d’agent recruteur dans la région de Mudende.

Il approche les jeunes désœuvrés des villages et leur dit » qu’il y a de l’embauche dans l’armée rwandaise « . Une fois un grand nombre de volontaires rassemblés, le bouvier recruteur prend soin d’organiser lui-même le transport des recrues par autobus qui seront rassemblées à Kinigi, à l’entrée d’un parc naturel célèbre pour ses gorilles.

Leurs effets personnels, cartes d’identité, téléphones portables et argent liquide rwandais sont confisqués. De là, privés de toute identification, ils partent en colonnes à pied vers la forêt de Runyioni, subissant au passage une formation militaire sommaire, avant de se retrouver en territoire congolais.

Ces Rwandais ne sont pas des soldats professionnels. Ils sont jeunes, à peine vingt ans, de milieu rural défavorisé, recrutés pour la plupart dans les collines de Mudende, à quelques kilomètres de la frontière congolaise. Runyioni est présentée comme la place forte des mutins du M23. Ils y tiennent deux collines frontalières du Rwanda que les FARDC s’efforcent de reprendre depuis plusieurs semaines.

C’est la plupart du temps en fuyant les bombardements que les jeunes recrues se sont rendues à la Monusco ou aux FARDC. On rapporte que beaucoup auraient réussi à regagner leurs villages, d’autres seraient encore en train d’errer dans cette région forestière, cherchant des voies et moyens de rejoindre leurs villages.

Le récit des rescapés était poignant quant à la sale besogne qui était la leur au début de leur service militaire. L’un des rescapés de cette fuite a raconté avoir croisé au moins une soixantaine de jeunes en train de fuir.

» Arrivés à Runyioni, nous avons vu des militaires blessés « , a-t-il dit aux enquêteurs. » Nous avions peur, nous étions démoralisés, nous n’avions à manger que quelques pommes de terre « . » Au début, on nous employait à chercher de l’eau et du bois, à porter des caisses de munitions, et installer les bâches des bivouacs, mais quand les bombardements ont commencé, il fallait que l’on aille sous le feu récupérer les blessés dans les trous de fusiliers « . » On m’a envoyé chercher des bambous pour confectionner des brancards « , déclare l’un d’eux, » j’en ai profité pour m’échapper en longeant une rivière.

« . Après deux jours de marche, certains de ces jeunes en fuite ne savaient plus s’ils se trouvaient au RDC ou au Rwanda quand ils sont arrivés à proximité d’un camp de la Monusco à Rugari en RDC. Défendre » ceux qui parlent notre langue » Au commencement était l’intox, le bourrage de cerveaux de ces jeunes recrues à qui on inculquait l’idée selon laquelle elles étaient recrutées pour une mission : la défense de leur langue que le gouvernement congolais combattait. Interrogés par les enquêteurs congolais et onusiens sur les raisons de cette guerre, ces jeunes recrues ne savent pas grand-chose. »

On nous a dit qu’il fallait que l’on défende ceux qui parlent notre langue, que le gouvernement congolais combattait la langue rwandaise, et que nous devions nous battre pour la protéger « . Tous ont entendu dire que leur » grand chef » était le général Bosco Ntaganda, et qu’il leur rendrait visite à la fin de leur formation, mais ils déclarent ne l’avoir jamais vu.

Le nom d’un autre chef du M23 présent à Runyioni est souvent cité : le major Rukara. Alors que c’est le général Sultani Makenga qui dirige cette nouvelle rébellion. Alors, qui est ce » nouveau » Rukara ? Si cet officier n’est pas fictif, tout porte à croire qu’il serait Rwandais et que les géniteurs du M23 auraient pris soin de remplacer le pion de Sultani Makenga par Rukara.

En enquêtant, les enquêteurs congolais et onusiens ont remarqué ce fait fort troublant : les premières défections des proches de Bosco Ntaganda au sein des FARDC datent du 9 avril dernier.

Or, plusieurs des recrues rwandaises déclarent avoir été acheminés sur le territoire congolais dès le mois de février. Ce qui a poussé certains analystes plus avertis de conclure au fait que la nouvelle guerre congolaise est simplement une agression préméditée minutieusement préparée de longue date. »

C’est la preuve d’un plan minutieusement préparé de longue date, une infiltration pour une agression préméditée « , dit un responsable qui tient à garder l’anonymat. Les FARDC affirment détenir, à Goma, neuf anciens miliciens des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda) qui auraient rejoint le M23, après avoir été désarmés et rapatriés au Rwanda par la Monusco.

