samedi 16 mai 2015

Burundi-Duplicité :Le mauvais signal envoyé par la «communauté internationale»


Les couples Obama et Nkurunziza à Washington. Photo d’archives

Bien que responsable du désordre social et institutionnel qui menace la paix sociale dans son pays et la sécurité dans la sous-région des Grands lacs, le président sortant Pierre Nkurunziza est «sauvé» par la mauvaise foi de l’Union africaine, des Etats-Unis d’Amérique de Barack Obama et du Conseil de sécurité des Nations Unies. 


La société civile burundaise a appelé, vendredi 15 mai, la population à poursuivre le mouvement de résistance pour s’opposer à la volonté de Nkurunziza de briguer un troisième mandat au dépit de l’interdit constitutionnel. Ambiance.

Le putsch mené par le général Godefroid Niyombare depuis bientôt trois jours a échoué. Dès jeudi soir, les putschistes ont reconnu leur échec. Vendredi, un général de la police et deux généraux de l’armée auraient été arrêtés. 


Le sort de Niyombare reste incertain. Un porte-parole de la présidence burundaise assure que celui-ci aurait été appréhendé.

Il faut être un parfait naïf pour croire que la crise burundaise est sur le point de connaître son épilogue. Le problème reste entier. Et ce, aussi longtemps que Nkuruzinza persistera dans son « coup de force constitutionnel » consistant à briguer un troisième mandat. 


En tous cas, le peuple burundais paraît décidé à résister jusqu’au bout face à cette dérive despotique.

Au moment où ces lignes sont écrites, on apprend que Pierre Nkurunziza est arrivé au palais présidentiel à Bujumbura. Il est arrivé la veille dans sa ville natale de Ngozi. L’homme devrait livrer un «message» à la nation. 


Que va-t-il faire de sa « victoire » face aux putschistes ? 

Va-t-il durcir un régime qui est désormais frappé du sceau de l’illégitimité?

Le peuple burundais et les masses africaines se souviendront longtemps de la duplicité qui a caractérisé la position tant des Etats-Unis d’Amérique de Barack Obama, de l’Union africaine que du reste de la très nébuleuse « communauté internationale ».

Washington a été la première capitale occidentale à rappeler, jeudi 14 mai, que Nkurunziza était encore le « chef d’Etat légitime » du Burundi. Barack Obama - qui a déclaré en 2009 à Accra, au Ghana, que « l’Afrique a besoin d’institutions fortes, elle n’a pas besoin d’hommes forts » - aurait dû souligner que ce « chef d’Etat légitime » est le principal responsable du chaos qui prévaut dans son pays. 


Bilan : une trentaine de morts. Pour ne l’avoir pas dit, Obama n’a pas manqué de décevoir non seulement le peuple burundais mais aussi tous les Africains qui aspirent à la démocratie et à l’alternance.

A New York, les quinze membres du Conseil de sécurité ont enchaîné, le même jeudi, en condamnant «ceux qui cherchent à s’emparer du pouvoir par des moyens illégaux» avant d’appeler à des «élections crédibles». 


Des "élections crédibles" dans un Burundi dirigé désormais par une sorte de "Caligula" conforté par sa "victoire" face aux officiers putschistes?

Le double langage de Didier Reynders

A Addis Abeba, le Conseil de paix et sécurité de l’Union africaine a abondé dans le même sens en condamnant « toute tentative de prendre le pouvoir par la force » au Burundi. Au motif que « cela est contraire à tous les principes » de l’Union Africaine. 


Faudrait-il en rire ou en pleurer? 

Question : les principes qui régissent l’Union africaine autorisent-ils les chefs d’Etat africains à violer la Constitution de leurs pays en s’accrochant au pouvoir au mépris du nombre de mandat fixé par celle-ci?

Intervenant, jeudi 14 mai, sur TV5 Monde, le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a déclaré, sans convaincre, que la Belgique n’était plus « une puissance coloniale pour dicter aux Burundais ce qu’ils devaient faire ». Quel double langage ? 


Lors de l’élection présidentielle du 28 novembre 2011 au Congo-Kinshasa, Reynders ne s’était-il pas érigé en "avocat du diable" en déclarant que les fraudes dénoncées par les observateurs tant nationaux qu’internationaux "ne modifiaient guère l’ordre d’arrivée"? 

Depuis quand a-t-il découvert que la Belgique n’était plus une "puissance coloniale"?

Selon le HCR (Haut-commissariat aux réfugiés), 105.000 Burundais se sont réfugiés au Rwanda, en Tanzanie et au Congo-Kinshasa. 


"Les masses africaines, elles, garderont longtemps en mémoire le mauvais signal envoyé par l’Amérique d’Obama et la communauté internationale dans une crise burundaise provoquée pourtant par Nkurunziza lui-même, commente un enseignant burundais joint à Bujumbura. Face aux syndicats des chefs d’Etat, le régicide reste désormais l’unique arme à la disposition des masses africaines en quête de démocratie". 

Et d’ajouter : "Les putschistes ont sans doute perdu, mais Nkurunziza n’a pas gagné...". 
__________________
Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire