jeudi 23 mai 2013

Absence de Bouteflika : pour l’opposition, il faut "déclarer la vacance du pouvoir"

© AFP

Face aux incertitudes entourant l’état de santé du chef de l'État algérien hospitalisé en France, plusieurs partis politiques appellent le Conseil constitutionnel à appliquer l'article 88 de la Constitution afin de destituer le président.

L’état de santé d’un chef d’État n’en finit plus de susciter rumeurs et affolement. Le président algérien Abdelaziz Bouteflika, transféré le 27 avril à l’hôpital du Val-de-Grâce après un mini-AVC, est toujours hospitalisé en France, selon les informations recueillies lundi 20 mai par FRANCE 24 auprès du Quai d’Orsay.

Cette déclaration, la première apportée par le ministère des Affaires étrangères depuis l’arrivée du chef de l’État algérien dans l'Hexagone, ne manquera pas de relancer la question sur sa capacité à gouverner le pays.

En Algérie, plusieurs partis appellent désormais à destituer Abdelaziz Bouteflika comme le stipule l’article 88 de la Constitution.

Le Premier ministre parle d'un "état de santé en amélioration"

Le Premier ministre algérien Abelmalek Sellal s'est exprimé, lundi soir, sur la santé du président Abdelaziz Bouteflika, via un communiqué de presse.

"Après avoir subi des examens médicaux à l'hôpital du Val de Grâce à Paris, le président de la République, dont le pronostic vital n'a jamais été engagé et qui voit son état de santé s'améliorer de jour en jour, est tenu, sur recommandation de ses médecins, d'observer un strict repos en vue d'un total rétablissement", indique le texte de cette déclaration rendue publique par l'agence APS.

En cas de "maladie grave et durable" du président et s’il "se trouve dans l'impossibilité totale d'exercer ses fonctions", la Constitution prévoit que le Conseil constitutionnel propose à l'unanimité "au Parlement de déclarer l'état d'empêchement".

Si la majorité des deux-tiers des membres de l'Assemblée nationale populaire et du Sénat est réunie, le président du Conseil de la Nation (Sénat) est alors chargé de l'intérim durant 45 jours. Il est ensuite "procédé à une déclaration de vacance par démission de plein droit" du chef de l'État et une nouvelle élection doit se tenir dans les 60 jours.

"Je pense que l’Algérie a besoin d’un président en bonne santé, capable de gouverner", affirme ainsi le président du Front national algérien, Moussa Touati, dans un entretien accordé lundi 20 mai au site d’information Tout sur l’Algérie, (TSA).

"Les obligations de l’État demandent beaucoup de présence. Son état de santé ne lui permet pas d’assumer sa mission de gouverner un État et tout un peuple. Et je pense qu’il faut appliquer les lois de la République.

L’article 88 de la Constitution est clair en ce qui concerne ce cas et son application s’impose pour préserver les intérêts du pays et du peuple algérien", conclut-il.

"Son état de santé ne lui permet plus de gouverner"

Même son de cloche du côté du parti islamiste Mouvement de la société pour la paix (MSP).

"Le flou entourant la question de la santé du président a déstabilisé le pays, ce qui va compliquer la situation politique, affirmait ainsi le 18 mai dans le quotidien "El Watan", Abderrezak Makri, fraîchement élu à la tête du MSP. Le temps est venu d'appliquer l’article 88 de la Constitution."

Pour Abdesselam Ali-Rachedi, porte-parole du parti Itinéraire démocratique et social, interrogé par "El Watan" également le 16 mai, la procédure aurait déjà dû être lancée. "En théorie, le Parlement aurait dû proclamer l’état d’empêchement en application de l’article 88 de la Constitution. Comme l’Algérie n’est pas un État de droit, cela ne s’est pas fait", avance-t-il.

"Ce serait peut-être un bon signal qu’enfin ces institutions soient respectées"

Pour Kader Abderrahim, chercheur associé à l'Iris et spécialiste du Maghreb interrogé

L'application de l'article 88 de la Constitution demandée dimanche par FRANCE 24, "puisque le président de la République est empêché de diriger pour des raisons de santé, il devrait être démis de ses fonctions.

C’est la Constitution qui avait été proposée par Abdelaziz Bouteflika lui-même et adoptée, qui le prévoit.

Je pense que ce serait peut-être un bon signal qu’enfin ces institutions soient respectées et pas seulement utilisées ou malmenées en fonction d’intérêts particuliers ou privés. Ce serait également un bon signal à envoyer aux partenaires de l’Algérie et aux Algériens eux-mêmes.

On verra dans les heures qui viennent la fois si les informations circulent sur la dégradation de l'état de santé d'Abdelaziz Bouteflika sont avérées. Si c’est le cas, il faudra agir très vite".

À moins d'un an de la présidentielle, tout semblait indiquer qu’Abdelaziz Bouteflika souhaitait briguer un 4e mandat. Réélu en avril 2004 puis en avril 2009, l’actuel chef de l’État détient d’ores et déjà un record : celui du président algérien resté le plus longtemps au pouvoir.

Baya HAMOU
France24

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