Par LEXPRESS.fr, publié le 09/01/2011 à 13:40, mis à jour à 13:57
"Le groupe [de ravisseurs] a été immédiatement pris en chasse par la garde nationale nigérienne pour lui interdire de rejoindre une zone refuge", a indiqué le ministère des Affaires étrangères.
AFP PHOTO / Boureima HAMA
Antoine de Léocour et Vincent Delory auraient été "exécutés" au cours de l'opération militaire visant à les libérer.
Que s'est-il passé?
Vendredi 7 janvier, deux jeunes hommes de nationalité française sontkidnappés entre 22h30 et 23h30 locales au maquis "Le Toulousain", du quartier résidentiel du Plateau, dans le centre-ville de Niamey, la capitale du Niger. Deux individus "armés et enturbannés" auraient fait irruption dans le restaurant rempli de clients et auraient contraint les deux hommes à les suivre. Les deux Français "sont repartis avec eux à bord d'un 4x4 immatriculé au Bénin dans lequel d'autres hommes armés les attendaient", a témoigné un membre du personnel du restaurant.
Comment l'opération militaire s'est-elle engagée?
Selon l'état-major français, l'armée nigérienne a "réagi très vite" etpris en chasse les ravisseurs dès l'enlèvement des deux Français. L'opération est rapidement coordonnée avec des éléments français présents dans la région.
Un avion de surveillance français doté de moyens d'écoute et de vision de nuit a appuyé l'opération au sol. "A partir de là, on ne les lâche plus. Les ravisseurs tentaient de gagner une zone refuge au peu plus au nord", au Mali, où la situation serait devenue "extrêmement sensible" pour les otages, souligne le porte-parole de l'état-major, le colonel Thierry Burkhard.
Puis, un nouvel accrochage en "zone frontalière" se produit entre les ravisseurs et l'armée nigérienne et des forces françaises engagées sur le terrain. "On retrouve les corps sans vie des deux otages. Au vue des premières constatations, il est très probable qu'ils ont été exécutés par les terroristes", souligne le colonel Burkhard.
Deux militaires français auraient été légèrement blessés au cours de cette opération et "plusieurs" ravisseurs tués.
Qui sont les ravisseurs?
Al-Qaeda au maghreb islamique (Aqmi) n'a pas formellement été désignée par les autorités françaises comme responsable de l'enlèvement des deux jeunes hommes. Mais Nicolas Sarkozy acondamné la "barbarie terroriste" tandis que l'armée française évoque une "exécution" des otages par des ravisseurs qualifiés de "terroristes".
Pour Dominique Thomas, spécialiste des mouvements jihadistes à l'EHESS, "si c'est vraiment un coup d'Aqmi, et même s'il s'agit d'une sous-traitance auprès de brigands locaux, l'objectif est de dire à Paris: 'Vos ressortissants ne sont plus en sécurité nulle part'." "Le but est de déstabiliser encore davantage la situation, de prouver que dans tout le Sahel, même dans les capitales jusqu'ici sûres, ils peuvent frapper", a ajouté le spécialiste. D'après Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences-Po, il est "désormais certain qu'Aqmi a fait passer le message à ses multiples partenaires criminels qu'elle était disposée à payer un très bon prix la capture de ressortissants français, qui lui seraient transférés dans un second temps".
De nombreux experts estiment qu'en s'en prenant ainsi directement à la France, dans le Sahel à défaut du territoire français, Aqmi parachève son ralliement au jihad global prôné par Oussama Ben Laden.
Qui étaient les otages?
Antoine de Léocour et Vincent Delory avaient 25 ans et étaient originaires de Linselles, dans le Nord. Amis d'enfance "depuis la maternelle", ils étaient tous les deux amoureux de l'Afrique et séjournaient dans la capitale du Niger pour l'union d'Antoine avec une Nigérienne. "Il était revenu au Niger pour le mariage. Il travaillait en Centrafrique et il comptait repartir exercer son métier pour une ONG en Centrafrique, juste après les noces", a détaillé Marie-Agnès Dhulu, conseillère municipale de Linselles, qui connaît "très bien" les parents d'Antoine. "Antoine connaissait très bien l'Afrique, je ne pense pas qu'il s'imaginait être en danger dans la capitale", a ajouté le député du NordChristian Vanneste (UMP).
Et les ressortissants français au Niger?
La France appelle ses ressortissants à "la plus grande vigilance" dans les pays du Sahel "aucun endroit ne pouvant plus être considéré comme sûr" après l'enlèvement et la mort des deux otages français, indique le ministère des Affaires étrangères sur son site Internet.
"Il est tout particulièrement demandé aux Français de restreindre leurs déplacements en se référant aux indications figurant dans les Conseils aux voyageurs propres à chacun des pays du Sahel, ainsi que sur les sites Internet de nos ambassades sur place", a détaillé le ministère des affaires étrangères.
Quelques 1550 ressortissants français résident au Niger, dont plus des trois-quarts dans la capitale, Niamey.
Et les autres otages français?
Le rapt d'Antoine et Vincent intervient plus de trois mois après l'enlèvement, revendiqué par Aqmi, de cinq Français travaillant pour la plupart pour Areva. "Cela met Paris dans une position encore plus inconfortable, cela complique encore davantage d'éventuelles négociations sur le sort des otages de septembre", craint Dominique Thomas.
Pour la libération de ces cinq otages, Aqmi demande le retrait de l'armée française d'Afghanistan, où un 53e soldat français vient d'être tué, et somme la France de négocier directement avec Ben Laden.
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