Samedi 11 mai 2013
D’après un panel conduit par Kofi Annan
L'Africa Progress Panel (APP), organisation présidée par l'ex-secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a rendu public à Cape Town (Afrique du Sud) devant le World Economic Forum, un rapport détaillé sur la façon dont certains pays africains sont lésés dans la gestion de leurs ressources naturelles.
Pays aux immenses potentialités minières, la RDC aurait perdu entre 2010 et 2012 1,36 milliard USD à l'occasion de cinq transactions réalisées en moyenne au sixième de leur véritable valeur. Le Kazakh ENRC qui a hérité du patrimoine minier du Canadien First Quantum est, entre autres, pointé du doigt.
Le sort des ressources naturelles de la République démocratique du Congo a été au centre d’un débat de dimension internationale initiée par l’ancien secrétaire général des Nations unies, le Ghanéen Kofi Annan, à partir de Cape Town, en Afrique du Sud.
Présidé par Kofi Annan, les dix membres de l'Africa Progress Panel ont, au terme de leurs discussions, relevé que les ressources naturelles de l’Afrique pourraient améliorer de manière spectaculaire la vie de millions de personnes.
Selon le rapport sur les progrès en Afrique de cette année, le continent noir se trouve face à une immense opportunité et les décideurs africains doivent prendre des décisions essentielles.
Soit, investir les recettes tirées des ressources naturelles dans leurs populations, pour créer des emplois et générer de nouvelles opportunités pour les millions d’individus des générations actuelles et futures. Soit, gaspiller ces ressources en permettant une croissance sans emplois et en laissant les inégalités s’installer.
Le cas flagrant de la RDC
Le rapport examine en détail cinq contrats conclus entre 2010 et 2012, qui ont coûté à la RDC plus d’1,3 milliards de dollars de recettes en raison de la sous-évaluation des actifs et des ventes à des investisseurs étrangers.
Cette somme représente le double du budget annuel alloué à la santé et à l’éducation dans un pays qui présente l’un des taux de mortalité infantile les plus élevés au monde et qui compte sept millions d’enfants déscolarisés.
La RDC a souffert d’un manque à gagner d’au moins 1,36 milliard de dollars de revenus potentiels entre 2010 et 2012, en raison de la vente à prix bradés d’actifs miniers à des sociétés offshore.
Selon le rapport, cinq actifs miniers ont été bradés par l’Etat en RDC entre 2010 et 2012, vendus à des sociétés offshore, servant d’intermédiaires, qui réalisent ensuite d'énormes bénéfices en les revendant à des groupes étrangers.
« Aucun pays n’illustre mieux les coûts élevés des échanges de concessions opaques que la République démocratique du Congo », indique le rapport.
Réactions croisées
Réagissant au cas typique de la RDC, Kofi Annan, président de l’Africa Progress Panel, a fait comprendre que « la RDC, qui possède certaines des ressources minières les plus riches au monde, semble ne pas en profiter, car des compagnies d'Etat sous-évaluent systématiquement les actifs sous-jacents.
Des concessions ont été effectuées en des termes qui génèrent d’importants bénéfices pour des investisseurs étrangers, pour la plupart installés dans des paradis fiscaux, entraînant un manque à gagner équivalent pour les finances publiques ».
Réponse du berger à la bergère
Le gouvernement de la RDC n’a pas tardé à réagir à ce rapport. « La RDC n’a rien perdu, ces actifs ont été cédés en totale transparence », a déclaré le ministre des Mines, Martin Kabwelulu, cité par BBC Afrique.
« Combien de fois avons-nous parlé de ces actifs, d’ENRC, Glencore, des Iles Vierges? J’ai répondu à ces questions à maintes reprises », a-t-il renchéri, balayant d’un revers de la main toutes les accusations portées contre la RDC.
Parmi les 5 concessions minières examinées par l’APP, trois (3) concernent le groupe minier kazakh ENRC, qui a acquis des concessions en RDC via des entités offshore logées dans des partis fiscaux tels que les Iles Vierges britanniques.
Le panel s’appuie, entre autres, sur l’affaire d’expropriation des mines de Kishiba et de Lonshi dans le territoire de Sakania ainsi que les rejets de KMT à Kolwezi. Autrefois, propriété du Canadien First Quantum Minerals, ces mines, situées dans la province du Katanga, auraient été cédées dans des conditions les plus obscures au groupe minier britannique Eurasian Natural Resources Corporation (ENRC).