Ce groupe rebelle a été constitué à l’origine par d’anciens militaires des Forces armées rwandaises, accusés d’avoir perpétré le génocide de 1994, avant de fuir vers le Congo lors de l’arrivée au pouvoir du président Kagamé. Les éléments des FDLR sont présentés à l’opinion internationale comme ceux qui cherchent à déstabiliser le pouvoir de Kigali, avec la particularité de mener leurs actions meurtrières uniquement sur le territoire congolais.

Ce mouvement est en principe le pire ennemi du Rwanda. Un autre fait fort troublant. Quelle sera la réaction de la partie congolaise face à ces révélations fort troublantes qui mettent en cause un voisin dont les relations avec le Congo Kinshasa n’ont jamais été claires depuis des lustres ?

En effet, depuis 1994, l’ingérence du Rwanda dans la situation qui prévaut dans la partie orientale de la RDC reste un secret pour ceux qui connaissent mal le pays de Paul Kagamé. Donc, il n’ya aucun doute : ce qui est présenté comme une mutinerie dans l’est de la RDC n’est en réalité qu’une belle initiative du Rwanda.





Kléber Kungu

Comme le Rwanda : L'Ouganda veut annexer les localités de la Province Orientale du Congo


06/06/2012
Yoweri MUSEVENI et Paul KAGAME


La création de la «Coalition des groupes armés de l’Ituri (Cogai)» n’est, en réalité, que l’arbre qui cache la forêt. Il s’agit d’un énième épouvantail qu’agite l’Ouganda afin de jouer, comme le Rwanda, sa partition dans le plan de balkanisation de la RDC.

Les «prédateurs» poussent Kampala à annexer les localités de la Province Orientale riches en or, pétrole, diamant, etc. Pendant ce temps que fait le gouvernement de RDC ? Rien du tout. Le drame est que plus Kinshasa se réserve, plus les tireurs de ficelles poursuivent leur œuvre de pillage des ressources naturelles du pays.

Au-delà du conflit identitaire entre Hema et Lendu qui mine depuis des années le district de l’Ituri (Province Orientale), des forces invisibles agissent dans l’ombre pour le contrôle des ressources naturelles de cette partie de la RDC, principalement l’or et le pétrole du lac Albert.

La création d’une Coalition des groupes armés de l’Ituri (Cogai) vient, comme une pièce, compléter le puzzle conçu par les balkanisateurs du pays et démonté à dessein de temps en temps afin de créer la distraction dans l’opinion nationale.

Ce qui est vrai est que la succession des faits n’est pas fortuite. Il y a certes une corrélation. En effet, les événements du Nord-Kivu qui mettent en cause les rebelles du M23 et ceux, tout récemment de l’Ituri, ont certainement le même fil conducteur. Ils tiennent à une logique qui, à terme, vise au démantèlement de la RDC.

Les révélations faites récemment par des mutins du M23 ont mis à nu l’implication de Kigali dans l’insécurité qui prévaut dans le Nord-Kivu. Il n’est pas exagéré d’affirmer que Kigali et Kampala sont en intelligence.

Depuis la guerre de libération de 1996 menée par les troupes de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), le Rwanda et l’Ouganda ont toujours évolué en duo dans leurs actions en terre congolaise.

Que la création de la Cogai intervienne juste après la rébellion du M23 ne relève pas du hasard. Tous ces événements tiennent à un chronogramme dont les étapes sont bien calibrées. Il s’agit, à terme, de se partager la partie Est de la RDC : l’Ituri pour l’Ouganda et le Nord-Kivu pour le Rwanda.

A Kinshasa, cette réalité est occultée. Les institutions de la République en parlent du bout des lèvres ou pas du tout. On dirait qu’elles seraient taraudées par une peur bleue d’un adversaire aux tentacules énormes.

Y avait-il opportunité de créer la Cogai ? Pas du tout. A première vue, rien ne pouvait justifier la coalition des groupes armés de l’Ituri autour d’une cause commune telle que l’érection de ce district en une province.

