le 02/01/2013
Paul Kagamé, à Nairobi, novembre 2012. © REUTERS/Noor Khamis
Face aux pressions qui se multiplient sur son régime à cause de son soutien supposé aux rebelles du M23, le président rwandais, Paul Kagamé, appelle ses compatriotes à se passer de l'aide internationale.
Rester droit dans ses bottes. Telle semble l’attitude de Paul Kagamé.
Le président rwandais, prenant la parole, à l’occasion de la célébration de la 10e édition du Dialogue national de son pays qui s’est achevée le 14 décembre, est resté de marbre devant les pressions de la communauté internationale, qui l’accuse d’être derrière le mouvement rebelle M23 et qui menace de lui couper les vivres.
La rébellion dans l'est du Congo a plongé le pays dans la tourmente. Kagamé, homme au caractère trempé, dément tout soutien au M23 et invite ses compatriotes à «faire face et à ne pas avoir peur».
L’Agaciro qui signifie «dignité» en kinyarwanda, langue nationale du pays, un programme de développement autocentré, est le nouveau crédo qui devrait permettre aux autorités de Kigali de se passer de l’aide internationale.
Et pour montrer qu’il n’est pas isolé sur la scène internationale, Paul Kagamé a fait de son voisin ougandais, Yoweri Museveni, l’invité d’honneur des festivités du jubilé d’argent des 25 ans de la création du Front patriotique rwandais(FPR), le parti au pouvoir à Kigali, depuis 1994.
Le président ougandais est une vieille connaissance de Kagamé qui avait combattu au sein de ses troupes comme beaucoup de jeunes réfugiés Rwandais à Kampala, pendant la guerre de libération de son pays.
Et c’est de l'Ouganda qu’est partie la rébellion du FPR dirigée par Fred Rwigema, autre proche de Museveni, tué dès le deuxième jour de l’attaque contre le Rwanda et remplacé en catastrophe par Paul Kagamé.
Escalade verbale
Le temps est donc à l’orage dans le Kivu. Depuis que les rebelles congolais du M23 ont pris la ville de Goma, avant de l’évacuer sous la pression de la communauté internationale, on assiste à une escalade verbale entre les autorités de la RDC et celles du Rwanda.
Alors que jusque-là, il avait soigneusement évité de le faire, le président Joseph Kabila a clairement désigné, pour la première fois, son voisin comme «l’agresseur» de son pays.
L’homme fort de Kinshasa a fini par céder à la forte pression de son opinion publique et d’une bonne partie de sa classe politique humiliées par la chute de Goma. La RDC nourrit un fort ressentiment vis-à-vis d’un «petit pays», considéré comme un «fauteur de troubles».
En pointant directement du doigt Kigali, Joseph Kabila semble enhardi par la réaction de la communauté internationale. A commencer par les Etats-Unis qui ont longtemps été considérés comme un allié inconditionnel de Kigali dans la région, depuis le génocide de 1994.
Comme si les Américains cherchaient à se rattraper de n’avoir pas su empêcher le massacre de 800.000 Tutsi et de Hutus modérés.
«Lors d'un appel téléphonique, Barack Obama a souligné que tout soutien au groupe rebelle M23 était incompatible avec le désir de stabilité et de paix du Rwanda», a affirmé la Maison Blanche dans un communiqué.
Cette pression supplémentaire des Etats-Unis intervient après que d’autres partenaires du Rwanda, comme l’Allemagne, le Pays-Bas, le Royaume-Uni ont décidé de suspendre leur aide à la suite de la publication d’un rapport de l’ONU accusant Kigali d’être le parrain du M23.
David plus fort que Goliath
Mais, pour autant, la RDC serait-elle prête à déclarer la guerre au Rwanda? A Kigali, beaucoup pensent que Jospeh Kabila n’osera jamais franchir le Rubicon, car le risque serait trop élevé.
«C’est vrai que, au plan géographique, nous sommes un petit pays mais militairement, nous sommes beaucoup plus puissants que la RDC et, ça, Kabila le sait très bien. A Goma, il a suffi de quelques rebelles pour mettre en déroute l’armée congolaise», confie un universitaire.
Ce dernier ajoute:
«Le président congolais fait du bluff pour calmer son opinion publique. Entre David et Goliath, le plus fort n’est pas celui que l’on croit.»
Il est vrai que dans les Grands Lacs, le Rwanda possède l’une des armées les mieux équipées et l’une des meilleures forces combattantes, aguerries par la lutte de libération menée par le FPR, dirigé à l’époque par Paul Kagamé.
Le pays des Milles collines garde en outre un avantage psychologique sur la RDC, véritable colosse aux pieds d’argiles. Ses dirigeants, contrairement à leurs voisins, connaissent la RDC comme leur poche.
Ainsi, l’actuel ministre de la Défense du Rwanda n’est autre que le général James Kabarebe. Ce jeune officier Tutsi a joué un rôle clé dans la chute de l'ex-président Mobutu en 1997, en combattant aux côtés de Laurent-Désiré Kabila qui, séduit par ses qualités, lui avait confié l’instruction militaire de "son fils Joseph".
Pour le récompenser, Kabila père n’avait pas hésité à nommer Kabarebe… chef d’état-major de l’armée congolaise! Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le stratège militaire est rentré chez lui.