Vendue par le gouvernement, la fabuleuse exploitation minière de Kishiba nichée dans la botte du Katanga, à la frontière avec la Zambie, appartenait en fait à la société canadienne First Quantum. Prétextant une série d'irrégularités, les autorités de la RDC ont en 2009 exproprié sans compensation l’entreprise Frontier Sprl, avant de céder tout son actif au Kazakh ENRC.
Fort de l'appui des autres parties prenantes de son projet, les gouvernements canadien et sud-africain ainsi que la Banque mondiale, First Quantum a immédiatement saisi la Financial Services Authority, le régulateur de la Bourse de Londres où son ennemie jurée, ENRC, est cotée.
Pour compenser la chute dramatique de son action à la suite de l'expropriation, le groupe canadien réclamerait près d’un (1) milliard USD au nouveau propriétaire. La première escarmouche doit avoir lieu, rapporte-t-on dans la presse spécialisée, au deuxième semestre de cette année devant le tribunal d'arbitrage des conflits commerciaux de Washington.
Toutefois, le rapport précise qu’il n’insinue pas de comportement illégal des dirigeants politiques ou des entreprises impliquées, mais demande une enquête plus approfondie.
Le désastre pour un continent pauvre
Tirant les conséquences pour l’Afrique, partant du cas spécifique de la RDC, Kofi Annan a déclaré que « les exonérations d’impôts et l’évasion fiscale sont des problèmes de dimension mondiale qui nous affectent tous. Pour les gouvernements du G8, cela correspond à une perte de revenus.
Mais en Afrique, il y a des répercussions directes sur la vie des mères et des enfants. Dans le monde entier, des millions de citoyens ont aujourd’hui besoin que leurs leaders réagissent et prennent les devants. Heureusement, il semble que l’élan en faveur du changement s’accélère ».
Le panel pense que dans de nombreux pays d’Afrique, les revenus issus des ressources naturelles creusent le fossé entre les riches et les pauvres. Bien des progrès ont été accomplis, note-t-il, une décennie de croissance à un taux très impressionnant n’a pas cependant amené des améliorations comparables dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la nutrition.
L’Africa Progress Panel est convaincu que l’Afrique peut mieux gérer ses vastes richesses en ressources naturelles pour améliorer la vie de ses populations, en définissant des agendas nationaux ambitieux en faveur du renforcement de la transparence et de la responsabilité.
Toutefois, l’évasion et les exonérations fiscales à l’échelle internationale, la corruption et une faible gouvernance constituent des défis majeurs, souligne-t-on dans le rapport.
Le rapport salue donc la volonté de la présidence actuelle du G8, assurée par le Royaume-Uni, ainsi que des autres gouvernements, de mettre la fiscalité et la transparence au cœur du dialogue de cette année.
Il invite tous les pays de l’OCDE à reconnaître le coût de l’inaction dans ce domaine critique. Les pertes subies par l’Afrique sous la forme de sorties de capitaux illicites représentent deux fois plus que ce qu’elle reçoit en aide internationale.
L’APP trouve invraisemblable que certaines entreprises, souvent soutenues par des fonctionnaires malhonnêtes, pratiquent une évasion fiscale contraire à l’éthique et se servent des prix de transfert et de sociétés anonymes pour maximiser leurs profits, alors que des millions d’Africains sont privés d’accès à une nutrition adéquate, à la santé et à l’éducation.
Le mérite du travail de Kofi Annan, après celui de l'ONG anticorruption Global Witness, est de chiffrer pour la première fois l'impact de ce pillage, reconnaissent des spécialistes du secteur minier de la RDC.
Quant à ENRC, cela fait plusieurs semaines que l'étau se resserre autour d’elle. Après des années de soupçon de corruption, le bureau britannique de lutte contre la délinquance financière a annoncé, le 25 avril, l'ouverture d'une enquête sur le groupe minier.
Dans la presse britannique, l’on annonce que des limiers de l’office britannique des fraudes, Serious Fraud Office, s'apprêtent à s'envoler pour la RDC pour enquêter sur le patrimoine minier d’ENRC en RDC.