Pour autant que la question a été déjà vidée avec la Constitution de 2006 qui a prévu le passage de 11 à 26 provinces, dont l’Ituri. De ce point de vue, l’une des principales revendications de la Cogai paraît vide de sens.

REGARD D’UN NATIF DE L’ITURI

Pourquoi la Cogai s’est, malgré tout, lancée dans son aventure ? La réponse à cette question est la clé à l’énigme. Rappelons-nous qu’en 2003, sur fonds de luttes d'influence régionales aux motivations politiques et économiques, les tensions entre populations Hema et Lendu avait dégénéré en guerre sanglante, faisant plus de 50 000 morts et 500 000 déplacés, avec femmes et enfants pour principales victimes.

C’est par un accord conclu, sous la houlette de la communauté internationale, qu’une paix relative est revenue dans cette partie de la Province Orientale.

En réalité, les ennemis du Congo se sont greffés sur les revendications légitimes des populations de l’Ituri. La question identitaire n’est qu’un leurre, un guet-apens dans lequel les communautés sont tombées. Dans le cas d’espèce, le scénario se dessine déjà.

De la décentralisation on va aboutir à l’autonomie en passant par le fédéralisme.

Au finish, ce sera la balkanisation laquelle va ouvrir la voie à l’annexion de ce territoire du Congo à l’Ouganda. Le jeu de récupération se fera par la manipulation des élites au pouvoir et au sein de la Société civile.

C’est ce que tente d’ailleurs de démontrer avec brio le général Unyon de la Police nationale congolaise – du reste originaire de l’Ituri – dans un ouvrage intitulé : «Le conflit armé en Ituri : la problématique de sa prévention et de sa gestion».

L’ouvrage est sorti en 2009, soit trois ans avant la création de la Cogai. Originaire de l’Ituri, l’auteur pose la vraie problématique : «Bien que, à des degrés divers, d’autres ethnies se soient également impliqués dans le conflit de l’Ituri, les acteurs locaux les plus visibles sont les Hema et les Lendu.

D’autres acteurs visibles sont constitués de groupes armés, de quelques Etats de la région des Grands Lacs, de certaines organisations internationales de quelques organisations non gouvernementales».

Visionnaire, le général Unyon prévenait «Les conséquences du conflit de l’Ituri sont énormes et si dramatiques qu’il faudra plusieurs années pour panser les plaies ouvertes». Aujourd’hui, l’histoire lui donne raison.

RETOUR A LA CASE DEPART

En Ituri, c’est donc le retour à la case départ. La création de la Cogai prouve que les accords de paix conclus jusqu’alors n’ont été que des solutions de surface qui n’ont pas atteint la racine du mal. Et, le vrai problème de l’Ituri n’est pas forcément l’objectif primordial de la Cogai.

Comme en 2003, c’est encore l’Ouganda et le Rwanda qui rythment la cadence. En effet, chacun joue sa partition pour tirer le drap de son côté et avoir gain de cause. La simultanéité du regain de tension tant au Nord-Kivu qu’en Ituri est la parfaite illustration de la connexion entre les deux pays.

En matière géostratégique, rien ne relève du domaine du hasard. De même, en diplomatie, la simultanéité des actions présage nécessairement d’une concertation préalable.

A la limite, il s’agit de se partager l’Est de la RDC. L’Ouganda lorgne l’Ituri et le Rwanda se contentera du Nord-Kivu. Les actuels de l’Est du pays tiennent à ce schéma. Les accusations portées contre le Rwanda sur son soutien plus qu’avéré au M23 tiendraient à cette logique. Pas étonnant que la Cogai bénéficie des mêmes faveurs auprès de l’Ouganda.

Pendant ce temps que fait le gouvernement ? Rien du tout. Dans le Nord-Kivu, par exemple, Kinshasa continue à attendre, malgré toutes les preuves fournies autant par l’Onu que Human Rights Watch, les conclusions d’une pseudo-mission d’enquête pour se prononcer officiellement. En Ituri, par contre, le silence est total. Sans doute, le dossier est classé «secret défense».

C’est la mode depuis un temps. Le drame est que plus Kinshasa se réserve, plus les tireurs de ficelles poursuivent leur œuvre de pillage des ressources naturelles du pays. Et pendant ce temps, Kigali et Kampala se frottent les mains.

[Le Potentiel]