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Barka Ba
SlateAfrique
Paul Kagamé, à Nairobi, novembre 2012. © REUTERS/Noor Khamis
Face aux pressions qui se multiplient sur son régime à cause de son soutien supposé aux rebelles du M23, le président rwandais, Paul Kagamé, appelle ses compatriotes à se passer de l'aide internationale.
Rester droit dans ses bottes. Telle semble l’attitude de Paul Kagamé.
Le président rwandais, prenant la parole, à l’occasion de la célébration de la 10e édition du Dialogue national de son pays qui s’est achevée le 14 décembre, est resté de marbre devant les pressions de la communauté internationale, qui l’accuse d’être derrière le mouvement rebelle M23 et qui menace de lui couper les vivres.
La rébellion dans l'est du Congo a plongé le pays dans la tourmente. Kagamé, homme au caractère trempé, dément tout soutien au M23 et invite ses compatriotes à «faire face et à ne pas avoir peur».
L’Agaciro qui signifie «dignité» en kinyarwanda, langue nationale du pays, un programme de développement autocentré, est le nouveau crédo qui devrait permettre aux autorités de Kigali de se passer de l’aide internationale.
Et pour montrer qu’il n’est pas isolé sur la scène internationale, Paul Kagamé a fait de son voisin ougandais, Yoweri Museveni, l’invité d’honneur des festivités du jubilé d’argent des 25 ans de la création du Front patriotique rwandais(FPR), le parti au pouvoir à Kigali, depuis 1994.
Le président ougandais est une vieille connaissance de Kagamé qui avait combattu au sein de ses troupes comme beaucoup de jeunes réfugiés Rwandais à Kampala, pendant la guerre de libération de son pays.
Et c’est de l'Ouganda qu’est partie la rébellion du FPR dirigée par Fred Rwigema, autre proche de Museveni, tué dès le deuxième jour de l’attaque contre le Rwanda et remplacé en catastrophe par Paul Kagamé.
Escalade verbale
Le temps est donc à l’orage dans le Kivu. Depuis que les rebelles congolais du M23 ont pris la ville de Goma, avant de l’évacuer sous la pression de la communauté internationale, on assiste à une escalade verbale entre les autorités de la RDC et celles du Rwanda.
Alors que jusque-là, il avait soigneusement évité de le faire, le président Joseph Kabila a clairement désigné, pour la première fois, son voisin comme «l’agresseur» de son pays.
L’homme fort de Kinshasa a fini par céder à la forte pression de son opinion publique et d’une bonne partie de sa classe politique humiliées par la chute de Goma. La RDC nourrit un fort ressentiment vis-à-vis d’un «petit pays», considéré comme un «fauteur de troubles».
En pointant directement du doigt Kigali, Joseph Kabila semble enhardi par la réaction de la communauté internationale. A commencer par les Etats-Unis qui ont longtemps été considérés comme un allié inconditionnel de Kigali dans la région, depuis le génocide de 1994.
Comme si les Américains cherchaient à se rattraper de n’avoir pas su empêcher le massacre de 800.000 Tutsi et de Hutus modérés.
«Lors d'un appel téléphonique, Barack Obama a souligné que tout soutien au groupe rebelle M23 était incompatible avec le désir de stabilité et de paix du Rwanda», a affirmé la Maison Blanche dans un communiqué.
Cette pression supplémentaire des Etats-Unis intervient après que d’autres partenaires du Rwanda, comme l’Allemagne, le Pays-Bas, le Royaume-Uni ont décidé de suspendre leur aide à la suite de la publication d’un rapport de l’ONU accusant Kigali d’être le parrain du M23.
David plus fort que Goliath
Mais, pour autant, la RDC serait-elle prête à déclarer la guerre au Rwanda? A Kigali, beaucoup pensent que Jospeh Kabila n’osera jamais franchir le Rubicon, car le risque serait trop élevé.
«C’est vrai que, au plan géographique, nous sommes un petit pays mais militairement, nous sommes beaucoup plus puissants que la RDC et, ça, Kabila le sait très bien. A Goma, il a suffi de quelques rebelles pour mettre en déroute l’armée congolaise», confie un universitaire.
Ce dernier ajoute:
«Le président congolais fait du bluff pour calmer son opinion publique. Entre David et Goliath, le plus fort n’est pas celui que l’on croit.»
Il est vrai que dans les Grands Lacs, le Rwanda possède l’une des armées les mieux équipées et l’une des meilleures forces combattantes, aguerries par la lutte de libération menée par le FPR, dirigé à l’époque par Paul Kagamé.
Le pays des Milles collines garde en outre un avantage psychologique sur la RDC, véritable colosse aux pieds d’argiles. Ses dirigeants, contrairement à leurs voisins, connaissent la RDC comme leur poche.
Ainsi, l’actuel ministre de la Défense du Rwanda n’est autre que le général James Kabarebe. Ce jeune officier Tutsi a joué un rôle clé dans la chute de l'ex-président Mobutu en 1997, en combattant aux côtés de Laurent-Désiré Kabila qui, séduit par ses qualités, lui avait confié l’instruction militaire de "son fils Joseph".
Pour le récompenser, Kabila père n’avait pas hésité à nommer Kabarebe… chef d’état-major de l’armée congolaise! Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le stratège militaire est rentré chez lui.
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Barka Ba
SlateAfrique
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