Le Potentiel
D’après un panel conduit par Kofi Annan
L'Africa Progress Panel (APP), organisation présidée par l'ex-secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a rendu public à Cape Town (Afrique du Sud) devant le World Economic Forum, un rapport détaillé sur la façon dont certains pays africains sont lésés dans la gestion de leurs ressources naturelles.
Pays aux immenses potentialités minières, la RDC aurait perdu entre 2010 et 2012 1,36 milliard USD à l'occasion de cinq transactions réalisées en moyenne au sixième de leur véritable valeur. Le Kazakh ENRC qui a hérité du patrimoine minier du Canadien First Quantum est, entre autres, pointé du doigt.
Le sort des ressources naturelles de la République démocratique du Congo a été au centre d’un débat de dimension internationale initiée par l’ancien secrétaire général des Nations unies, le Ghanéen Kofi Annan, à partir de Cape Town, en Afrique du Sud.
Présidé par Kofi Annan, les dix membres de l'Africa Progress Panel ont, au terme de leurs discussions, relevé que les ressources naturelles de l’Afrique pourraient améliorer de manière spectaculaire la vie de millions de personnes.
Selon le rapport sur les progrès en Afrique de cette année, le continent noir se trouve face à une immense opportunité et les décideurs africains doivent prendre des décisions essentielles.
Soit, investir les recettes tirées des ressources naturelles dans leurs populations, pour créer des emplois et générer de nouvelles opportunités pour les millions d’individus des générations actuelles et futures. Soit, gaspiller ces ressources en permettant une croissance sans emplois et en laissant les inégalités s’installer.
Le cas flagrant de la RDC
Le rapport examine en détail cinq contrats conclus entre 2010 et 2012, qui ont coûté à la RDC plus d’1,3 milliards de dollars de recettes en raison de la sous-évaluation des actifs et des ventes à des investisseurs étrangers.
Cette somme représente le double du budget annuel alloué à la santé et à l’éducation dans un pays qui présente l’un des taux de mortalité infantile les plus élevés au monde et qui compte sept millions d’enfants déscolarisés.
La RDC a souffert d’un manque à gagner d’au moins 1,36 milliard de dollars de revenus potentiels entre 2010 et 2012, en raison de la vente à prix bradés d’actifs miniers à des sociétés offshore.
Selon le rapport, cinq actifs miniers ont été bradés par l’Etat en RDC entre 2010 et 2012, vendus à des sociétés offshore, servant d’intermédiaires, qui réalisent ensuite d'énormes bénéfices en les revendant à des groupes étrangers.
« Aucun pays n’illustre mieux les coûts élevés des échanges de concessions opaques que la République démocratique du Congo », indique le rapport.
Réactions croisées
Réagissant au cas typique de la RDC, Kofi Annan, président de l’Africa Progress Panel, a fait comprendre que « la RDC, qui possède certaines des ressources minières les plus riches au monde, semble ne pas en profiter, car des compagnies d'Etat sous-évaluent systématiquement les actifs sous-jacents.
Des concessions ont été effectuées en des termes qui génèrent d’importants bénéfices pour des investisseurs étrangers, pour la plupart installés dans des paradis fiscaux, entraînant un manque à gagner équivalent pour les finances publiques ».
Réponse du berger à la bergère
Le gouvernement de la RDC n’a pas tardé à réagir à ce rapport. « La RDC n’a rien perdu, ces actifs ont été cédés en totale transparence », a déclaré le ministre des Mines, Martin Kabwelulu, cité par BBC Afrique.
« Combien de fois avons-nous parlé de ces actifs, d’ENRC, Glencore, des Iles Vierges? J’ai répondu à ces questions à maintes reprises », a-t-il renchéri, balayant d’un revers de la main toutes les accusations portées contre la RDC.
Parmi les 5 concessions minières examinées par l’APP, trois (3) concernent le groupe minier kazakh ENRC, qui a acquis des concessions en RDC via des entités offshore logées dans des partis fiscaux tels que les Iles Vierges britanniques.
Le panel s’appuie, entre autres, sur l’affaire d’expropriation des mines de Kishiba et de Lonshi dans le territoire de Sakania ainsi que les rejets de KMT à Kolwezi. Autrefois, propriété du Canadien First Quantum Minerals, ces mines, situées dans la province du Katanga, auraient été cédées dans des conditions les plus obscures au groupe minier britannique Eurasian Natural Resources Corporation (ENRC).
Vendue par le gouvernement, la fabuleuse exploitation minière de Kishiba nichée dans la botte du Katanga, à la frontière avec la Zambie, appartenait en fait à la société canadienne First Quantum. Prétextant une série d'irrégularités, les autorités de la RDC ont en 2009 exproprié sans compensation l’entreprise Frontier Sprl, avant de céder tout son actif au Kazakh ENRC.
Fort de l'appui des autres parties prenantes de son projet, les gouvernements canadien et sud-africain ainsi que la Banque mondiale, First Quantum a immédiatement saisi la Financial Services Authority, le régulateur de la Bourse de Londres où son ennemie jurée, ENRC, est cotée.
Pour compenser la chute dramatique de son action à la suite de l'expropriation, le groupe canadien réclamerait près d’un (1) milliard USD au nouveau propriétaire. La première escarmouche doit avoir lieu, rapporte-t-on dans la presse spécialisée, au deuxième semestre de cette année devant le tribunal d'arbitrage des conflits commerciaux de Washington.
Toutefois, le rapport précise qu’il n’insinue pas de comportement illégal des dirigeants politiques ou des entreprises impliquées, mais demande une enquête plus approfondie.
Le désastre pour un continent pauvre
Tirant les conséquences pour l’Afrique, partant du cas spécifique de la RDC, Kofi Annan a déclaré que « les exonérations d’impôts et l’évasion fiscale sont des problèmes de dimension mondiale qui nous affectent tous. Pour les gouvernements du G8, cela correspond à une perte de revenus.
Mais en Afrique, il y a des répercussions directes sur la vie des mères et des enfants. Dans le monde entier, des millions de citoyens ont aujourd’hui besoin que leurs leaders réagissent et prennent les devants. Heureusement, il semble que l’élan en faveur du changement s’accélère ».
Le panel pense que dans de nombreux pays d’Afrique, les revenus issus des ressources naturelles creusent le fossé entre les riches et les pauvres. Bien des progrès ont été accomplis, note-t-il, une décennie de croissance à un taux très impressionnant n’a pas cependant amené des améliorations comparables dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la nutrition.
L’Africa Progress Panel est convaincu que l’Afrique peut mieux gérer ses vastes richesses en ressources naturelles pour améliorer la vie de ses populations, en définissant des agendas nationaux ambitieux en faveur du renforcement de la transparence et de la responsabilité.
Toutefois, l’évasion et les exonérations fiscales à l’échelle internationale, la corruption et une faible gouvernance constituent des défis majeurs, souligne-t-on dans le rapport.
Le rapport salue donc la volonté de la présidence actuelle du G8, assurée par le Royaume-Uni, ainsi que des autres gouvernements, de mettre la fiscalité et la transparence au cœur du dialogue de cette année.
Il invite tous les pays de l’OCDE à reconnaître le coût de l’inaction dans ce domaine critique. Les pertes subies par l’Afrique sous la forme de sorties de capitaux illicites représentent deux fois plus que ce qu’elle reçoit en aide internationale.
L’APP trouve invraisemblable que certaines entreprises, souvent soutenues par des fonctionnaires malhonnêtes, pratiquent une évasion fiscale contraire à l’éthique et se servent des prix de transfert et de sociétés anonymes pour maximiser leurs profits, alors que des millions d’Africains sont privés d’accès à une nutrition adéquate, à la santé et à l’éducation.
Le mérite du travail de Kofi Annan, après celui de l'ONG anticorruption Global Witness, est de chiffrer pour la première fois l'impact de ce pillage, reconnaissent des spécialistes du secteur minier de la RDC.
Quant à ENRC, cela fait plusieurs semaines que l'étau se resserre autour d’elle. Après des années de soupçon de corruption, le bureau britannique de lutte contre la délinquance financière a annoncé, le 25 avril, l'ouverture d'une enquête sur le groupe minier.
Dans la presse britannique, l’on annonce que des limiers de l’office britannique des fraudes, Serious Fraud Office, s'apprêtent à s'envoler pour la RDC pour enquêter sur le patrimoine minier d’ENRC en RDC.
Le Potentiel
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